Hyôka:Tome 1 Chapitre 6

From Baka-Tsuki
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6 - Les Vieux Jours du Glorieux Club de Littérature Classique[edit]

Nous étions fin juillet et les vacances d'été avaient commencé. Aujourd'hui, j'étais à vélo en direction, comme d'habitude, du Lycée Kamiyama. Il me fallait vingt minutes pour me rendre de chez moi à l'école à pied mais je n'avais aucune idée de combien de temps cela prendrait à vélo. Je me suis arrêté pour acheter une canette de café dans un distributeur et faire une pause. J'ai ensuite suivi la rivière et tourné à l'hôpital avant d'arriver en face de Kamiyama. Je me tenais là, incrédule.

Les vacances d'été étaient supposées avoir déjà commencé.

Mais les terrains de sport étaient recouverts d'équipement et des étudiants de leur uniforme d'été. Je pouvais entendre de la musique sortant de divers instruments à vent, de guitares électriques et de flûtes en bambou. Même si le bloc spécialisé était à distance conséquente de ma position, je voyais bien que des élèves emplissaient ses corridors. Ils étaient bien sûr tous là afin de préparer le Festival Kanya. Le côté énergique de Kamiyama avait pris l'ascendant maintenant que les vacances d'été avaient commencé. Des foules gens s'agitaient dans tous les sens comme des fourmis l'air de dire : ‹ Allez les gens, le festival arrive à grands pas ! Maintenant que ces cours ennuyeux sont terminés, on peut tout donner ! ›

Je regardais tout ce petit monde débordant d'énergie quand j'ai repéré une personne trottant dans ma direction. C'était Satoshi Fukube. Il portait sur lui des vêtements normaux, une chemise à manches courts et un short, et derrière lui un petit sac à dos semblant destiné aux sportifs.

« Yo, »

« Désolé ! Je t'ai fait attendre ? »

J'écoutais gaiement la musique du club de chant a cappella en pleine répétition sur le cour central, et il fallait que Satoshi me fasse me retourner avec une voix à vous en hérisser le poil. J'ai envisagé de tourner mon vélo et rentrer, mais j'ai décidé de marcher vers lui et de feindre un coup de pied.

« Wow, Hôtarô ! D'où vient cette soudaine férocité ? »

« Tu peux parler. Tu n'as donc aucune honte à ne pas savoir quand ne pas troubler la paix d'autrui ? »

Satoshi haussa les épaule.

Il semble qu'il n'en ait bien aucune.

« Désolé, la réunion du club d'artisanat a joué les prolongations. »

« Qu'est-ce vous pouviez bien discuter de tout façon ? »

« On va tricoter un tapis mandala style bouddhiste pour le Festival Kanya. Quelques soucis sont survenus et on a dû organiser une réunion d'urgence. »

Dur, dur, tout ça. Et pas seulement pour toi, mais aussi pour Tôgaito, ou toute l'école pourquoi pas.

« Alors, tes notes sont prêtes ? »

J'ai sèchement demandé à Satoshi mais il n'a fait que renvoyer la balle dans mon camp.

« Et toi alors ? C'est pas quelque chose que tu as l'habitude de faire. Tu as quelque chose à l'esprit ? »

La question m'embarrassait un peu, j'ai donc répondu :

« Eh bien, on peut dire ça. »

« Oh ? Voilà qui est inhabituel. Normalement tu cherches des excuses pour ne pas répondre à ce genre de questions… Bon, je vais chercher mon vélo donc tiens le coup encore un peu. »

Et Satoshi partit chercher son vélo en trottinant insolemment vers le parking à deux-roues, me laissant l'attendre là.



Pour connaître la raison pour laquelle j'attendais Satoshi dehors durant un précieux jour de vacances durant lequel je devrais dormir chez moi comme si c'était la dernière fois, il fallait revenir une semaine en arrière, au jour où nous étions proches de découvrir la vérité sur Jun Sekitani alors qu'il ne nous restait plus qu'à lire le premier tome de l'anthologie de notre club, Hyôka, avant de découvrir que l'édition en question était absente du lot. Vu que nous n'arriverions nulle part sans le ce tome, je pensé que je n'aurait pas à tout mettre en œuvre pour trouver la réponse. Mais il était trop tard, j'avais déjà ouvert la boîte de Pandore sans le réaliser.

Je savais que je n'arriverais pas à dissuader Chitanda, je lui ai donc proposé un compromis. Si nous devons enquêter sur cette histoire, nous deux seuls ne sera pas suffisant. Après tout, comme on dit, on n'est vraiment plusieurs qu'à partir de trois. C'était peut-être un peu dur pour elle, mais je l'ai convaincue que nous aurions une meilleur chance avec l'aide de Satoshi et Ibara.

Chitanda finit par accepter de la tête.

« J'imagine que nous n'avons pas le choix. »

Même en aillant accepté de garder cette requête entre nous durant notre discussion au café, j'ai fini par la décevoir. Je ne sais pas si c'est parce que Chitanda réalisa vraiment que nous aurions besoin d'aide, ou parce qu'elle ne voyait plus les indices que nous avions comme important, ou encore si elle a agi sur un autre coup de tête, mais dans tous les cas, elle a demandé une réunion d'urgence entre les membres du club de littérature classique le jour suivant.

Ce jour-là, elle répéta ce qu'elle m'avait dit à moi et conclut par :

« Ce qui est arrivé à mon oncle il y a 33 ans m'intrigue vraiment. »

Ibara accepta le défi immédiatement.

« L'image de couverture m'intéresse. Si l'on peut découvrir ce qui se cache derrière, je pourrais même m'en servir comme matière à sujet de publication pour le club d'étude des mangas. »

Satoshi suivit :

« Le secret d'un conte héroïque déterré par les descendants du Club 33 ans plus tard, hein ? Figurez-vous que je recherchais des informations à propos de cette époque. »

Et approuva l'idée les deux mains levées au ciel. Bien que je n'avais aucun intention de parler vu que j'étais privé d'un quelconque droit de veto, j'ai tout de même décidé d'insérer quelques mots dans la conversation pendant que nous y sommes.

« Vu que l'on a pas encore décidé de quoi écrire dans notre essai anthologique, pourquoi ne pas se servir de l'histoire de Chitanda pour en remplir les pages… Hum, je veux dire, faire d'une pierre deux coup… Désolé, je veux dire, écrire quelque chose d'éloquent à ce sujet. »

Ma proposition économe en énergie, bien que prospective, a été acceptée unanimement. Et voilà comment enquêter sur l'incident du club de littérature classique d'il y a 33 ans est devenu la priorité numéro une du club de littérature classique d'aujourd'hui.



Satoshi roulait sur un vélo tout terrain. Il portait un short, je pouvais donc voir ses jambes et remarquer que sa musculature était plutôt vigoureuse à cet endroit, ce qui n'allait pas avec sa petite taille. Pour un polyglotte comme lui, le seul sport auquel je ne l'aie jamais su intéressé est le cyclisme.

Au passage, mon vélo est ce que l'on appelle communément un wagon familial[1], il n'y pas vraiment de remarque à faire à son propos.

Nous avons suivi la rivière, loin de la rue principale. Lentement, les espaces entre les maisons étaient remplacés par d'énormes rizières. Nous arrêtant à l'ombre d'un marchand de tabac pour échapper au soleil un instant, je sortis un linge de mon sac pour essuyer la sueur qui avait émané de mon corps le long du trajet.

Ahh, quelle agréable sueur.

Quelque chose que je ne dirai jamais. Plutôt, je me demande pourquoi les gens doivent-ils se déplacer pour arriver à destination. ‹ La révolution de l'information n'est pas encore un succès. Camarades, vous devez continuer ! ›[2]

« Satoshi, on y est bientôt ? »

Satoshi rangea son mouchoir dans sa poche et répondit :

« Yep. On y est presque. Si on se réfère à ta vitesse, bien sûr. »

Il sourit.

« Tu seras surpris en voyant leur demeure. Les Chitanda sont l'un des plus grands propriétaires de la ville. »

J'imagine que j'ai hâte. J'aimerais surtout entendre comment se passe le ménage de printemps dans un endroit comme celui-là. Après avoir essuyé plus de sueur avec mon linge, je remis mes pieds sur mes pédales et continuais d'avancer.

Une fois en route à nouveau, Satoshi pris les devants pour nous guider. Après avoir passé de nombreux feux de signalisation, nous arrivâmes sur une route en ligne droite, sur laquelle nous roulions l'un à côté de l'autre. Cela faisait maintenant un moment que nous ne voyons plus que des terres agricoles aux alentours.

