Sword Art Online:Continuation Aria dans la Nuit sans Étoiles

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Continuation : Aria dans la Nuit sans Étoiles[edit]

Aincrad, 2ème Étage, Décembre 2022


La ville principale du 2ème Étage d’Aincrad, « Urbus », était une ville située à l’intérieur d’une montagne tabulaire[1] qui s’étendait sur 300m de diamètre et avait été creusée jusqu’à ce qu’il n’en reste que le pourtour extérieur.

Une fois la porte sud franchie, les mots [ZONE INTÉRIEURE] flottèrent devant mes yeux et le rythme lent de la musique d’ambiance de la ville commença à retentir. Contrairement à la musique de la ville du 1er Étage, dominée par des instruments à corde, ici, la musique avait la triste sonorité du hautbois. Le style vestimentaire des PNJ qui passaient était, lui aussi, subtilement différent, donnant une sensation du style : « Me voici donc sur un nouvel étage ».

Après avoir marché 10m depuis la porte, je me suis mis à regarder autour de moi. Il n’y avait pas un seul curseur vert―signalant des joueurs―en vue ; mais c’était tout naturel car le gardien de l’escalier qui menait au 2ème Étage, le boss du labyrinthe du 1er Étage, « Illfang le Seigneur Kobold », avait été vaincu à peine 40 minutes auparavant et, à part moi, tous les membres du groupe de raid contre le boss étaient retournés à la base.

En d’autres termes, j’étais le seul joueur existant sur ce vaste 2ème Étage, moi, Kirito, le « Bêta-testeur » maintenant devenu « Beater ».

Même si c’était le cas, cette situation n’allait pas durer très longtemps. En effet, deux heures après l’annihilation du boss, la « Porte de Téléportation » au centre de la ville principale de l’étage suivant (c’est-à-dire Urbus) serait automatiquement [Activée], se connectant aux villes principales des étages inférieurs. A cet instant, les joueurs en attente déborderaient en flot de la porte.

D’un autre côté, si je le souhaitais, je pouvais monopoliser cette ville pendant les 1h20 restantes… Je pouvais aussi accomplir quelques quêtes de « Massacre » pour lesquelles j’aurais normalement à disputer deux ou trois « pop » à d’autres joueurs. C’était une idée très séduisante pour un joueur solo qui, en fin de compte, prêchait l’intérêt personnel. Cependant, je n’avais pas assez de courage pour énerver sérieusement les quelques centaines…ou, peut-être, milliers de personnes qui attendaient impatiemment l’activation de la porte.

En conséquence, je me suis mis à trottiner le long de la rue principale d’Urbus qui filait plein nord. J’ai gravi les larges escaliers puis atteint la place centrale et, finalement, j’ai marché vers la large porte qui se trouvait en son centre.

On appelait ça une « porte » mais, en vérité, il s’agissait juste d’une arche faite de pierres empilées avec soin. Sans porte ni grille d’aucune sorte, il n’y avait rien pour obstruer la vue de l’autre côté. Cependant, en me rapprochant, j’ai remarqué une légère distorsion de l’espace vide au centre de l’arche, comme si je regardais à travers une fine pellicule d’eau.

Tout en regardant autour de moi pour m’assurer une voie de repli, j’ai tendu lentement ma main droite en direction de l’ondulant voile transparent. Le bout de mon doigt, enveloppé par un gant en cuir noir, toucha la surface verticalement allongée de l’eau. A cet instant…

*Pa* Une aveuglante lueur bleue jaillit et m’éblouit.

La lumière mouvante se propagea en cercles à l’intérieur de l’arche large de 5m. Une fois tout l’espace rempli, la « Porte de Téléportation » s’ouvrirait ; c’est ce qu’on appelait l’« Ouverture de la Ville ». Cependant, je me suis retourné sans observer le majestueux phénomène. Comme prévu, je me suis mis à foncer à toute vitesse vers une bâtisse ressemblant à une église, à l’est de la place. Après m’être jeté dans l’entrée et avoir gravi l’escalier à l’intérieur, j’ai plaqué mon dos à côté d’une fenêtre du 3ème étage et observé la place en-dessous.

