Iris on Rainy Days (FR) : Désassemblage - Jour du Désassemblage

From Baka-Tsuki
Jump to navigation Jump to search

Jour du désassemblage[edit]

J'entends un cliquetis assourdissant — clank, clank.

Le tapis roulant tourne à rythme régulier.

Complètement nue, je suis faiblement allongée par terre.

Je me trouve dans une usine spéciale de manutention des machines à la périphérie d'Ovale — plus généralement connue sous le nom d'usine de traitement des robots. Au moment même où il avait été décidé que j'étais un tas de ferraille, j'avais été mise dans un camion et envoyée ici. C'est la même chose pour les autres robots, mais nous ressemblons plus à des condamnés qu'on emmène en salle d'exécution, étant donné que personne ne parle.

Tout en me balançant à l'arrière du camion, je réfléchis d'un air ahuri à la raison pour laquelle personne ne veut de moi. Est-ce parce que mes envies suicidaires ont été découvertes lors de l'examen de mes circuits mentaux ? Ou est-ce parce que j'ai l'apparence de la sœur du Professeur, et donc j'ai peu de chance d'être vendable ? Ou alors est-ce parce que le prix d'un nouveau modèle de robot est trop élevé, et les a donc dissuadés de m'acheter ?

Je l'ignore.

Mais au moins, une chose est sûre.

Je vais bientôt être désassemblée.

Pourquoi est-ce que je suis assise là ? Où sont passés les doux et chaleureux bons moments en compagnie du Professeur ? Le fait que je vais bientôt être démontée ressemble à un mauvais rêve.

Je ne peux m'enfuir. Du fait de mon système de sécurité, mon circuit mental est complètement soumis. En plus de ça, je suis bientôt à court de batterie.

J'attends l'inéluctable qui s'approche à grands pas de moi. Le tapis roulant qui continue inlassablement d'avancer. L'étage de désassemblage qui ouvre grand sa bouche tel un monstre s'approche petit à petit de moi.

L'étui à cigarette accroché à mon cou émet de légers bruits métalliques, tout en se balançant violemment contre ma poitrine comme une créature vivante.

Une fois avoir atteint le déplaisant étage maussade, le bras de la machine de désassemblage m'attrape par le bras droit. Comme un criminel arrêté par la police, mes coudes se tordent dans mon dos avec des bruits de craquements. L'alarme continue de sonner dans ma tête, alors je décide d'éteindre le programme. Il ne m'est plus d'aucune utilité, de toute façon.

Il y a des centaines de tiges protubérantes sur le bras de la machine, et celles-ci se mettent à se tortiller comme des tentacules. Des tiges jaillissent une substance blanchâtre et collante qui recouvre mon bras droit. Ce liquide semble être un agent anti-incendiaire utilisé à des fins de prévention. Le chaud et pétillant liquide ressemble d'une certaine façon à de l'eau savonneuse.

Mon bras droit est recouvert de bulles blanches, puis le bras de désassemblage projette un rayon laser, et se met à sectionner mon bras. L'extrême douleur qui en résulte me fait hurler, alors je tente instinctivement de désactiver mes fonctions sensorielles. Sinon, je vais sûrement devenir folle.

Peu après, le bruit du déchirement de muscles artificiels commence à résonner dans la salle. Le tube qui permet de réapprovisionner mon corps en huile a été coupé. Un bruit de désintégration retentit à chaque fois que de l'huile éclabousse le laser, ce qui émet de la fumée accompagnée d'une odeur nauséabonde.

Trente-deux secondes après le début du processus, mon bras droit a été entièrement coupé.

Après avoir perdu mon bras droit, ça va être au tour du gauche.

Le bras de la machine de désassemblage tord mon bras gauche. Les centaines de tiges protubérantes se remettent à cracher leur substance blanchâtre telle une chenille en train de se changer en papillon, qui recouvre alors mon bras gauche. De la fumée s'élève, puis le laser dessine un arc sur mon bras, le sectionnant ainsi.

Puis, mon bras gauche se détache complètement de mon corps. Le processus dans son ensemble aura pris trente-quatre secondes.

Après mes bras, c'est au tour de ma jambe droite.

La pièce à sectionner est fixée après un bruit de cassure et avoir été recouverte par les bulles, puis le laser bleu jaillit de nouveau, et de la fumée à l'odeur insupportable se dégage.

Comme ma jambe est plus épaisse que mes bras, cette étape prend plus de temps. Une minute et onze secondes au total.

À ce moment-là, je remarque que ma jambe droite qui vient d'être coupée a une étiquette collée dessus. Cette pièce n'appartient plus à mon corps, et va devenir une « marchandise » qui sera vendu sur le marché de l'occasion.

Mon ex-jambe droite roule jusqu'à une corbeille à côté du tapis roulant. Des dizaines de « jambes » d'autres robots y sont empilées tels les trophées d'un tueur en série. Certaines bougent encore, ce qui est extrêmement écœurant. La machine de désassemblage s'attèle ensuite à couper ma jambe gauche après en avoir terminé avec la droite.