Satoshi commença à fredonner gaiement en faisant tourner ses pédales. Sourire était son expression de base mais il semblait particulièrement enchanté aujourd'hui. J'ai décidé de lui demander :

« Satoshi, »

« Oui ? »

« Tu es heureux ? »

Satoshi se tourna vers moi et répondit avec joie :

« Bien sûr que oui. J'aime faire du vélo. Regarde ce ciel bleu ! Ces nuages blancs ! Peut importe à quel point ils peuvent avoir l'air monotones, la joie de les regarder sur un vélo à pleine vitesse est comme de… »

J'ai rapidement interrompu la tentative de faire une blague de Satoshi.

« J'ai cru que ta vie de lycéen était moyenne au mieux. »

Satoshi avait soudainement l'air attristé quand il répondit :

« Oh… Tu parles de cette histoire avec la teinte de rose. »

En voilà une bonne mémoire, sachant que nous avons abordé ce sujet pourquoi la dernière fois il y a pratiquement trois mois. Satoshi ralentit un tantinet et dit en regardant vers l'avant :

« Tu sais, dans l'ensemble, je pense que ma vie de lycéen est plutôt rose. »

« Je dirais plutôt quelque chose comme fuchsia fluo. »

« Haha, c'est bien aussi. Dans ce cas, la tienne est grise. »

« Tu l'as déjà dit, ça. »

M'ayant à peine fait entendre, Satoshi ne s'est pas mis à siffloter d'allégresse.

« J'ai dit ça ? Ne le prends pas mal, je ne voyais pas cela comme un insulte quand j'ai dit que ta vie de lycéen était grise. »

« … »

« Par exemple, si ma vie fuchsia fluo, alors personne ne peut la peindre en rose. Je ne les laisserai pas faire. »

J'ai raillé son visage souriant dans l'instant.

« Vraiment ? J'ai cru qu'elle avait déjà été peinte. »

« Bien sûr que non ! »

Satoshi dit cela avec une surprenante fermeté en continua :

« Elle ne l'a pas été, Hôtarô. Je suis déjà bien occupé avec le comité général du conseil des étudiants et le club d'artisanat, tu penses que j'accepterais un truc pareil ? Déconne pas. Qu'il s'agisse d'organiser le calendrier du Festival Kanya ou de tricoter le tapis mandala, j'ai apprécié chacun de ces moments. Autrement, qui voudrait sacrifier une joyeuse balade à vélo un dimanche ou ses vacances d'été pour aller à l'école ? »

« Ils n'iraient pas ? »

« Il y a des moments où une homme doit savoir prêter ses compétences et sa présence pour le bien d'une meilleure société. Mais même dans ce cas, tu ne bougerais pas d'un pouce, pas vrai ? Si quelqu'un de gris comme toi voyait un porteur de drapeau déclarer que ‹ tout le monde est rose ›, tu agiterais ta main en disant : ‹ ne compte pas sur moi. › »

Après avoir dit tout cela en une seule inspiration, il se calma un peu et continua :

« Si je voulais vraiment t'offenser, j'aurais dit que ta vie n'a pas de couleur. »

Satoshi se tut après ça. J'ai ruminé tout ce qu'il venait de dire pendant que le soleil brûlait ma peau.

« … »

Et fit un visage morne.

« Je ne vais pas dire que j'aimerais être comme toi ou quelque chose dans le genre, tu sais. »

« Nan, c'est pas ce que je voulais dire. »

Satoshi donna de la voix et ria. Il dit ensuite :

« Regarde, Hôtarô, nous sommes arrivés à la résidence Chitanda ! »



Digne de sa description, la ‹ demeure › des Chitanda se situait au milieu d'une vaste rizière. Elle était construite tel un bungalow de style japonais et entourée de haies. Le son de l'eau qui coule suggère la présence d'un étang dans le jardin, qui était lui-même entouré de pins bien taillés. Et devant le grand portail ouvert, il y avait des gens qui aspergeaient de l'eau autour d'eux de manière rituelle[3].

« Alors, qu'est-ce que t'en penses ? Plutôt impressionnant, hein ? »

Même si je n'y connaissais rien en architecture ou en jardinage japonais, Satoshi dit cela en gonflant son torse. Je n'avais aucune idée d'à quel point cette propriété était impressionnante, mais je sentais bien l'élégance et la dignité qui s'en dégageait.

J'ai jeté un œil à ma montre pendant que nous nous émerveillions sur l'endroit. Nous étions pile à l'heure… Non, il semblerait que nous étions un petit peu en retard.

« Allons-y, les filles nous attendent. »

« Ah, ouais… Mais, Hôtarô, »

« Quoi encore ? »

« On ne devrait pas attendre qu'un domestique ou deux viennent nous accueillir ? »

J'ai décidé d'ignorer sa remarque. J'ai mis le pied sur le porche et ai sonné à la porte.

« … Un instant~ »

Après cet instant, la porte nous a été ouverte par nul autre que Chitanda elle-même. Elle parlait avec sa voix habituelle, son rhume d'été devait donc être de l'histoire ancienne. Ses long cheveux étaient détaché et glissaient librement sur ses épaules, elle était habillée d'un une-pièce vert clair adéquat à la situation et la météo.

« Pardon de vous avoir fait attendre. »

Je pouvais entendre Satoshi faire claquer sa langue, probablement déçu qu'aucun domestique ne soit venu nous accueillir.

Après avoir laissé nos chaussures à l'entrée en béton, nous avons suivi Chitanda le long d'un corridor en bois.

« Où avez-vous laissé vos vélos ? »

« Où est-ce que l'on aurait dû les laisser ? »

« N'importe où convient. »

Alors pourquoi tu demandes ?

Nous avons rapidement atteint une paire de portes en papier coulissantes, une brise fraîche s'est échappée de la pièce en les ouvrant. Le plafond de cette dernière étant haut, l'air à l'intérieur agréablement frais. La pièce elle-même devait faire environ… quinze mètres carrés. C'est énorme.

« Vous êtes en retard. »

Ibara était déjà arrivée. Il semble qu'elle avait quelques affaires à régler à l'école avant de venir car elle portait son uniforme. Elle était assise à une table marron sombre qui réfléchissait la lumière de manière assez terne. Par-dessus celle-ci étaient empilées plusieurs feuilles de papier ; probablement les notes d'Ibara. Elle devait être assez motivée.

« Asseyez-vous où vous le souhaitez s'il vous plaît. »

Après que Chitanda nous en ait donné la permission, je me suis assis en face d'Ibara. Chitanda était assise à la place de l'hôte, Satoshi prit donc la place restante. C'était assez rare de voir quelqu'un avec un sac à dos s'asseoir dans une alcôve de réception style japonais traditionnel[4]. Il en sortit de nombreuse feuilles de papier. J'ai également ouvert mon sac bandoulière et sorti mes propres notes. Ibara jouait avec son stylo l'air prête à en découdre. Chitanda posa alors une pile de papiers sur la table.

« Et maintenant, »

Chitanda prit la parole,

« commençons notre réunion d'investigation. »

Nous avons tous salué en nous inclinant.



Naturellement, la réunion était dirigée par notre présidente de club, Chitanda.

« Vérifions notre agenda pour aujourd'hui. Tout a commencé avec une réminiscence de ma part. Ensuite, après la découverte de l'anthologie ‹ Hyôka ›, j'ai réalisé que ce qui est arrivé au club de littérature classique il y a 33 avait un rapport avec cette réminiscence. L'objet de cette réunion sera de spéculer sur ce qui est arrivé il y a 33 ans. En outre, tous les faits qui auront été confirmés seront utilisés comme base pour l'essai de l'anthologie du club de littérature classique de cette année. »

Bien qu'Ibara s'intéressait principalement au design de l'illustration de la couverture, elle n'avait pas l'air mécontente l'annonce de Chitanda. Peut-être a-t-elle réalisé que le dessin avait lui-même un rapport avec l'incident, ou Chitanda l'avait-elle briffée à l'avance ?

« Durant cette dernière semaine, nous avons tous collecté des documents de recherche de toute sorte. Nous allons donc exposer nos trouvailles et spéculer sur l'incident d'il y a 33 ans. Nous mettront enfin en commun tout ce que nous savons pour en déduire l'hypothèse la plus probable. »

Hein ? C'est vraiment ce qui était prévu ? Que je sache, Chitanda nous a seulement dit de ramener tout la documentation que nous pourrions trouver. Je ne me souviens pas avoir entendu quoi que ce soit à propos de déduire une conclusion… Mais j'étais visiblement le seul à être surpris, je devais donc être celui qui n'avait pas fait attention. Zut, j'imagine que je vais devoir improviser, mais j'ai un nœud à l'estomac maintenant.

Sans aucun aide-mémoire avec elle, Chitanda nous regardait un à un et nous expliquait sans saccades :

« Nous allons chacun à notre tour présenter un compte rendu de nos trouvailles, s'en suivra potentiellement des questions des autres membres, établir une hypothèse et critiquer la dite hypothèse. Poser des questions durant le compte rendu est défendu… Cette règle est là pour éviter que l'on se perde dans ce que l'on dit, vous comprenez bien. Maintenant, écoutons le premier compte rendu. »

Hé, c'est qu'elle est plutôt douée comme présidente. Qui sait, elle a peut-être un talent naturel pour ce genre de choses.