A cet instant précis, l’intérieur de la porte luit brillamment et l’orchestre de PNJ installé au coin de la place se mit à jouer une bruyante « fanfare d’ouverture ».

Après un moment, un flux massif et rapide de joueurs se déversa de la lumière bleue de la porte.

Certains restaient sur la place, observant les environs. D’autres partaient en courant avec, en main, une carte en cuir du vendeur d’information. Et…il y avait des gens qui levaient les poings et criaient : « Je suis au 2ème Étage…!! ».

Pendant les bêtatests, il y avait eu au total neuf « ouvertures de ville ». Dans ces moments-là, bien entendu, on pouvait voir les lignes du groupe de raid qui avait vaincu le boss de l’étage précédent noyées sous les généreux applaudissements et la grande admiration des joueurs des étages inférieurs. Cependant, cette fois-ci, le seul « ouvreur » s’étant déjà enfui, l’évènement n’eut pas lieu. Il y avait un groupe de personnes qui me cherchait avec agitation mais, malheureusement, ils ne parviendraient pas à trouver mon nom ici.

Pourquoi ? Plusieurs douzaines de minutes plus tôt, après avoir vaincu le boss, j’avais déclaré devant plus de 40 membres de raid que, moi, « Kirito », je n’étais pas qu’un simple bêta-testeur… Que j’avais atteint le plus haut niveau parmi les 1 000 testeurs et accumulé le plus de connaissances sur le jeu… Et que j’étais un « Beater ». Je ne voulais pas me montrer aussi désagréable mais j’avais en partie réagi comme ça pour détourner l’hostilité des nouveaux joueurs envers les testeurs. A cause de ça, la nouvelle de mon infamie s’était actuellement répandue parmi les meilleurs joueurs à la vitesse de la lumière. Si je sortais de ma cachette, loin de recevoir des félicitations, il n’aurait pas été étrange que j’entende des huées et des quolibets. Et, dans ces circonstances, je n’étais pas sûr de pouvoir garder un calme olympien.

De ce fait, il me fallait rester caché au troisième étage de l’église jusqu’à ce que l’agitation sur la place se calme. Cependant…

« …Hein ? ai-je murmuré tout bas après avoir vu un évènement inhabituel sur la place en-dessous. »

Au lieu de s’arrêter, la joueuse qui venait juste de sortir de la Porte de Téléportation continua à foncer tout droit vers la partie ouest de la ville. On pouvait voir ça comme de l’empressement à rejoindre le magasin d’armes ou le PNJ de lancement de quête ; mais le hic c’étaient les deux hommes qui étaient sortis de la porte juste après elle. Ils prirent un moment pour regarder autour d’eux puis, une fois qu’ils aperçurent la fille, ils se mirent à courir dans la même direction qu’elle. Apparemment, c’était « deux types chassant une fille ».

Normalement, je n’aurais pas mis le nez dehors et je ne m’en serais pas mêlé vu qu’à cet endroit le « Code de prévention du crime » était en vigueur ; mais, comme celle qui était poursuivie était une de mes connaissances, c’était une autre histoire. Car, ça ne faisait aucun doute, la fille aux cheveux mordorés bouclés et à l’équipement en cuir sobre était la vendeuse d’informations « Argo la Ratte ».

« Vendre toute information vendable ». Il y avait certainement des gens qui détestaient cette devise de la Ratte ; mais je ne pouvais pas calmement les poursuivre au beau milieu de la ville sous cette apparence. Après avoir hésité pendant un moment, j’ai mis mes pieds sur le rebord de la fenêtre de l’église et sauté sur le toit juste en-dessous. J’ai rapidement foncé en m’appuyant sur mes paramètres d’agilité avant que les joueurs de la place ne me remarquent et j’ai sauté sur le toit de la bâtisse d’à-côté. J’ai continué sans me laisser tomber au sol, ciblant la direction vers laquelle étaient allés Argo et les deux types. Je pouvais faire ça grâce à la taille consistante des bâtiments d’Urbus.

