Kino no Tabi Tome 1 : Chapitre 1

From Baka-Tsuki
Jump to navigation Jump to search
Le Pays Des Adultes


KNT V01 TOC C05.jpg

Quand j'avais rencontré la personne qui s'appelait Kino, j'avais onze ans et j'habitais encore dans le village où j'étais née. Je ne me rappelle honnêtement pas de mon prénom à l'époque. Je me rappelle que c'était le nom d'une fleur, et si l'on changeait un petit peu le son, cela devenait une terrible insulte. Les autres enfants se moquaient beaucoup de moi.

Kino était grand de taille et était très mince, quand je l'ai rencontré. Il est venu à mon village à pied. Les jeunes gardes de la porte du village ne savaient pas s'ils devaient le laisser entrer. Ils ont dû contacter leurs supérieurs et ont attendu le verdict. Pendant qu'ils attendaient, les gardes l'ont forcé à se mettre une poudre, anti-moustique blanche sur sa tête juste pour l'humilier. Mais cela n'eut pas l'effet escompté.

Je l'ai remarqué pendant que j'étais forcée d'attendre, je l'ai contemplé alors qu'il entrait avec une immense dignité, et je n'ai pas détourné mes yeux de lui jusqu'au moment où il fut devant moi. À ce moment, le soleil se couchait, et son ombre vint jusqu'à moi puis me couvera.

Il était vêtu d'un type de botte que je n'avais jamais vu auparavant. Il portait une veste noire et un long manteau marron qui étaient vraiment poussiéreux, je me demandais s’il ne les avaient pas trouvés à l'intérieur d'un trou dans le sol. Il portait un sac à dos en lambeaux sur ses épaules. Il était mince, aussi. Si mince, que je devenais affamée quand je le regardais. Ses joues étaient creuses, ses cheveux ébouriffés. De la poudre blanche s'accrochait encore à ses cheveux.

J'étais la plus grande de mes amis, mais il a quand même dû se pencher pour me parler. « Salut, jeune fille. Mon nom est Kino. Je suis un voyageur. Quel est ton prénom? »

Je pensais que Kino était un joli prénom, court et facile à prononcer. Mieux que le stupide nom d'une fleur. Je lui ai quand même dit mon prénom.

« Quel beau prénom. Dis-moi, il y a un hôtel dans le coin ? Si tu connais un endroit qui n'est pas trop cher et qui a une douche, j'apprécierai volontiers. Je suis terriblement fatigué.»

À cette époque, ma mère et mon père entretenaient un petit hôtel pas cher.

« On dirait notre hôtel.» J'ai dit.

Kino avait le sourire aux lèvres. C'était juste ce qu'il voulait, m'a-t-il dit.

Je l'ai conduit chez moi.

Père n'aima pas Kino dès qu'il le vit, mais son visage montrait son refus seulement quelques instants avant qu'il arborât un sourire forcé. Il se leva ensuite de derrière le bureau pour montrer à mon nouvel ami sa chambre. Après tout, il ne refusa pas l'argent de Kino.

Kino reprit son sac, me remercia, et monta les escaliers avec mon père.

Je suis allé à ma propre chambre. Il y avait une banderole sur le mur avec "Plus que trois jours" écrit dessus en grandes lettres rouges.



Le jour d'après, je me suis réveillé vers midi et ensuite j'ai lavé mes cheveux dans le lavabo de la chambre à coucher. Mon père et ma mère n'étaient pas venus me réveiller. Après tout, c'était ma dernière semaine. On pouvait lire sur la banderole dans ma chambre " Plus que deux jours."

J’entendis un bruit à l'arrière de la maison, et j'y suis allé en passant par le jardin.

À l’arrière de ma maison se trouvait une grande pile de bout de métal avec des bouts de machines qui ne marchaient plus depuis quelques années. Les enfants du village jouaient souvent là — et ce, jusqu'à que le soleil se couche.

Kino s'accroupit à côté du tas de bricoles, martelant quelque chose. C'était la jante d'une roue. Elle n’était pas épaisse comme celle d'une voiture, mais elle était mince. Il y avait à côté de lui une carcasse d'une moto. J'en avais déduit que la roue venait de là.

Kino remarqua que je le regardais. "Bonjour" dit-il. Ses cheveux étaient encore ébouriffés, mais la poudre blanche avait disparu, ils brillaient, donc un peu plus.

« Qu'est-ce que tu fais ?» j'ai demandé.

« Je répare cette moto. J'ai demandé si je pouvais l'acheter, mais ton père m'a dit que c'était de la camelote et que je pouvais la prendre avec moi si je voulais.»

« Tu peux la réparer ?»

« Je peux la "soigner".» Kino rit, puis ajouta que cela prendrait du temps parce qu’elle était dans une mauvaise condition.