Non, elle m'a bien dit être du genre à vouloir comprendre l'entier d'un système, ce n'est pas si surprenant de la voir si bien informée des procédures dans une réunion.

« Peut-on commencer le premier rapport… Ah ? »

« Chi-chan, qui est censé commencer ? »

« Hum, qui donc en effet ? »

… Et après elle ajoute quelque chose comme ça. Je me demande vraiment si elle est facile à comprendre ou si son organisation est simplement limitée à sa propre personne. Je me suis manifesté à une Chitanda confuse.

« Peut importe. Pourquoi ne commences-tu pas ? »

Normalement, le président de l'assemblée est celui qui débute la conversation, non ? Ce n'est pas comme si Chitanda n'avait rien à présenter. Et vu qu'elle est celle à avoir décidé de la façon de procéder, elle peut montrer l'exemple pour que tout se passe sans encombres. Elle acquiesça et dit :

« Oui, tu as raison. Très bien alors… nous allons suivre le sens des aiguilles d'une montre en commençant par moi. »

Elle distribua ses notes l'instant après avoir dit cela.

Un simple coup d'œil me dit qu'il s'agissait de la source de son investigation, l'avant-propos de ‹ Hyôka Tome 2 ›. Je vois, commençons par le commencement, c'est ça ? Mais je ne dirais pas que ça colle à son style. Je relis donc ce paragraphe que je connaissais déjà.



Avant-propos


Et voilà qu'arrive à nouveau le festival culturel cette année.


Cela fait un an que Sekitani-sempai nous a quittés.

Durant cette année, Sempai s'est inscrit dans la légende et est devenu un héros. Résultat, le Festival Culturel de cinq jours va débuter comme à son habitude.

Néanmoins, à mesure que la légende s'est éparpillée, je me suis plongée dans de profondes réflexions. Dans dix ans, les gens se souviendront-ils encore du guerrier silencieux et du gentil héros ? Tout ce que Sempai nous a laissés, c'est cette anthologie ‹ Hyôka ›, qu'il a nommé lui-même.

Tel le sacrifice du conflit qu'il fut, même son sourire finirait par suivre le cours du temps vers l'éternité.

Non, peut-être que nous ferions mieux d'oublier. Cela n'avait pas la vocation d'être un conte héroïque.

Une fois que toute subjectivité aura disparue, cette histoire deviendra un classique transcendant toute perspective historique.


Viendra-t-il un jour où nos histoires deviendront un classique pour quelqu'un dans le futur ?


13 octobre 1968
Yôko Kôriyama



Après s'être raclée la gorge, Chitanda débuta son explication :

« Ce extrait nous vient de l'essai anthologique ‹ Hyôka ›. Afin de déterminer le contenu d'une édition annuelle de, une personne devrait lire l'avant-propos mentionnant les sujets abordés à l'intérieur. Cela étant dit, ce paragraphe est malheureusement la seule et unique mention de l'incident d'il y a 33 ans. Il se pourrait que le détails soient écrit ailleurs, mais nous n'avons pas le premier tome… Dans tous les cas, j'ai résumé les principales informations contenues dans cet avant-propos sur cette page… »

Qu'elle nous distribua.



  1. ‹ Sempai › nous a quittés. (D'où ?)
  2. ‹ Sempai › est devenu un héros il y a 33 ans, il était devenu une légende l'année suivante
  3. ‹ Sempai › était un ‹ guerrier silencieux › et ‹ gentil héros ›
  4. ‹ Sempai › nomma cette anthologie ‹ Hyôka ›
  5. Il y avait un conflit et des sacrifices ont été faits (‹ Sempai › = sacrifice ?)



« Waou. »

Voilà qui était bref et direct. Je n'ai pas pu m'empêcher de soupirer interrogativement, mais quand j'y pense, Chitanda peut bien être l'incarnation de la curiosité, elle est aussi une étudiante distinguée. Si elle ne savait pas si bien résumer les choses, elles n'aurait pas d'aussi bonnes notes.

Après avoir vérifié que tout le monde avait fini de lire, Chitanda continua son explication.

« Tout d'abord, ce ‹ Sempai ›, mon oncle, a quitté le Lycée Kamiyama. Le dernier diplôme qu'il ait obtenu est son diplôme du collège. J'espère que vous me suivez tous. »

Bien que ce soit la première fois que j'entende Chitanda mentionner le fait que Jun Sekitani a quitté le Lycée Kamiyama, je n'étais pas particulièrement surpris. Ce n'était pas difficile de faire le lien entre ça et la première phrase de l'avant-propos : ‹ Sekitani-sempai nous a quittés ›.

Enfin bon, elle ne sait probablement pas pourquoi son oncle a quitté le lycée… Non, elle ne sait définitivement pas. Si elle le savait, elle l'aurait déjà mentionné. En y repensant, elle a mentionné au café Sandwich à l'Ananas que les Chitanda et les Sekitani n'avaient plus de contacts entre-eux.

« Ensuite , l'avant-propos met particulièrement l'élément du temps en avant. Troisième point, fait intéressant, bien que ‹ Sempai › soit décrit comme silencieux, il est aussi décrit comme un ‹ guerrier › et comme un ‹ héros ›. Que se battait-il pour ? Le cinquième point réaffirme simplement que ‹ Sempai › s'est battu dans un conflit, est devenu un héros, et a été sacrifié. Pour ce qui est du quatrième point… Bien qu'il m'intrigue, il est sans rapport avec le sujet pour l'instant. Voilà qui conclut mon rapport. Y a-t-il des question ? »

Vu que ce n'était pas beaucoup sorti des sentiers battus, je n'ai pas grand chose à demander.

Bien qu'il n'aurait pas été inhabituel pour notre excentrique (comprenez Satoshi) de lever sa main durant une classe, lors d'un petit rassemblement comme celui-ci où tout le monde se connaît, il n'a pas trouvé utile de le faire. À sa place, Ibara s'est empressée de questionner Chitanda :

« Hum, pourquoi cette ligne, ‹ Cela n'avait pas la vocation d'être un conte héroïque. ›, n'a pas du tout été retenue ? »

Satoshi connaissait évidemment la réponse. Bien qu'il souhaitait parler, il s'est retenu et m'a regardé. Il peut être très poli quand la situation le demande, ne voulant pas interrompre Chitanda dans sa réponse.

De l'autre côté, Chitanda étant celle à qui la question a été posé, répondit immédiatement :

« Cette phrase n'était qu'un image mentale, sachant que tout le monde n'a pas forcément la même idée quant à ce qu'est un conte héroïque. »

« De plus, »

Après avoir patienté le temps que Chitanda termine sont explication, Satoshi ajouté juste derrière :

« cela veut probablement dire que ce n'était rien d'aussi romantique qu'un conte héroïque, mais que c'était plus proche d'un combat sans merci. Donc je pense que ce n'était pas seulement une image mentale. »

Ibara était convaincue d'une manière ou d'une autre.

Il n'eut pas d'autres questions.

« Je vais donc maintenant formuler mon hypothèse. »

Chitanda n'avait ni l'air confiante, ni hésitante, elle était comme à son habitude. Elle n'avait pas un seul mémo quand elle commença :

« Mon oncle a été impliqué dans un quelconque conflit, et après cela, il a quitté l'école. Je ne suis pas sûre de cela mais je pense que le conflit en question est la raison pourquoi il a quitté Kamiyama. Il y a un point supplémentaire à considérer en plus des cinq autres dont j'ai déjà fait mention : la phrase d'ouverture ‹ Cela fait un an que ›. »

« Cela veut dire que mon oncle quitta l'école un an avant le Festival Kanya. Autrement dit, pendant le festival de l'année d'avant. Une information supplémentaire, un ami fréquentant le Lycée Commercial de Kamiyama m'a raconté qu'il y avait eu un incident durant leur festival culturel l'an dernier. »

Satoshi ajouta gaiement :

« Le Déchaînement du Festival Culturel, je crois qu'ils l'ont appelé. Des stands avaient été menacé et des marchandises ont disparu. »

Chitanda acquiesça.

« Un dicton raconte qu'aussi longtemps qu'il y aura un système en place, il y aura des entités pour aller contre. Qu'il d'agisse du festival culturel ou sportif, ou de la cérémonie de remise des diplômes, il y aura occasionnellement des gens qui seront contre ces événements annuels. Encore une chose, regardez s'il vous plaît à la page vingt quatre du manuel de l'élève du Lycée Kamiyama. »

Même après qu'elle ait dit cela, aucun d'entre nous n'avais pu sortir son manuel. C'était un fait, quel élève garde-il sur lui un tel objet en permanence.