Je ne peux que fixer le regard vide le laser bleu. Je ne peux concentrer mon regard sur rien, alors que ma vision devient floue.

J'espère que ça sera bientôt terminé. Même une seconde de moins serait déjà une bénédiction.

Puis, je me mets à fuir la réalité, en repensant au Professeur.

Nous avions l'intention d'aller au parc d'attraction la semaine prochaine. Nous avions prévu d'aller voir un autre film la semaine encore après. Puis aller faire du shopping le mois d'après. Et ensuite-

À ce moment-là, le laser passe devant mes yeux. Une question me vient soudainement à l'esprit. Est-ce que c'est le même genre de laser que celui utilisé dans les pistolets laser qui servent à abattre les robots ?

Oh, d'ailleurs, en parlant de pistolet laser — j'ai une autre question.

Qu'est-il advenu du robot qui a tout saccagé sur la place de la fontaine ?

Au moment où je reprends mes esprits, ma jambe gauche a déjà disparu. J'ignore combien de temps cela a pris.

Je suis allongée sur le tapis roulant, amputée de mes bras et jambes.

Ensuite, l'étape suivante va être le découpage de ma tête.

Deux bras se saisissent de ma tête. Des bras mécaniques durs et froids. Ils n'ont rien à voir avec les bras doux et élégants du Professeur.

Un des deux bras place un scalpel bleu sur mon cou. La chaude lame se rapproche petit à petit.

Je me remets à fuir la réalité.

Bien entendu dans mes souvenirs du Professeur.

Elle avait dit qu'elle avait quelque chose d'important à me dire ce jour-là

C'était ma dernière conversation avec elle.

C'est vrai, le Professeur-

Qu'est-ce qu'elle a dit déjà... Ah oui, un cadeau ?

Professeur.

De quel cadeau vouliez-vous parler ?

Un bruit de déchirement résonne, puis ma tête est séparée de mon corps.

Plusieurs tubes qui sont comme des vaisseaux sanguins pour un robot pendent de la partie sectionnée de ma tête. Je regarde mon corps par ceux-ci. Ma poitrine et mon ventre se tortillent dans tous les sens tel un organisme extraterrestre.

Le plus étrange dans tout ça, c'est que je ne ressens pas la moindre peur.

Contrairement au moment où mon bras a été sectionné, mon cœur est désormais très calme. Ensuite, je vais calmement accepter mon sort. Mais ce n'est pas un soudain revirement, qui serait dû à ce que j'ai vécu, ni même une illumination, mais tout simplement parce que mon cœur est en train de se décomposer.

Finalement, la main du désassembleur s'approche de ma tête, la seule partie restante.

Ensuite, elle va commencer à découper ma tête.

Tout d'abord, mon cuir chevelu est arraché en même temps que ces cheveux bordeaux dont j'étais si fière. Puis, l'outil métallique en forme de balle s'enfonce dans mon orbite, et mon œil est aspiré en émettant un « pop ». Le regard de mon œil droit arraché croise celui de mon œil gauche. Mais ce dernier est immédiatement arraché à son tour.

La lumière disparaît de mon monde.

Puis, un objet en forme de bâton est placé dans mes oreilles. Je n'ai aucun moyen d'identifier l'objet en question comme je ne peux plus voir. Ce qui ressemble à un laser dessine deux cercles sur mon visage, puis mes oreilles et mon système auditif sont sectionnés à leur tour.

Le son disparaît de mon monde.

La machine commence alors à retirer ma peau, et je suis petit à petit pelée comme un fruit. Ensuite, sont arrachées mes dents, puis ma langue, et mon nez-

Ne plus rien voir. Ne plus rien entendre. Ne plus rien respirer. Ne plus rien sentir.

Malgré tout, je continue de penser au Professeur jusqu'au dernier instant.

Professeur.

Où êtes-vous maintenant, Professeur ?

Êtes-vous au paradis ? Est-ce que c'est confortable là-haut ? Est-ce que vous mangez bien ? N'oubliez pas de ne pas fumer dans votre lit.

Professeur.

Où vais-je aller ensuite ?

Existe-t-il un paradis pour les robots aussi ? À quoi est-ce qu'il ressemble ? Est-ce qu'une cuisine y serait utile ? Est-ce que le vendeur est gentil ?

Professeur.

Pourquoi êtes-vous morte ?

Est-ce parce que je n'ai pas été sage ? Est-ce parce que je n'ai pas regardé le film en entier ? Ou est-ce parce que je n'ai pas écrit ce compte-rendu sérieusement ?

Professeur. J'ai tellement envie de vous voir. Terriblement envie.

Ai-je encore le temps de vous voir ? Me permettra-t-on d'entrer dans le paradis des hommes sachant que je suis un robot ?

Professeur.

Ahhh, Professeur.

Est-ce que le paradis des hommes se trouve à côté de celui des robots-


Désassemblage : J-1 Page Principale Renaissance : Jour 1