Quand il avait fini de marteler la roue afin de la rendre utilisable, il l'attacha à la moto. Ensuite, il s'occupa en martelant des choses, les tirant, et rassemblant des petits bouts entre eux pour en former un plus grand, des pièces plus compliquées.

Je l'ai regardé pendant un moment. Ensuite, j'eus faim, et rentrai à la maison pour préparer le déjeuner.



Après le déjeuner, j'allai de nouveau là où se trouvait Kino. Il avait presque "soigné" la moitié de la moto. Elle se tenait debout maintenant, se tenant en place grâce à sa béquille.

« Elle ressemble à la moto avec laquelle je voyageais, mais cela remonte à beaucoup de temps maintenant.» Dit Kino, qui se tourna. Il polissait une sorte de tige.

« Combien de temps cela prendra ?» demandais-je au hasard. « Pour la soigner, je veux dire.»

« Mm, encore un jour, je pense. Il devrait pouvoir bouger d'ici là.»

Il? « Les motos peuvent bouger de leur propre volonté ?» demandai-je, pour comprendre le choix étrange des mots que Kino choisissait.

« Pour être plus précis, pas de sa propre volonté, non. Quelqu'un doit s'asseoir sur lui, et faire un pacte avec lui. Ensuite, il pourra bouger.»

« C'est quoi un "pacte" ?»

Kino me regarda, et tapota le réservoir d'essence de la moto, la caressant presque. « Dans ce cas, le contrat est une promesse de s'entraider.»

« S'entraider comment ?»

« Je ne peux pas courir à la même vitesse qu'une moto peut rouler.» dit-il.

J'ai hoché ma tête. Il était quelque peu maigrichon et ne semblait pas pouvoir courir très vite ou loin.

« Et les motos peuvent aller vite, mais elles ne peuvent pas garder leur équilibre sauf si une personne ne s'assoit dessus.»

« Ok.» J'ai hoché la tête.

« Donc, je m'assois sur la moto lui procure l'équilibre ; la moto procure de la vitesse, et l’on pourra apprécier nos voyages ensemble.»

« Et donc vous vous entraidez. C'est ça, un pacte.» concluais-je.

« Exactement. Et donc aussitôt qu'il se réveillera, je lui demanderai son avis.»

« Il te le dira ?»

« Évidemment !» il dit et me fit un clin d'œil.



Je suis revenu à l'intérieur, fit du thé, et en ramena un verre à Kino. Il l'a bu et dit que c'était délicieux. Qu'il finit environ la moitié du verre, il dit, « On devrait lui choisir un nom. Tu en penses quoi ?»

« Comment s'appelait ton ancienne moto ?»

« Hermès.»

« Ça me paraît bon comme nom.»

« Vraiment ? On va l'appeler Hermès alors.» Kino souri. Je crois que je lui ai souri aussi.

Après ça, Kino continua de soigner la moto. Je m’assis derrière lui, regardai pendant un moment, puis demandai «Que fais-tu Kino ?»

« Fais ?» il demanda, sans se retourner. Ses mains continuant de travailler.

« Tu es un adulte, n'est-ce pas ?»

« En tout cas je le suis plus que toi.»

« Mais tous les adultes doivent faire un certain travail, non ?»

Kino paraissait confus, je pensais. Maintenant je comprends pourquoi. « Um... Oui, c'est ça.»

« Alors c'est quoi ton boulot ?» j'ai poursuivi.

« Hmmm, je pense que tu peux dire que je suis un voyageur.» Répondit Kino. Oui, un voyageur professionnel.»

« Donc, ton travail est d'aller à beaucoup d'endroits diffèrent ?»

« Ouai.»

« Même des mauvais endroits ?»

« Parfois .Mais la plupart des endroits sont bons, et je passe du très bon temps.»

« Mais, ce n’est pas un métier. » J’ai dit. Les mains de Kino s’étaient arrêtées de travailler, et il se tourna pour me regarder. « Les métiers sont durs.» Expliquais-je. « Ils ne sont jamais amusants. Ils ne sont pas supposés l’être. Ce sont des choses que l’on doit faire pour rester en vie. Si tu t’amuses en le faisant, voyager n’est pas un travail.»

« Vraiment ?» Murmura-t-il, en penchant sa tête sur le côté.

Je pensais qu’il se moquait de moi, j’ai donc essayé de lui montrer que je savais comment le monde fonctionnait. « C’est pourquoi demain — non, après-demain — je vais me faire opérer.»

Il paraissait confus. « Quel genre d’opération.»

« Pour devenir une adulte. Donc c’est ma dernière semaine.»

Kino me demanda ce que ça voulait dire. Tout d’abord, je fus surprise qu’il ne connaisse pas la dernière semaine. J’ai ensuite réalisé que je ne devais pas l’être. Évidemment, qu’il ne connaissait pas la dernière semaine ; il n’était pas originaire d’ici. J’ai décidé d’expliquer. Même si ça prendrait beaucoup de temps, je savais qu’il m’écouterait.