« … Y a-t-il un problème ? »

« Malheureusement, nous avons laissé nos manuels chez nous. Qu'y avait-il d'écrit à l'intérieur ? »

« … Se pourrait-il que vous ne les gardiez pas avec vous tout le temps ? Oh, ça ne fait rien. Hum, il est dit : ‹ comportements violents strictement proscrits ›. Donc, voici ma théorie. »

Chitanda continua avec toujours le même ton dans sa voix :

« Il pourrait y avoir eu une malheureuse perturbation durant le Festival Kanya de cette année-là, et il se pourrait que mon oncle y ait répondu par la force. Bien qu'il soit devenu un héros, il a dû prendre ses responsabilités vis-à-vis de son recourt à la violence. Le résultat tragique qui en découla fit qu'un éloge fut écrit par ses juniors[5]. »

… Hum…



Satoshi et moi avons réagi simultanément.

« Non, rejeté. »

« Désolé, Chitanda. »

Ibara s'est tournée, nous pas vers Chitanda mais vers nous, se demandant qu'est-ce qu'on pouvait bien être en train de penser.

« Mon hypothèse n'est pas bonne ? Pouvez-vous m'expliquer pourquoi s'il vous plaît ? »

Chitanda parlait doucement et me regardait sérieusement. J'ai haussé mes épaules et répondu :

« Tu as dit qu'il y a des gens qui iraient à l'encontre du système et perturberaient le déroulement du festival. Mais cela requiert que les stands aient quelque chose de suffisamment de valeur pour justifier le larcin. Tu te souviens ce que j'ai dit quand tu as proposer que l'on publie un essai anthologique ? »

Chitanda fit rouler ses yeux lentement.

« Tu as dit que c'était bien trop de travail. »

« Non, pas ça. Autre chose. »

« Autre chose ? Hum… Tu as aussi dit que trois auteurs c'était un peu trop, mais nous en avons quatre. »

… Devrais-je la complimenter sur son incroyable mémoire ? Comme si je le ferais. Chitanda, je reconnais ta capacité à se souvenir de tout cela, mais techniquement, quand j'ai dit cela, nous n'étions encore que trois membres.

« Quoi d'autre ? »

« … Tu as proposé des alternatives à publier quelque chose, comme, »

Elle arrive finalement où je veux en venir. Elle colla ses mains devant sa poitrine et s'est souvenue :

« Mettre en place un stand, et j'ai dit, »

« Tu as dit que les stands de vente sont traditionnellement interdit. Je m'en souviens aussi. Ce qui veut dire qu'il n'y a pas d'activités à but lucratif au Festival Kanya. Tu penses que des gens pourraient trouver quelque chose de valeur à dérober à un événement pareil ? »

Comme si elle n'était pas convaincue, Chitanda pencha sa tête intimement et dit :

« Mais il y a un possibilité. »

« Laquelle ? »

« Même si quelque chose n'a pas de valeur monétaire, il peut tout de même avoir une valeur d'une autre nature. »

Arg.

… Eh bien, elle marque un point. Si elle le dit comme ça, je ne peux rien dire.

Satoshi ria.

« Tu es sans espoir, Hôtarô. Tu ne peux pas convaincre Chitanda-san comme ça. »

« Vraiment ? Et toi alors, quel est ton argument ? »

« Quelque chose qui je sais, au moins, ne sera pas réfuté. »

Satoshi prétendit se racler la gorge et commença :

« ‹ Pour tout système existant, il y a des gens qui iront contre › ; c'est une façon intéressante de voir les choses, Chitanda-san. C'est même probablement exact. Mais les méthodes de résistance dépendent aussi de la mode des époques.
Bien qu'à plusieurs occasions des incidents ont eu lieu durant des festival culturels, et la plupart du temps, les auteurs ont agi avec l'objectif d'un gain matériel en tête. Cela ne veut pas dire que les perturbations ne peuvent pas être causées pour des motifs immatériels. Tu dois garder en tête que c'est arrivé il y a 33 ans, l'hypothèse de l'appât du gain comme motif de perturbation est très improbable. »

La mode des époques ? Comme dans style de résistance ?

Qu'est-ce qu'il essaie de dire ? Je pouvais sentir quelque chose derrière sa tête. Ibara et Chitanda l'ont également senti, elles regardaient perplexe notre ami.

« … Pourquoi ça ? »

Ibara poussa Satoshi à continuer qui se contentait de son importance toute trouvée et ne disait plus rien. Satisfait, il hocha sa tête et dit :

« Cela ne vous frappe probablement pas si je dis 33 ans en arrière. Mais si je dis les années '60 ? »

Satoshi prit un air triomphal. Normalement, je ne m'aviserais pas de gaspiller autant d'énergie à essayer de rivaliser avec lui en termes de connaissances générales, mais c'est juste déprimant de le voir d'aussi bonne humeur quand il fanfaronne avec. Malheureusement, l'histoire n'est pas ma tasse de thé.

« Alors, Mayaka ? Tu as une idée maintenant ? »

Ibara était probablement dans le même bateau que moi. Elle prit une pose résignée et serra ses poings.

« Désolée, Fuku-chan. Rien ne me vient à l'esprit. »

« Vraiment ? Et si je rajoute Bâtiment de la Diète nationale à Tokyo ? … Vous voulez plus d'indices ? Est-ce que affiches et manifestations font-ils sonner une cloche dans votre tête ? … Je parle du mouvement étudiant là. »

« Hein ? »

Nous étions tous désorientés.

Alors que je tentais de découvrir quelle genre de blague il essayait de faire, Satoshi n'avait pas l'air découragé le moins du monde. J'ai glissé une plaisanterie à mon tour :

« Satoshi, pourquoi est-ce que tu t'es tout d'un coup lancé dans un leçon d'histoire japonaise moderne ? Si tu veux jouer aux questions-réponses avec nous, on peut le faire après avoir réglé le problème actuel. »

Mais Satoshi resta sérieux et dit :

« Eh bien, je suis en train d'essayer là. Écoutez, ce genre de violence à l'école dont il est fait mention dans l'hypothèse de Chitanda-san était plutôt banal dans les années '60. C'était une époque où il y avait des montagnes de conflits entre mouvements pro-ceci et mouvements anti-cela, donc quelqu'un peut avoir imité leurs actions et s'être défoulé sous ce prétexte. Ce n'était pas un cas à part. »

« … Dis pas ça comme si t'y avais été. »

« Je te l'ai dit, ça fait un moment que je fais des recherches sur cette période. »

Satoshi me montra son habituel sourire d'invincibilité.

Hum, même sans le petit cours d'histoire de Satoshi, je pense avoir plus ou moins compris. Cela n'avait rien de choquant qu'un incident ait lieu durant le festival culturel, il y a 33 ans. Bien que je n'avais aucun moyen de vérifier la véracité de ce propos sans une sorte de capacité d'investigation (pas que je m'en soucie vraiment), les blagues de Satoshi mises de côté, cette théorie n'est pas inconcevable.

« … Hum, je vois… Il est vrai que je n'ai pas pris en considération l'histoire contemporaine… »

Chitanda semblait bouleversée par les attaques de Satoshi sur ses points faibles. Son hypothèse avait maintenant autant de chances de survie que la flamme d'une bougie face au vent.

Cela dit, Ibara prit la parole avec enthousiasme en soutien à Chitanda :

« Excuse-moi, Chi-chan, »

« … Quel est le problème ? »

« Je suis désolée mais ta théorie ne tiendra probablement plus une fois que j'aurai exposé ce que j'ai trouvé. Je suis la suivante, donc si possible, je vais continuer où tu t'es arrêtée. »

Pour être honnête, j'étais un peu énervé. Pourquoi fallait-il que tu dises quelque chose d'aussi inutile, Ibara ? Mais Chitanda souria gentiment et dit :

« Ne le sois pas, mon hypothèse n'était déjà plus viable après examen. »

Une attitude respectable.

« Quoi qu'il en soit, je dois renoncer à mon hypothèse pour l'instant. Écoutons donc maintenant ce qu'Ibara-san a à nous dire. »

Personne ne s'y opposa. Il avait été sage de commencer par Chitanda. Vu qu'elle a désisté de sa propre théorie, c'est au tour d'Ibara de nous convaincre que la sienne est la bonne. Étant une personne prudente, Ibara parlera sûrement d'une manière simple à comprendre.

« Eh bien, nous t'écoutons, Ibara-san. Si tu veux bien commencer. »



Les fiches qu'Ibara nous a distribuées étaient, comment dire, elles étaient écrite d'une manière totalement différente et facile à comprendre. Les polices et la typographie étaient chic, bien que leurs manque de courbe rendait les mots difficiles à lire. Les lignes suivantes étaient écrites sur le papier format B5 :



En d'autres mots, nous, les masses, pouvons continuer nos activités indépendantes et anti-bureaucratiques sans obstruction. Mais cela n'était en aucun cas une dérive vers la violence.

Malgré le conflit majeur qui a eu lieu en juin dernier, grâce au soutient héroïque du président du club de littérature classique, Jun Sekitani, envers notre pragmatisme audacieux, la vue du pouvoir en place se ridiculisant face à leurs calculs qui s'étaient retournés contre eux est restée fraîche dans nos mémoires.



« Ceci est l'une des vielles anthologies du club d'étude des mangas. Elle s'appelle ‹ Unité et Salutations Tome 1 ›, bien qu'il n'y ait eu en fin de compte que deux tomes de publiés au total. Tout comme le livre de Chi-chan, elle a également été publiée il y a 32 ans. J'ai pensé que si ‹ Hyôka › mentionnait l'incident, je trouverais peut-être quelque chose en cherchant à la bibliothèque. Comme je m'y attendais, peu de club ont survécu plus de 30 ou 40 ans. J'ai d'abord pensé que le club d'étude de mangas n'existait sûrement pas encore à cette époque mais je suis finalement tombée sur ceci… Incroyable, n'est-ce pas ?

Je n'avais aucune idée de si la découverte de cette anthologie était ce qu'elle trouvait incroyable ou alors il s'agissait de l'anthologie elle-même. Unité et Salutations… C'est donc ce genre de titres qu'ils utilisaient à l'époque ? J'étais méfiant à cette idée. Et ce style de prose qu'ils utilisaient à l'époque ! Ça ressemble plutôt à ce que le club de littérature utiliserait.

D'un autre côté, il était clair pourquoi la théorie de Chitanda ne tenait plus. Tout simplement, le festival culturel du Lycée Kamiyama a lieu chaque année au mois d'octobre, et ce passage mentionne que l'incident a eu lieu en juin. On voit ce qu'Ibara sous-entendait.

Ibara sortit un bloc-notes style universitaire de la poche de son uniforme.

« Désolée, je n'ai pas écrit de résumé comme Chi-chan, je vais juste le dire à voix haute. D'abord, ‹ nous, les masses, › a été accusé d'être anti-institutionnel. Une ‹ quéraile ›[6] a eu lieu durant le mois de juin de l'année précédente. Ils ont été assistés par Jun Sekitani, et ont recouru à une quelconque forme de pragmatisme grâce à cela. Ce qui a mis dans l’embarras le ‹ pouvoir en place ›. Le reste du passage peut être intéressant mais ne semble pas avoir un quelconque lien avec l'incident. »

Je n'avais aucune objection quant à ces affirmations mais qu'est-ce que c'est qu'une ‹ quéraile › ? J'ai cherché à travers tout le vocabulaire contenu dans ma tête mais n'ai rien trouvé. Pas que mon vocabulaire soit particulièrement riche.

Pendant que je me demandais ce que ça pouvait vouloir dire, Chitanda prit la parole dans cette réunion :

« En as-tu terminé avec ton rapport ? »

« Oui. »

« Alors… Des questions ? »

J'ai immédiatement demandé :

« Qu'est-ce que ‹ quéraile › veut dire ? »

Satoshi m'a demandé peu après :

« Qu'est-ce que tu veux dire par ‹ quéraile › de toute façon ? »

Pourquoi toi, tu es celui qui devrait le savoir. Il a ensuite pris ma copie de ‹ Unité et Salutations › et a pointé du doigt un mot dessus.

« C'est ça qu'elle veut dire, ‹ conflit ›. »

Alors il savait ce que ça voulait dire. Sans regarder la copie qu'il avait dans les mains, il a continué sans délai :

« Ça devrait se lire ‹ que-relle ›, comme dans ‹ querelle sanglante ›, un conflit âpre. »

Mais Satoshi n'était pas en train de m'apprendre quoi que ce soit. Bien qu'il me regardait, il semblait plutôt durement critiquer ma mauvaise prononciation du mot, et j'ai réalisé qu'il m'utilisait pour critiquer indirectement Ibara. Qu'il le fasse bien ou non, Satoshi savait se montrer délicat. Mais je n'avais aucune intention de l'aider, j'ai persisté :

« Désolé, je sais que j'ai seulement 15 ans de vocabulaire, mais je n'ai jamais vu ce mot où que ce soit. »

« Bien sûr. Normalement, on aurait plutôt utilisé les mots ‹ conflit › ou ‹ dispute ›. Il semblerait que ‹ querelle › était un mot plutôt populaire à l'époque. Il est encore utilisé de nos jours mais principalement par des yakuzas. »

Je vois, maintenant qu'il le dit… Des mots comme ‹ se diriger › pour dire ‹ aller mettre une raclée à quelqu'un ›, leur usage sonne ancien et élégant mais pas vraiment à la fois.

Satoshi racla ensuite sa gorge bruyamment et ajouta :

«… Mais cette anthologie, on croirait avoir une imitation. »

Ibara a réagi d'une voix agacée.

« Qu'est-ce que tu veux dire par ‹ imitation › ?

Satoshi laissa s'échapper un gémissement. Normalement, il était confiant dans ses bluffs, il était donc rare de le voir troublé au point de répondre docilement :

« Non, je ne dis pas que c'est un faux.

Bien sur qu'il n'est pas faux ! Comment dire? Basiquement, l'auteur du passage ne semble pas du tout avoir pris part aux événements mentionnés. On dirait plutôt qu'il était allé voir un événement sportif entre des équipes universitaires et qu'il avait écrit à quel point il avait été impressionné. Ce n'est pas un faux, c'est… »

J'ai demandé :

« Alors, qu'est-ce que c'est ? »

« Ah, non, rien, juste mon imagination. Désolé, Chitanda-san, pouvons-nous continuer ? »

La présidente acquiesça et tout le monde consentit.

« Eh bien, y a-t-il d'autres questions ? »

Il semblerait que non. Ibara avait l'air nerveuse quand elle commença à frénétiquement chercher dans ses notes, pour annoncer son théorie.

« Hum, très bien, voici mon hypothèse. Bien qu'elle rejette la théorie de Chi-chan. Vous allez comprendre en entendant. »

Vu que juin et octobre étaient bien trop éloigné, un silence lui fit part de notre accord.

« L'auteur mentionne que les plans du pouvoir en place se sont retournés contre eux grâce aux pragmatistes. Le résultat fut le départ du président du club de littérature classique comme il l'est mentionné dans ‹ Hyôka ›.

Maintenant quelle action des pragmatiques provoqua son départ ? Je concorde avec Chi-chan sur ce point : la violence. S'il s'agissait d'un événement récent, cela aurait pu être des vitres brisées mais Fuku-chan aurait probablement quelque chose à en dire. Les victimes seraient… le pouvoir en place. Pour ce qui est de l'anti-institutionnel, on entend souvent cela quand on parle d'aller contre le gouvernement, donc quelque chose dans ces eaux. Le reste est simple, le président du club de littérature était à leur tête et affronta les enseignants, et enfin… »

Elle serra ses poings et feignit un coup de poing.

« ‹ Ping ›, leur en colla une. Mais on ne sait pas s'ils ont été agressés sérieusement ou pas, ils ont du faire quelque chose de similaire. Bien sûr, ce n'était pas leurs intentions. Le premier paragraphe que j'ai mis en évidence est important. Basiquement, il souligne leur volonté d'indépendance. Pour une raison ou une autre, il y a 33 ans, leur indépendance était menacée, et pour la protéger, le président du club de littérature n'avait d'autre choix que d'organiser la résistance. »

Ibara termina en fermant son bloc-notes et en regardant dans notre direction.



« Hum… C'est frustrant. »

La présidente, qui devait être en train de digérer ce qu'elle venait d'entendre, pensa à voix haute. J'ai exprimé mon accord de la tête.

« Frustrant ? Qu'est-ce qu'il l'est ? »

Chitanda répondit :

« Ibara-san, ce que tu viens de nous dire tourne autour de comment les enseignants ont menacé la manière de vivre des étudiants, et ont les conduits à avoir recours à la violence pour résister à cette menace, c'est cela ? »

Ibara réfléchit un instant avant de répondre :

« Oui, c'est exact. »

« Néanmoins, comment devrais-je te le dire, bien que j'en comprenne certaines parties, je ne comprends pas l'ensemble. »

Bien que je comprenne en partie ce que tu veuilles dire, dans l'ensemble, je ne comprends pas non plus ce que tu viens juste de dire. Comme je l'ai dit, ce n'était pas totalement incompréhensible. Elle voulait simplement dire que la théorie d'Ibara n'est pas très convaincante. J'ai ajouté au commentaire de Chitanda :

« Ton hypothèse est trop abstraite. D'ailleurs, un peu plus et tu ne fais qu'analyser le passage. »

« T'as raison. C'est un peu ça, mais… »

Même en l'ayant admis, Ibara ne voulait pas se laisser démonter.

« Attendez, vous voulez dire qu'il y a une contradiction ? »

Il semblait qu'elle souhaitait défendre sa théorie un peu plus que Chitanda.

Malheureusement, j'avais remarqué une contradiction.