Dans mon village, j’ai dit à Kino, n’importe quelle personne qui avait plus de douze ans était considérée comme un adulte. Les personnes ayant moins, étaient considérées comme des enfants. Les adultes étaient des personnes avec un métier et des responsabilités.

Les adultes disaient toujours à leurs enfants « Vous les enfants, vous pouvez faire ce que vous voulez. Rien de plus. Mais les adultes ne peuvent jamais faire ce qu’ils veulent, parce qu’ils ont des métiers. On a besoin d’un travail pour vivre. Votre travail est la chose la plus importante dans votre vie. Quand vous êtes au travail, vous devez faire des choses que vous ne voulez pas faire, même des choses que vous pensez être mauvaises. Mais ne vous inquiétez pas. Quand vous aurez douze ans, vous vous ferez opérer. On ouvrira votre tête et on enlèvera l’enfant qui est en vous. Cette opération vous transformera en adulte. Ensuite, votre papa et votre maman pourront se relaxer, aussi.»

La semaine avant l’opération — la semaine avant chaque douzième anniversaire — était appelée la dernière semaine. Aucune personne du village ne devait parler à cet enfant. Ils passaient leur dernière semaine dans la solitude. Personne ne nous a jamais dit pourquoi cela devait se passer comme ça, cependant chaque enfant que je connaissais avait une théorie.

Quand j’avais fini mon explication maladroite, Kino a dit, « Je vois. C’est un système brutal».

« Pourquoi dis-tu ça ? Avec cette opération, n’importe quel enfant peut devenir un véritable adulte !» J’étais réellement perplexe.»

Si tu ne subis pas l’opération et deviens adulte, qu’est-ce qui t’arrivera ?

« Je ne vois pas ce que tu qualifies par un véritable adulte. Est-ce qu’un véritable adulte fait des choses qui ne lui plaisent pas ? Et forcer tout le monde à subir une opération… Je ne comprends pas cela, aussi.» Kino fronça les sourcils.

Je devais demander, « Tu as dit que tu étais plus adulte que moi. Donc as-tu subi une opération ou non ?»

« Non. Pas d’opération.»

« Donc tu es un enfant.»

« Non.»

Il n’était pas enfant, et il n’était pas un adulte ? Je n’ai pas compris. « Mais qu’est-ce que tu es alors ?»

« Ce que je suis ? Je suis Kino. Un homme nommé Kino. C’est tout. Et je voyage.»

« Tu aimes voyager ?»

« Oui, j’aime voyager. C’est pourquoi je voyage. Évidemment, je ne peux pas vivre par le voyage, donc je vends des herbes médicinales que je trouve sur le chemin ou des objets particuliers que je récolte par-ci par-là. Tu peux appeler ça un métier, je suppose. Mais fondamentalement, ce que je fais c’est voyager. Je fais ce que j’aime faire.»

« Ce que tu aimes...» Cette pensée me marqua. J’étais très jalouse. Jusque-là, je croyais que les enfants devaient subir l’opération pour être adulte. Aimé quelque chose ou haïr quelque chose étaient des sentiments que seuls les enfants étaient autorisé à avoir.

Mon enfance était presque finie. Et maintenant, il y avait Kino qui me disait qu’elle ne devait possiblement pas l’être.

« Quelle est la chose que tu aimes le plus ?» Demanda Kino.

J’ai rapidement répondu, « J’aime Chanter !»

Kino me sourit. « J’aime chanter aussi. Je chante souvent quand je voyage.» Et il commença à chanter. C’était une chanson rapide, et je ne comprenais pas les mots ; et il était très mauvais au chant. Quand il avait fini de chanter, il dit « Mais je ne suis pas bon, non ?»

« Non. Tu es très mauvais.» J’étais complètement d’accord et j’ai rigolé, soulagé qu’il sache qu’il était mauvais et je n’avais donc pas à lui faire mal au cœur.

Kino gloussa. « Même si je ne sais pas chanter, j’adore essayer.»

Je savais exactement ce qu’il ressentait. Je chantais parfois quand j’étais toute seule et qu’il n’y avait personne aux alentours pour m’entendre excepter moi-même.

J’ai donc chanté une chanson que j’aimais. Elle était lente, mais heureuse, une très belle mélodie. Je chante encore souvent cette chanson.

Quand j’avais fini de chanter, Kino applaudit. « Tu es vraiment doué au chant ! Je suis surpris. Tu dois être la meilleure chanteuse que j’ai jamais entendue.»

Embarrassé, je l’ai remercié.

« Tu aimes chanter, et tu es vraiment doué au chant, donc pourquoi tu ne deviendrais pas une chanteuse ?» Demanda Kino.

« Je ne peux pas devenir une chanteuse.»

« Pourquoi pas ?»