« Yep. »

J'ai dit cela en me redressant. Ça n'avait rien à voir avec l'ambiance un peu tendue vu que l'on devait se contredire les uns les autres. Mes jambes commençaient à s'engourdir, c'est tout.

« Pour faire simple, tu as rejeté la théorie de Chitanda en disant que l'incident avait en lieu en juin et non pas pendant le festival culturel, en octobre. Toutefois, si l'on vient à croire ‹ Hyôka › et ‹ Unité et Salutations ›, bien que l'incident ait eu lieu en juin, le départ aurait eu lieu en octobre. Mais la théorie de Chitanda ne fait aucune mention de cela. Mais ne trouves-tu pas étrange que l'on ait attendu quatre mois pour exclure quelqu'un ayant eu des comportements violents ? »

Si le cas avait été laissé en attente pendant ce temps, ce serait une autre histoire, j'ai ajouté dans ma tête.

« Mais, c'est, »

Ibara semblait avoir compris mais retorqua.

« Il se pourrait que ‹ Hyôka › soit inexact. ‹ Unité et Salutations › mentionne clairement le mois de juin alors que ‹ Hyôka › se contente de mentionner ‹ Cela fait un an que… ›. L'incident peut avoir eu lieu en juin, suivi du départ durant le même mois, et le festival en octobre. Ce n'est pas trop irraisonnable comme possibilité ? »

Une marge de quatre mois, hein ? Ça sonne bien comme un des arguments tirés par le cheveux d'Ibara.

Pendant que j'hésitais, Chitanda et Satoshi ont présenté leurs jugements respectifs.

« Je pense que l'on ne peut pas ignorer un intervalle aussi long. »

« Moi aussi. Le festival culturel était mentionné juste avant la phrase ‹ cela fait un an que › après tout. Donc je pense que son départ a bien eu lieu durant le mois d'octobre. »

J'ai acquiescé silencieusement, les deux autres ont exprimé leur accord.

Trois contre un. Ibara avait l'air contrariée.

« Ugh—, vous faites trop attention aux détails. »

Bien que cette réaction mignonne ne collait pas tellement au personnage, elle aida à alléger un peu l'atmosphère. Satoshi essaya d'aider à faire passer la pilule en disant dans un ton bon enfant :

« Mais je pense que ton approche au moins était bonne. »

Chitanda fit disparaître son regard sérieux et approuva d'un sourire.

« En effet. Les critiques n'ont pas à être trop catégoriques. »

Je pense aussi. Comment dire, c'était comme de suivre une carte au milieu d'un labyrinthe dans le brouillard et se frustrer si quelque chose ne se passe pas comme prévu. Si ‹ Hyôka › et ‹ Unité et Salutations › étaient notre seule documentation, la théorie d'Ibara ne serait pas si limitée. Il ne restait maintenant plus que les données de Satoshi et moi pour en terminer. Et si une quelconque contradiction fatale était découverte, je n'aurais plus qu'à trouver une solution avant mon tour.

Maintenant que j'y pense, de quoi parlaient mes notes déjà ? Tout ce que je savais c'était que nous devions préparer matière à parler, mais je n'ai pas vraiment fait le tour du contenu des miennes.

« J'imagine que mon tour est terminé ? »

Chitanda acquissa à la question d'Ibara.

Suivant le sens des aiguilles d'une montre, le suivant devrait être Satoshi. Sur la demande de Chitanda, il commença a distribuer ses notes. Il s'est soudainement arrêté avant de joyeusement dire :

« Ah, c'est vrai. J'ai oublié de dire que certaines de mes notes contredisent l'hypothèse de Mayaka. »



Les fiches que nous avons reçues étaient des copies du ‹ Mensuel de Kamiyama ›. Ça me rappelle que Tôgaito nous avait dit qu'il approchait leur 400ème publication. S'ils en publient une dizaine par année en moyenne, cela veut dire que le journal existe depuis bien 40 ans. J'aurais dû réaliser qu'ils devaient forcément avoir une édition d'il y a 33 ans… L'un des articles était entouré d'un cercle au stylo.

Seule une petite partie de la copie avait un lien avec notre sujet mais elle était clairement suffisante pour réfuter la théorie d'Ibara. Telle était la base de la confiance qu'avait Satoshi quand il dit cela. Il essayait peut-être de maintenir une certaine uniformité dans le déroulement de la discussion… Jetant un rapide coup d’œil à Ibara, elle avait une expression assez peu claire au visage. Ce n'était ni du bonheur, ni du mécontentement. C'était à prévoir avec Satoshi qui commençait son explication en commentant sa théorie et non pas celle de Chitanda. Mais Satoshi ne faisait qu'imiter Ibara et la façon qu'elle a eu de réfuter l'hypothèse précédente. Naturellement, c'était une facette habituelle de son humour.



 ▼ En conséquence aux perturbations dans le bloc spécialisé, la semaine dernière, qui a sali l'honneur et la fierté des clubs artistiques du Lycée Kamiyama, deux des responsables ont été suspendu et cinq autres ont reçu un sérieux avertissement. ▼ Bien sûr, l'honneur existe également chez les voleurs. Le club d'étude de la cinématographie a affirmé qu'ils allaient pas rester muets à cette punition sévère. Le club de photographie a quant à lui fermement déclaré être à 100 % innocent. Notre rédaction n'ira pas jusqu'à confirmer la véracité de ce propos. Reste le problème du fait que ce conflit ait été résolu avec les mains. Ignorant les efforts faits pour le résoudre par le dialogue, certaines personnes aux pensées extrémistes ont décidé de choisir la voie facile mais pathétique de la violence. ▼ Nous encourageons fortement les membres de troisième année du club d'étude de la cinématographie à se repentir de leur agression insensée contre Yukiko Sachimura-san (club de théâtre moderne, classe 1-D), qui était la médiatrice durant la négociations. À l'heure où nous publions ceci, Sachimura-san est actuellement hospitalisée.▼ Les mouvements légendaires d'il y a deux ans n'auraient jamais eu recours à une telle violence. Même si les événements récents nous rendent tous furieux, nous ne devons pas les laisser faire voler en éclat notre solidarité, notre mouvement de désobéissance civile doit persévérer. ▼ Uniquement à ce moment-là nous pourrons vivre conscients d'être à la hauteur de nos traditions et notre honneur.



Satoshi commença à expliquer calmement :

« Mes trouvailles nous viennent d'une ancienne édition du ‹ Mensuel de Kamiyama ›. Je suis tombé sur ce document qui hibernait dans les archives de la bibliothèque. J'ai donc décidé de le lire pour tuer un peu le temps après les cours. Néanmoins, il ne fait aucune mention directe de l'incident d'il y a 33 ans, et ceci est tous ce que l'on peut en tirer. Pour être honnête, je pense que nous tournerons en rond avec ce papier. C'est une ancienne édition mais elle est à moitié illisible dû aux mauvaises conditions de conservations et il y a toutes sortes de notes écrites dessus au stylo-feutre. Mais on y peut rien donc voici les points principaux : »



◯ L'incident n'a pas été résolu par la violence.
◯ L'incident a concerné et affecté toute l'école.
◯ Durant cet incident, ‹ nous › se sont unis.
◯ De la désobéissance civile a été observée tout au long de l'incident.



« Les premier et dernier points peuvent sembler contradictoire mais ils sont lié à la même chose. Puisque l'incident n'a pas été résolu par la violence, c'est ici que la théorie de Mayaka a besoin d'être revue. Les deux points du milieu sont veulent pratiquement dire la même chose. Même s'il n'est pas sûr que ce ‹ nous › soit bien toute l'école, je pense que l'on dire sans problème que cela n'a pas grande importance. »

Vraiment… ?

Je n'étais pas vraiment satisfait de cette explication. Comme s'il l'avait senti, Satoshi ajouta :

« Je veux dire, si ‹ nous › veut dire toute l'école, alors tout le corps étudiant est impliqué. Sinon, cela veut tout de même dire que ‹ nous › a décidé de soutenir quiconque cela concerne. J'ai pas raison ?

Je vois.

« Voilà qui conclue mon rapport. Des questions ? »

Un silence s'en suivi. Chitanda demanda encore une fois pour être sûre :

« … Y a-t-il des questions ? »

Ah ouais. J'ai pensé à quelque chose et ai donc levé ma main.

« Satoshi, ce ‹ mouvement légendaire › mentionné ici, est-ce qu'il est totalement différent de l'incident qu'on est en train d'investiguer ? C'est pas clair en ayant que ce document. »

Je demandé cela dans le but de confirmer quelque chose. Comme prévu, Satoshi hocha sa tête.

« Je ne sais pas. Il n'y a aucune preuve qu'il s'agisse bien de l'incident que l'on cherche. »

« Tu ne sais pas, tu dis… »

Bien qu'il avait dit cela calmement, sa réponse était plutôt téméraire. Bien que ses connaissances étaient riches et profondes, il peut être plutôt indifférent à comment s'en servir…

« Alors tes informations sont pratiquement inutiles. »

« En effet, c'est aussi ce que j'ai pensé. »

« Comment ça, c'est aussi ce que tu as pensé ?! »

Ibara interrompit :

« Il n'y a aucune preuve pour pilier après tout. »

« Vraiment ? »

« Un tollé conséquent a été causé par l'incident que l'on cherche, pas vrai ? Nous savons cela grâce aux anthologies de deux clubs. Cet incident et le ‹ mouvement légendaire › sont deux événements différents puisque même s'ils sont similaire, l'un d'entre eux est clairement décrit comme ‹ légendaire › ici, n'est-ce pas ? »

Satoshi tapa ses mains ensemble.

« Ah, c'est vrai. Donc c'est pour ça. T'es incroyable Mayaka. »

Non, je doute que tu aies ne serait-ce qu'essayé d'y réfléchir. Je vois, ce que dit Ibara est bien vrai. Quand on réfléchit logiquement, si on ne peut pas confirmer que deux objets sont les mêmes, alors on présume qu'ils sont différents. De plus, je ne gaspillerais pas mon énergie dans le seul but de trouver des preuves. J'ai fait signe de la main que j'acceptais cette explication.

Il n'y avait pas d'autres questions.

« Alors, écoutons ton hypothèse. »

Mais Satoshi révéla un sourire amer en entendant cette requête.

« Hum, un hypothèse, hein ? »

« Y a-t-il un problème ? »

« Chitanda-san, je ne souhaite en aucun cas perturber le déroulement de la réunion, mais je ne crois pas être en mesure d'établir une quelconque théorie. Bien que j'aie dit que ne ferions chacun nos recherches, tout ce que j'ai trouvé c'est ce document… Le mieux que je pouvais faire c'était amender la théorie de Mayaka. Après tout, »

Je savais que Satoshi allait nous sortir une de ses devises : On ne peut tirer aucune…

« On ne peut tirer aucune conclusion à partir seulement de bases de données. »



En fin de compte, Satoshi n'avait aucune hypothèse. On n'y peut rien j'imagine. Ce n'est pas comme si j'attendais grand chose de sa part au début.

À présent, le problème reposait sur moi. Mince, maintenant je regrette de ne pas avoir lu mes documents. J'avais déjà une théorie en tête cependant, j'ai donc ignoré mon mal-être et ai pris en main la réunion.

« Eh bien alors, Oreki-san, tu peux commencer. »

J'ai acquiescé et distribué les copies en jetant un œil à ma propre copie en même temps. Tout comme Satoshi, le contenu ne relatait pas en majorité à l'incident. C'était juste une liste de faits ennuyeux ; les informations que j'avais cherché.



1967


Événements au Japon et dans le monde.

  • Le produit national brut du Japon dépasse les 45 billions de yen et le pays devient la troisième économie du monde capitaliste. La prise de la deuxième position à l'Allemagne de l'Ouest est attendue pour 1968
  • La foudre frappe un groupe d'étudiants du Lycée Fukashi à Matsumoto, préfecture de Nagano, alors qu'ils faisaient une randonnée au Mont Nishiho[7], faisant 11 morts.
  • L’activisme étudiant à l'Université Waseda s'intensifie avec des étudiants participants des rassemblements massifs.

Événements aux Lycée Kamiyama.

◯ Avril : Dans un discours du directeur Takasu Eida : ‹ Nous ne devons pas nous autoriser à être complaisants et laisser notre école stagner. La culture du talent devrait être la priorité absolue du système éducatif. L'enseignement secondaire se devrait de préparer ces talents à l'enseignement supérieur. › Allusion à un changement de la direction de l'école.
◯ 13 juin : ‹ Comité d'examen du festival culturel › tenu après les cours.
◯ Juillet : ((voyage d'étude)) en Amérique (Organisé par Manninbashi-sensei)
◻ 13 au 17 octobre : festival culturel.
◻ 31 octobre : festival sportif.
◻ 15 au 18 novembre : voyage d'étude des deuxièmes années – Takamatsu, Miyajima et Akiyoshidai.
◯ 2 décembre : À la lumière des récents accidents de la circulation consécutifs, les étudiants doivent se déplacer en groupe afin d'assurer leur sécurité mutuelle.
◯ 12 janvier : Le cagibi des équipements de sport a été partiellement endommagé par les fortes chutes de neigee.
◻ 23 au 24 janvier : Sorties à ski des premières années.



« Hôtarô, c'est… »

J'ai répondu, aigre :

Ouais, ça vient de ‹ Lycée Kamiyama : 50 ans de marche commune ›. C'est comme vous l'avez vu… »

Ayant vu comment les trois autres avaient présenté leur matériel, si je voulais les imiter, il me fallait résumer le contenu.

……

… Mais il n'y a pas vraiment matière à résumer.

Ce n'est pas comme si j'avais amené ce matériel avec de grandes idées derrière la tête. En le regardant d'un autre œil, il n'avait même pas grande signification en soi.

Les instants suivants se sont écoulé avec moi cherchant quoi faire ensuite. Vu qu'il ne s'agissait que de la demande d'une étudiante, et une tâche de club, je n'allais pas me crisper. C'était plus mon style de dire ‹ Désolé les gens, je n'arrive à rien. › et laisser Chitanda et Ibara prendre les choses en mains.

Mais même cette option était un peu trop grise pour moi.



« Excusez-moi. Avant de continuer, je dois aller à la salle de bain. »

Chitanda n'a pas pu s'empêcher de glousser.

« Oui, bien sûr. »

« T'es nerveux ? »

Dit Satoshi comme s'il cherchait à me calmer, mais je n'avais pas l'intention de lui laisser ce plaisir. Chitanda se leva et me montra le chemin. En la suivant, j'ai glissé nonchalamment ma copie dans ma poche.

J'ai commencé à réfléchir en arrivant à la large salle de bain.

Quatre copies de papier. Quatre pièces de documentation.

Et après, le débat qui s'en suivra.

Quelle est la réponse qui les lie tous ? Que s'est-il passé il y a 33 ans ?

Je me plongeais dans mes réflexions…

Et suis finalement arrivé à une conclusion.



« Désolé les gens, comme je n'ai pas suivi la même démarche que vous, je n'ai pas cherché d'hypothèse. Donc est-ce que je peux juste sauter à la conclusion comme je suis le dernier à parler ? »

En entendant ma suggestion, Satoshi sourit malicieusement.

« Hôtarô, t'as quelque chose en tête ? »

« Arrête de lire dans ma tête… De toute façon, je vais expliquer brièvement. »

« Je, »

Chitanda prit une inspiration avant de continuer.

« Brièvement, ce n'est pas assez suffisant. S'il y a quelqu'un qui peut arriver à une hypothèse sans aucune contradiction, c'est toi, Oreki-san, »

……

Eh… Eh bien, je ne sais pas pour cela.

« Laisse-nous écouter ta théorie, Oreki-san. »

« Oui, allez. Dis-nous tout de suite. »

« Après tout ce qu'on a discuté, je suis assez impatient aussi. »

Ils n'en font tous qu'à leur tête… Même si je ne suis pas vraiment sous pression, c'est assez difficile de parler quand ils me fixent tous comme ça. Bon alors, par où est-ce que je commence ? J'ai réfléchi un instant et dit :

« Très bien, on va y aller par la bonne vieille méthode des six questions. Quand, où, qui, pourquoi, quoi, comment… Je n'en ai pas oublié, n'est-ce pas ?

Chitanda acquiesça.

« Bien. Tout d'abord, ‹ quand ›. Nous savons que c'est arrivé il y a 33 ans, mais nous ne savons pas si c'est arrivé en juin ou en octobre. Si ‹ Unité et Salutations › est exact, alors ce serait juin, mais selon la description dans ‹ Hyôka ›, on croirait plus à octobre. Néanmoins, vu que les deux sources sont assez sûres, je dirais que l'incident a eu lieu en juin et le départ de ‹ Sempai › en octobre. »

L'air mécontent, le sourcils d'Ibara se dressèrent car j'avais il n'y a pas si longtemps mis en évidence les contradictions dans sa théorie. Je l'ai ignorée et ai continué.

« Ensuite, ‹ où ›. Cette fois-ci, la réponse est claire : au Lycée Kamiyama. ‹ Qui ›. D'après ‹ Unité et Salutations ›, nous savons que le personnage principal est Jun Sekitani, le président du club de littérature classique de l'époque. Permettez-moi de développer un peu ici : le personnage principal est en fait l'entier du corps étudiant, Sekitani n'étant qu'un des nombreux protagonistes. »

Bien que j'étais assez certain de n'avoir commis aucune erreur jusque là, je jetais occasionnellement un coup d’œil à mes notes en parlant. Tout vas bien jusqu'ici. On passe au choses sérieuses maintenant.