« Parce que ma mère et mon père ne sont pas des chanteurs.»

Il haussa les épaules comme s’il voulait dire qu’il n’avait pas compris, donc j’ai pensé que ça serait mieux si je lui explique.

«La raison pour laquelle les adultes ont des enfants est pour avoir quelqu’un qui hérite de leur travail, n’est-ce pas ? Les choses ont toujours été comme ça. C’est—»

« La tradition ? Le devoir ?» Kino coupa.

J’ai hoché la tête.

Kino dit, « Je vois... alors ton village est comme ça.» Il avait l’air très triste à ce sujet, mais se tourna pour continuer de soigner la moto.

J’ai regardé l’arrière de sa tête pendant un moment, ensuite j’ai dit « Mais ce n’est pas comme ça de partout ?»

Il s’arrêta de travailler, ensuite il secoua sa tête.

Je suis revenue à ma chambre.



Cette après-midi, je me suis allongé dans mon lit, et j’ai pensé. J’ai toujours cru que la meilleure chose — la seule chose à faire — était de subir l’opération et de devenir adulte. Maintenant, je commençais à me demander s’il n’y avait pas quelque chose d’étrange à propos de la façon de faire de mon village. Il y avait quelque chose d’étrange à propos du fait que l’on ne puisse pas faire ce que l’on aime pour le reste de notre vie, mais plutôt quelque chose que l’on déteste. Et pire — ne pas être capable de dire qu’on le détestait.

J’ai pensé à ça pendant quelque temps, et j’ai atteint une sorte de conclusion. Je ne voulais pas être une enfant pour toujours, mais si je devais devenir une adulte, je le deviendrais par mes propres moyens. Je ne voulais pas être forcé à grandir de la même façon que tout le monde, je voulais devenir le genre d’adulte que je voulais être — le genre d’adulte qu’était Kino. Et je voulais trouver un travail dans lequel je serais forte, et que j’aimerais— les deux à la fois.

Je voulais être moi



Le jour suivant quand je me suis réveillée, « Dernier -jour ! » était écrit sur la banderole accrochée au mur. Je descendis les escaliers et allai à la terrasse qui se trouvait dehors, là où étaient mes parents. Ils n’étaient pas autorisés à me parler, mais ils pouvaient me répondre si je leur parlais en premier.

J’ai repensé à tout ce à quoi j’avais pensé hier soir, et j’ai dit « Je ne veux pas avoir une opération pour devenir adulte. Il y a un autre moyen pour devenir un adulte ? Un moyen pour devenir adulte et rester moi-même ?» J’ai demandé, sans tourner autour du pot.

Mais ses mots allaient changer le cours de ma vie. Et celui de Kino aussi.

Mes parents ont réagi comme s’ils venaient d’avoir un cauchemar. Ils s’étaient échangé des regards, la peur dans leurs yeux.

Mon père cria, « Enfant stupide ! Comment peux-tu dire ça ! Sale vilaine, vilaine petite fille ! Comment ose tu proférer de …de tel mots de trahison ! Un tel blasphème ! Tu veux rester un enfant toute ta vie et ne jamais grandir ? »

Ensuite, il regarda ma mère, et elle continua — ses mots cinglants tel un fouet, la peur dans les yeux. « Excuse-toi, enfant stupide ! Dis que tu es désolé ! À ton père ! À moi ! Au village ! Supplie-nous de te pardonner tes caprices d’idiote ! Promets que tu ne diras plus jamais de telle chose, et l’on oubliera tout cela.»

« Pourquoi dis-tu soudainement de telle chose ? Quelqu’un t’a mis ses folies dans le crâne ?!» Mon père hurlait.

Cela me semble clair maintenant qu’ils aient réagi comme ça— après tout, aucun d’eux ne put résister à cette opération. Ils s’étaient convaincus du fait que c’était une très bonne chose. C’était un mécanisme de défense pour protéger leur tranquillité d’esprit. Mais pendant que ma mère voulait croire que c’était que les divagations d’un enfant, mon père ne put les prendre en considération si facilement. Il cherchait un moyen pour les mettre sur le dos de quelqu’un d’autre. Quelqu’un comme Kino.

En entendant du raffut, les adultes qui étaient proches commençaient à se réunir autour de la terrasse.

« Qu’est-ce qu’il y a ?»

« J’ai entendu des cris...»

Leurs comportements étaient répréhensibles, puisque mes parents n’agissaient pas de la même façon que les véritables adultes le devaient.

À ma surprise, mon père dit, « Excusez-moi. Mon idiote fille a dit la pire chose qui soit ! Elle ne veut pas subir son opération demain !»

J’ai été abasourdi qui leur avait dit ça — et qu’il n’essaya pas de couvrir sa honte.

La réponse de nos voisins était prévisible.

« Quoi ! Idiot ! Tu l’as mal élevé ! C’est ta faute !»

« Grandir sans une opération ? L’idée, elle-même est complètement invraisemblable.»

« Comment peux-tu parler de la grande opération de cette façon ? Tu peux bien être un enfant, mais certaines choses sont impardonnables !»

Ensuite ils ont commencé à me hurler dessus, comme si quelque chose était cassé à l’intérieur et ils ont continué jusqu’au moment où ils n’avaient plus rien à dire.

« Pardonnez-nous s’il vous plaît ! On lui a permis de dévier de la morale !» ma mère dit en pleurnichant.

Mon père me jeta un regard noir. « C’est ce qui arrive quand tu dis des choses stupides. Tu nous fais tous honte ! C’est cette pourriture de voyageur, j’en suis sûr. Il t’a mis ses pensées idiotes dans ta tête.» Mon père m’attrapa par la main et, en me tirant derrière lui, alla chercher Kino.

Kino était devant l’entrée arrière. Se tenait à côté de lui la moto, brillante comme neuve. C’était dur de croire que c’eût été de la camelote il y a deux jours de cela. Le sac à dos remplit à craquer de Kino était attaché au siège arrière, vibrant en cœur avec les vibrations de l’engin. La roue arrière ne touchait pas le sol, mais était en l’air, suspendue par la béquiller. Le manteau brun que Kino portait quand il était rentré dans le village Kino enveloppait le siège. Il était propre maintenant, mais toujours aussi usé.

Mon père lui cria dessus, me secouant si fort que mes dents s’étaient entrechoquées, « Toi là ! Oui, toi sale… crasseux !»

Quand Kino se tourna vers lui sans perdre son calme, la rage de mon père devint de la folie, et il cria, ayant l’air plus animal qu’humain.

Kino me regarda et murmura, « C’est comme ça que te transforme l’opération ? Peut-être que tu es mieux sans.» Il me fit ensuite un clin d’œil.

J’ai rigolé. En un instant, mon esprit s’apaisa et devint serein. J’étais déterminée.

« Toi ! Toi ! »Mon père brandit son poing fermé en direction de Kino, postillons et bave sortant de sa bouche.

Kino regarda mon père avec la patience d’un saint. «Oui ?»

« Oui ? Oui ? Je vais t’en donner des «Oui » moi ! Mets-toi à genoux ! Demande pardon ! À moi ! À toutes les personnes du village !»

Penchant sa tête sur le côté, Kino demanda « Implorer le pardon ? Pour quelle raison ?»

En réponse, mon père cria encore une fois. Son visage était rouge, et son corps entier tremblait. J’ai regardé le visage de ce véritable adulte. Il n’était pas si différent de moi quand je me disputais avec un ami sur quelque chose de stupide et rentrait chez moi en pleurant.

Il allait hurler quelque chose, ou bien ce sera encore un autre cri, quand une voix l’interrompit, «Je pense que ça suffit.» C’était l’ancien du village.

Je ne savais pas quel était son titre exact à cette époque, mais je savais qu’il était un homme important. Son comportement était différent de celle de ses adultes fous. Y avait-il, je me demande, une opération pour ça aussi ?

L’ancien du village parla Kino. « Voyageur, dans chaque village, chaque foyer, il y a différentes coutumes. Tu le sais.»

Ce n’était pas une question, mais Kino répondit, « Je le sais.»

« Dans ce village aussi, nous avons nos propres coutumes. Ces coutumes sont anciennes et ne seront pas altérées et ce peu importe tes actions. Je suis certain tu le sais.»

Les épaules de Kino se sont affaissées. « Je le sais. J’allais juste quitter votre village, l’Ancien. Si je reste ici plus longtemps, je serai tué. Y a-t-il des protocoles suivre afin de partir ?»

L’ancien dit qu’il n’y en avait pas. « Si tu suis ce chemin,» dit-il, en pointant la direction qui faisait face à la moto, « tu atteindras une porte. Utilise-le. Mais je ne pense pas que ta vie est en danger. Tu es entré dans ce village proprement, en suivant les procédures. Je garantis ta sécurité jusqu’au moment où tu passeras la porte. Après tout, c’est le Pays des Adultes ici.»

Kino se tourna vers moi, s’accroupit et me regarda. J’étais vaguement consciente du fait que mon père n’était plus à mes côtés. « Adieu, petite fleur,» dit Kino.

« Es-tu obliger de partir ?» Je voulais qu’il reste plus longtemps. Je voulais le revoir après une mon opération. Je voulais parler à Kino en tant qu’adulte.

Mais Kino dit, « Je ne reste que trois jours dans un endroit. Tu peux presque tout apprendre sur la plupart des lieux pendant cette durée. En plus, si tu restes plus longtemps que ça, tu ne pourras pas visiter autant de différentes et de nouvelles terres. Au revoir. Portes toi bien.»