« ‹ Pourquoi ›. Si l'entier du corps étudiant était uni, alors leur adversaire devrait naturellement être le corps enseignant. Pour citer Ibara, ‹ leur indépendance était menacée ›.

Et la cause de l'incident est le festival culturel lui-même. »

En présentant ma conclusion, je pouvais tous les sentir me dévisager avec de regards interrogatifs. Je me suis senti comme si je pouvais avoir une arrêt cardiaque à tout moment.

« … C'était mentionné quelque part ? »

« Bien qu'il soit mentionné que l'exclusion a eu lieu pendant le festival culturel, rien ne nous dit qu'elle ait un quelconque rapport avec le festival lui-même. »

J'ai hoché ma tête.

« Non, ça a tout à voir avec le festival. Ma conclusion vient d'une conversation qu'ont eu les étudiants avec les enseignants et la direction, qui amena le festival culturel à avoir lieu en octobre comme d'habitude. »

Le regard de Satoshi s'orienta vers ‹ Lycée Kamiyama : 50 ans de marche commune › et commenta :

« Tu parles de ce ‹ comité d'examen du festival culturel ›, n'est-ce pas ? Mais pourquoi tu crois que c'est la cause de l'incident ? Mais même sans ce truc, le festival culturel aurait quand même eu lieu comme chaque année, non ? »

« Non, tu fais erreur. Vu que j'ai pris le temps de copier du contenu de ce document, regarde plus attentivement. »

Pas seulement Satoshi mais Chitanda et Ibara ont aussi jeté un œil, puis :

« Chaque événement est marqué d'un carré ou d'un cercle ! »

«… Je comprends ! Les carrés indiquent des événements réguliers alors que les cercles des événements qui n'ont eu lieu que cette année-là ! »

« C'est presque ça. Tu trouverais probablement ce genre d'événements qui ne collent pas avec les événements habituel dans l'historique d'autres années. »

Je suis ensuite passé de mon document à ‹ Hyôka › et continuai :

« Pourquoi y avait-il ce comité d'examen il y a 33 ans ? Pour répondre aux exigences des étudiants concernant le festival culturel. Quelle demande pouvait avoir provoqué la mise en place d'un tel comité ? Un indice se trouve dans ‹ Hyôka ›. »

J'ai pris un style à bille et souligné quelques mots.

« Ici, ‹ Durant cette année, Sempai s'est inscrit dans la légende et est devenu un héros. Résultat, le Festival Culturel de cinq jours va débuter comme à son habitude ›, vous ne trouvez pas un détail étrange dans cette ligne ? »

Vu que personne de dit quoi que ce soit, j'ai continué :

« Nous savions que le festival culturel aurait lieu comme d'habitude. Alors pourquoi l'auteur aurait-il ajouté un détail aussi inutile ? Notre attention ne devrait pas se diriger vers ‹ comme à son habitude › mais vers ‹ cinq jours ›. »

«… De quoi tu parles ? Je ne comprends pas. Je ne vois pas où tu veux en venir, Oreki. Ils ont quoi ces mots ? »

« Je dis que la prouesse du héros est d'avoir fait que le festival culturel aurait lieu pendant cinq jours. Retournons un instant sur le document ‹ Lycée Kamiyama : 50 ans de marche commune › et observez le discours du directeur en avril. Si on le prend littéralement, c'est juste un message d'encouragement pour que les élève se concentrent sur leurs activités académiques. Néanmoins, j'aimerais que vous lisiez entre les lignes.

Le festival culturel de notre école est tenu durant la semaine, pendant cinq jours entiers. C'est particulièrement long quand on compare au festival d'autres écoles. C'est pourquoi le festival est devenu le symbole de nos activités de club. Et si le directeur insinuait que les étudiants devraient se concentrer plus sur leurs études que leurs clubs… Cela amènerait le festival à être raccourci. Mais les étudiants iraient évidemment contre. Voilà pourquoi ils étaient ‹ furieux ›. Voilà la cause de l'incident — le ‹ pourquoi ›.

J'ai soupiré et remarqué que je commençais à avoir la gorge sèche. Je voulais une tasse de café d'orge… Mais je vais d'abord en finir avec ça, je ferai avec ma salive pour l'instant.

« Maintenant, ‹ comment ›. ‹ Grâce au soutient héroïque du président du club de littérature classique ›, les étudiants ont pu faire mener à bien leur ‹ pragmatisme audacieux ›. Finalement, ‹ quoi ›. En colère face à la décision de la direction, les étudiants ont mis en place un politique de ‹ désobéissance civile › tout en s'abstenant de tout comportement violent. Résultat, le comité a été mis en place et les cinq jours de festival ont été conservés. Au sens strict, ce résultat a été atteint sans qu'aucun recours à la violence n'ai eu lieu. On ne peut pas dire cela pour le contexte large par contre. Je ne suis pas entièrement sûr mais des protestations non-violentes massives doivent avoir impliqué des choses comme… grèves de la faim, manifestations et absence des élèves aux cours. Je suis certain que Satoshi est plus au courant à ce sujet. Au final, l'école a cédé aux pressions des élèves et a accepté de ne pas raccourcir le festival. Mais le prix a payé fut le départ du ‹ héros › Jun Sekitani.

J'ajoutai encore une chose.

« Pour ce qui est de l'écart entre l'incident et son départ, je dirais que vu qu'il était un pilier du mouvement en juin, s'ils l'avaient exclu immédiatement, le tollé se serait probablement intensifié. Son exclusion a donc été retardée jusqu'après le festival culturel, quand tout le monde serait finalement calmé.

Je pris une brève respiration après avoir fini de parler.

« Fiou. »

Je sentais la chaleur de l'été recommencer à s'emparer de moi.

Voilà qui terminait à peu près mon explication.

Quelqu'un tapa dans ses mains, indifféremment. C'était Satoshi.

« Waou, c'était vraiment stupéfiant, Hôtarô. Je comprends maintenant. »

Ibara commença silencieusement à récupérer ses notes. Elle avait l'air mécontente, mais c'était bien son attitude habituelle.

Pour ce qui est de Chitanda.

Comme un enfant tout excité après être sorti du cirque, notre demoiselle ouvrit sa bouche et dit :

« C'était magnifique, Oreki-san. Tu es arrivé à une telle conclusion avec uniquement le matériel que nous avions ici… J'ai eu raison de demander ton aide ! »

Même moi j'apprécie de me faire complimenter. Et je me sentais un peu embarrassé.

On dirait bien que le problème de Chitanda est résolu et nous avons de quoi écrire notre anthologie maintenant. Après avoir discuté avec Chitanda fin avril, toute cette histoire est enfin terminée.

Dans son rôle de présidente, Chitanda continua et demanda :

« Y a-t-il un quelconque autre question ? »

Comme rien ne vint en réponse, Chitanda hocha grandement sa tête et conclut :

Alors notre essai anthologique aura pour base les conclusions d'Oreki-san. Nous discuterons des détails durant une autre occasion. Nous en avons donc terminé pour l'instant… Merci à tous pour votre travail. »

Nous nous sommes tous salués.



Chitanda me guida vers l'entrée alors que j'allais partir. Son sourire me disait tout de sa satisfaction quant au déroulement de la réunion.

« Je suis profondément reconnaissante. »

Elle dit cela et s'inclina infiniment.

« Je n'étais pas seul, »

Je dis en mettant mes chaussures. Satoshi, qui était sorti avant moi, me faisait signe de me dépêcher. Comme je n'étais familier avec le trajet, je n'avais de choix que de le laisser me guider.

« Nous nous reverrons à l'école, »

« Ouais, au revoir. »

J'ai fait signe d'à la revoyure à la résidence Chitanda.



J'étais déjà parti, naturellement, je n'avais aucune idée de ce que comptais faire Chitanda après cela.

Alors que je m'éloignais, elle se tenait à l'entrée avec l'expression de quelqu'un venant juste de réaliser quelque chose, je ne savais donc pas ce qu'elle avait bien pu se murmurer à elle même.

Elle dit probablement quelque chose comme, « Mais… pourquoi ai-je pleuré ce jour-là ?



Notes du traducteur et références[edit]

  1. Mamachari (ママチャリ), de ‹ mama › (mère) et ‹ chari › (vélo - jargon). Terme japonais utilisé pour désigner les vélos avec un grand panier à l'avant dans lesquels des mères mettent leurs bébés. - Source (en anglais)
  2. Probablement une référence à une citation du révolutionnaire chinois Sun Yat-sen.
  3. Uchimizu
  4. Tokonoma
  5. Kôhai dans la version originale.
  6. Ici et dans les paragraphes suivant, il est question d'un mot peu utilisé de nos jours (en japonais évidemment), mal prononcé par Ibara et provoquant un quiproquo sur sa signification. Je tenterai de retranscrire l'erreur au mieux en français plus tard.
  7. Le Mont Nishiho fait partie des Monts Hida dans la préfecture de Nagano.