Je l’ai salué, et Kino s’apprêta à monter sur sa moto quand mon père réapparut, portant un long, et fin couteau à découper. Ma mère était derrière lui, essuyant et tordant le devant de sa blouse.

Kino se retourna.

Mon père regarda l’ancien du village, lui montrant le couteau pour son inspection. L’Ancien hocha en approbation.

J’ai regardé mon père, en pensant seulement à quel point c’était étrange pour lui de porter un couteau à découper à l’extérieur. C’était vraiment incongru.

Kino demanda à l’ancien du village, pourquoi mon père rapporta un couteau.

L’Ancien, dans le même ton, détaché et précis, qu’il avait utilisé jusque-là, dit les paroles les plus horribles, « Il va utiliser ce couteau pour disposer de sa fille.»

Toutes les couleurs s’étaient vidées du visage déjà pâle de Kino. « Quoi ?»

« Elle a refusé d’effectuer son opération et a désobéi à ses parents. Un enfant comme ça ne doit pas être autorisé à agir en toute liberté. Les enfants sont tous, pour une très bonne raison, la possession de leurs parents. Les parents ont fait leurs enfants, et ils ont donc tous les droits d’en disposer d’un qui ne suit pas la bonne voie.»

C’était quand j’avais réalisé que mon père voulait me tuer. Je ne voulais pas mourir, mais je ne pouvais rien faire pour l’en empêcher. J’ai regardé mon père et vu qu’il arborait une expression sur son visage que je n’avais jamais vu.

« Bonne à rien,» il murmura, et ses mots étaient remplis de haine.

« Voyageur. S’il te plaît, éloigne-toi. C’est dangereux ici.» dit l‘ancien du village.

Mon père se rapprocha de moi le couteau à la main. Je vis la lame argentée luire, et j’ai pensé, Que c’est beau.

Ensuite le monde devint silencieux et le temps ralentit jusqu’au point où il alla la même vitesse que celle d’un escargot. J’ai vu Kino qui accourait à moi pour essayer d’arrêter la plonger de mon père. Mais le couteau arrivait à trop grande vitesse sur moi.

Merci, mais tu es arrivé trop tard. La lame était à quelque centimètre de moi quand mon père la tourna d’un côté et transperça le torse de Kino alors qu’il s’interposa entre nous.

Le son étant revenu, j’entendis d’étranges pleurs. Kino était debout comme s’il étreignait mon père, le bout du couteau à découpé se dégageait de son dos. Il tomba à mes pieds, le couteau le perçant encore. Son corps heurta le sol en faisant un faible bruit et resta ainsi. J’ai su qu’il était déjà mort.

Il y a eu un halètement général des villageois, suivi par un long silence.

Incapable de penser, j’ai reculé de quelques pas et je me suis heurté avec la moto. Elle se balança sur sa béquiller, mais elle était restée debout.

Ensuite, mon père rit. Il regarda autour de lui, et dit « Vous avez vu ! Vous avez vu comment cet homme s’était jeté entre nous. Je ne pouvais pas ne pas le transpercer. Je voulais tuer ma fille, vous le savez ça. Mais je l’ai tué à sa place.» Il se tourna vers l’ancien du village. « Qu’est-ce que l’on devrait faire pour un tel accident ?»

Je savais que ce que disait mon père était absurde. Tous les adultes ici le savaient aussi. Ils se regardèrent entre eux. Ils regardèrent mes parents, ensuite l’Ancien. Après un moment, l’Ancien dit, « Le voyageur a sauté en direction du couteau, donc je suppose qu’il n’y a rien que l'on puisse faire. Ce n’est pas comme si tu avais essayé de le poignarder. Un accident bien déplorable. Tu es coupable de rien. Tout le monde est d’accord ?»

Les adultes autour d’eux hochèrent la tête, leurs yeux vides grands ouverts. « Oui, bien sûr, c’était un accident. Très déplorable. Très tristes,» ils continuaient de dire.

Mon père se courba devant l’ancien du village. « Et cet enfant corrompu ?»

L’ancien posa ses yeux sur moi. Ils étaient comme des copeaux d’onyx, noir, silencieux. « Tu peux la tuer. S’il y a quelqu’un à blâmer pour la mort du voyageur… » Il haussa les épaules et se tourna.

Mon père se courba encore une fois et dit, « Votre sagesse me donne beaucoup de satisfaction.»

Ma mère se tenait près de lui, me regardant les mains devant sa bouche. Elle ne disait rien, cette même femme qui m’appela jadis sa « fleur »comme Kino faisait… avant sa mort.

Même si je savais qu’ils allaient me tuer, à ce moment j’étais contente parce que au moins je n’aurai pas à subir l’opération avant de mourir sans devenir un « adulte »

Mon père tendit le bras et essaya de tirer le couteau du corps de Kino, mais il résista. Ma mère s’accroupit pour l’aider. La poignée était couverte de sang, et donc elle l’enleva des mains de mon père et l’empoigna travers la manche de sa blouse blanche. Il mit ses mains autour de ceux de ma mère et doucement, ils ont tiré —centimètre par centimètre— avec un son désagréable.

En y repensant ce délai était le cadeau final de Kino pour moi. Comme si, d’une manière ou d’une autre, il tenait la lame de ce couteau pour me donner du temps. Alors que mes parents essayaient de retirer le couteau, se débattant pour avoir le contrôle dessus, une petite voix me murmura dans les oreilles.

« Peux-tu conduire une moto ?» Il dit. Elle ressemblait à la voix d’un petit garçon, jeune, même plus que moi.

« Oui.» J’ai murmuré.

La voix continua, « Si, tu restes ici, tu vas mourir.»

« Je préfère mourir plutôt que vivre et avoir à subir l’opération. Cette opération est pire que la mort si elle me rend comme eux.»

Encore, le bruit grinçant du métal en contact d’un os. Environ la moitié du couteau était sortie.

« Mais honnêtement, veux-tu mourir ?»

Honnêtement ?« Je préférerais vivre.»

« Donc,» la voix dit silencieusement, « il est temps pour un troisième choix.»

« Qu’est-ce que c’est ?»

Presque tout le couteau était sorti.

« Tu peux conduire une bicyclette, non ?»

« Oui.»

« Donc monte sur le siège de la moto derrière toi. Attrape le guidon. Tourne ta main droite vers toi et penche ton corps en avant. Ce sera comme si tu conduisais une bicyclette — une grosse, et bien lourde bicyclette.»

Avec un son horrible de succion que j’entends encore quelque nuit dans mon sommeil, le couteau sortit du corps de Kino, et ma mère et mon père son tombé en arrière. Mon père tenait le couteau. Les adultes autour d’eux criaient en alarme, et eurent ensuite un rire nerveux.

« Et après quoi ?» J’ai demandé, trop fort.

Les adultes m’ont regardé bizarrement, comme s’ils avaient oublié ma présence — comme s’ils avaient oublié la raison de tout cela. Mon père tenait l’horrible couteau à découper dans ses mains tachées de sang et me sourit. Il était terrifiant, mais je n’avais pas peur.

« On s’en va !» cria la petite voix.

Je me suis tourné et ensuite jetée sur le siège de la moto au moment même où mon père s’était jeté sur moi, brandissant le couteau. Ma mère hurla.

Comme on me l’avait dit, j’ai tourné la poignée droite et me suis penché en avant. La moto descendit brusquement de sa béquiller et l’engin rugit à la vie. Mon corps fut propulsé en arrière, je me suis accroché désespérément aux poignets et j’agrippais le réservoir d’essence avec mes genoux.

Le groupe d’adultes était soudainement derrière moi.

Je conduisais la moto. Et c’était comme conduire une grosse, et bien lourde bicyclette. J’ai stabilisé légèrement le guidon alors que l’on était sur un terrain irrégulier. Arrivé sur le sol plat, on accéléra.

« Bon boulot ! Continu comme ça !» La voix cria. « Maintiens fermement le réservoir avec tes haches. Ça t’équilibrera. Je vais te dire comment changer de vitesse.»

J’ai suivi les instructions de la voix. Le vent sur le visage, mes yeux ont pleuré. À travers mes larmes je pouvais voir que la porte devant nous devenait de plus en plus grande, et soudainement elle était derrière nous, et on était dehors sur une route ouverte, roulant sur une quasi-infinité de verdure. Ce fut la première fois de ma vie que j’ai jamais été en dehors des portes du village.

Je ne pensais à rien alors que je conduisais, en me concentrant sur rien sauf sur le fait de garder mon équilibre. Je ne pensais pas à mes parents, pas à Kino, pas aux yeux d’onyx froids de l’ancien du village. Pas même de la vie que j’ai laissée derrière moi.

Le vent brûlait mes yeux, mais je n’y pensais pas. J’ai continué de conduire, en pleurant.

Je ne sais pas combien de temps j’ai conduit. Des minutes, des heures, jours. Ensuite la voix dit, « Bon, je pense qu’on a assez conduit.»

J’étais revenue à moi-même, clignant les yeux, je me suis assis d’une manière plus correcte sur le siège.

« Fais ce que je te dis.»

Comme il me l’a dit, j’ai doucement tiré l’évier de vitesse avec ma main gauche, puis j’ai déplacé mon pied droit sur une pédale, et la moto ralentit graduellement. Quand elle allait presque s’arrêter j’ai posé mon pied par terre. Sur un vélo, mes doigts des pieds auraient rebondi contre le sol et il se serait arrêté, mais c’était différent. Mes pieds avaient durement touché le sol, et la grosse moto se renversa.

« Eep !» Mon calme instructeur bêla. Tenant encore le guidon, j’ai percuté le sol et roula, retentissait à mes oreilles le bruit du métal sur de la crasse.

« Bon, c’était complètement mauvais. Qui t’a appris à conduire une moto, C’est quoi ton nom ?» J’ignorais la voix et m’allongea sur mon dos et regardait le ciel. Il était vide, et bleu. J’ai tourné ma tête et je n’ai vu que de l’herbe et des fleurs flottant au vent. Je me suis levée et j’ai regardé autour de moi. J’étais au centre d’un champ de fleurs rouge. Le champ était si vaste que quand j’avais suivi des yeux la trace que les pneus de la moto avaient faite sur la route, je ne pouvais plus voir mon village. Mais pendant un instant j’avais repensé au voyageur allongé là, dans le jardin derrière notre hôtel, avec le couteau transperçant son cœur, mourant.

« Kino,» J’ai murmuré. Bizarrement, je n’étais pas triste3 Je ne pouvais plus pleurer. J’ai pleuré toutes les larmes de mon corps et les ai données au vent. Mais je n’étais pas joyeuse non plus. Je me tenais là, insensible.

« Hey !» dis la voix à côté de mes pieds. J’ai baissé mes yeux, et puis j’ai vu la moto allongée sur son côté. « J’ai dit que c’était complètement mauvais !»

« Quoi ?»

«Ta conduite est ‘Quoi’. Cela t’embarrasserait de me remettre droit ?»

Aussi bizarre que cela puisse paraître — aussi inattendu — la voix venait de la moto de Kino.

« La moto ? Est-ce que c’est bien toi ?»

« Évidemment, que c’est moi ! Il y a personne d’autre, non ?» la voix semblait un petit peu en colère.

Il n’y avait personne d’autre aux alentours. On était seul dans le champ de fleurs rouge. « C’est vrai, désolé.»

«Je n’ai pas besoin de tes excuses, petite fille, j’ai besoin que tu me remette sur pied. S’il te plaît,» la moto ajouta, ayant l’air dans le besoin.

Je trouvais ce ton plus charmant que ses gémissements de nécessité. Je fis comme il l’avait dit, m’accroupissant, pressant ma poitrine contre le siège, et je l’ai tiré de toutes mes forces.

On a écrasé bon nombre de fleurs rouges.

J’ai mis mon pied sur la béquiller et puis je l’avais poussé vers le bas tout en tirant la moto pour la remettre droite. La moto se déplaça en arrière sur la béquiller et ne tomba pas quand je l’avais lâchée.

« Merci.»Dit-il.

« De rien,» Répondis-je.

« Ce n’est pas passé loin, là-bas.» Il semblait soulagé.

Pendant une seconde je ne comprenais pas de quoi il parlait. Et je me rappelai les rayons du soleil qui luisait sur la lame du couteau à découpé. C’était comme si je regardais la scène se produisant à quelqu’un d’autre. Comme si je n’étais plus cette petite fille du village.

« Merci pour m’avoir sauvé,» j’avais dit automatiquement.

La moto répondue, « C’est ma réplique. Si j’avais été laissé là-bas, qui sait ce qui serait advenu de moi ? Je suis ravi que tu m’es sortie de là, Kino.»

« Comment viens-tu de m’appeler ?» demandais-je.

« Kino.»

« Pourquoi ?»

« Il y un moment, je t’ai demandé ton nom, et tu as dit Kino.»

« Mais je suis… » et j’ai commencé à dire mon prénom, mais ce n’était plus prénom. C’était le prénom d’un enfant qui avait vécu dans ce village sans se préoccuper du monde. Qui croyait que l’on devait subir une opération à douze ans pour devenir un «véritable adulte». Cet enfant était mort aujourd’hui, ou peut-être qu’elle a juste grandi par ses propres moyens. Quoi qu'il arrive, elle n’existait plus.

Je me suis rapproché de la moto et dit, « Je suis Kino. C’est un joli prénom, non ?»

« Ouais, je l’aime bien. Dis, c’est quoi mon nom ? Est-ce que j’en ai un ? Je ne m’en souviens plus.»

Je me rappelais le nom que moi et Kino choisîmes le jour précédent. « Hermès. Ton nom est Hermès. C’était le nom d’un vieil ami de… quelqu’un qui est mort.»

« Hm… Hermès. Pas mal,» dit Hermès, qui essaya plusieurs fois son nom, qui vraisemblablement lui plut. Ensuite il demanda, « Qu’est-ce que l’on va faire Kino ? Où allons-nous aller ? »

On était debout là au milieu d’un océan de rouge, dorloté par le doux parfum des fleurs et l’herbe qui tourbillonnait autour de nous. Je n’avais pas de réponse pour lui, et il n’en avait pas pour moi.

Et donc, on commença notre voyage ne sachant rien, encore moins où l’on allait.

Kino Chapitre 1 Fin.png