J’ai secoué mes doigts de la main droite tout en courant pour appeler la fenêtre de menu. Après avoir cliqué sur [Pistage] dans l’onglet des compétences, j’ai sélectionné [Poursuite] dans le sous-menu flottant. Quand j’ai entré le nom [Argo] dans la fenêtre de saisie, de lumineuses empreintes de pas vert pâle apparurent sur la route qui s’étirait en bas à droite de mon champ de vision.

« Poursuite » était une technique de niveau supérieur qui pouvait être apprise après avoir augmenté sa maitrise de « Pistage ». Cette compétence, normalement utilisée pour accroitre l'efficacité de la chasse aux monstres, pouvait aussi être utilisée pour poursuivre un joueur dont on connaissait le nom. Cependant, vu que mon niveau était encore bas, les empreintes de pas visibles dataient d’une minute. Je me suis empressé de suivre les lignes de petites semelles de chaussures en train de s’effacer.

Argo s'était concentrée sur sa vitesse (AGI) donc, pour qu’elle ne parvienne pas à se débarrasser de ses deux poursuivants, il ne devait pas s'agir de joueurs ordinaires. Même si je ne les avais pas vus dans le groupe de raid contre le boss, ils devaient avoir des niveaux de premier ordre. En plus, les empreintes de pas qui longeaient la rue en direction de l’est avaient quitté la ville par la porte creusée dans la bordure extérieure du cratère. Ces plaines, à l’ouest d’Urbus, étaient une zone dangereuse où erraient de larges monstres semblables à des buffles. La situation empirait. J’ai mordu mes lèvres et foncé sans m’arrêter dans la savane virtuelle.

Avec mon niveau actuel, entrer seul dans l’étendue sauvage qui se trouvait après la savane était encore plutôt risqué. Mais, heureusement, les empreintes de pas inscrites sur les broussailles étaient de plus en plus vives―en d’autres termes, Argo avait déjà arrêté de courir. A l’intérieur de la vallée, entre deux petites montagnes rocheuses, je pouvais entendre une voix familière :

« …ois je vous dirai encore la même chose-daro ! Peu importe combien vous m’en offrez, c’est la seule information que je ne vous vendrai pas-da ! »

L’enrobage nasal coquet en fin de phrase indiquait clairement la voix d’Argo mais elle était 30% plus intimidante qu’à l’accoutumée. La voix tranchante d’un homme suivit à ce moment-là :

« Tu ne vas pas la garder pour toi mais tu ne veux pas non plus la partager publiquement. Ça veut dire que tu fais monter les prix, non-gozaru ? »

…Gozaru ? J’ai froncé les sourcils en stoppant mes pieds puis j’ai escaladé une falaise à proximité. Dans SAO, en utilisant son cerveau et avec de l’obstination, il existait de nombreuses façons de franchir un terrain apparemment infranchissable de prime abord. Un jour, j’avais l’ambition d’escalader le mur extérieur de ce château volant pour atteindre l’étage suivant. Mais, pour le moment, j’escaladais cette montagne dans le but de me placer dans leur angle mort, non par défi mais pour ma propre sûreté.

Après avoir grimpé environ 5m et atteint une surface étroite et plane, j’ai continué à m’avancer en rampant. A cet instant, la source de la dispute se trouvait juste en-dessous de moi.

« Ce n’est pas une question de prix-yo ! Je ne vous l’ai pas dit ? Je ne veux pas qu’on m’en veuille une fois que j’aurais vendu l’information-da !! »

Aux paroles d’Argo, la voix de l’autre homme répondit alors :

« Pourquoi on t’en voudrait !? Peu importe le prix que tu en demandes, on t’en sera quand même reconnaissants-gozaru !! Donc dépêche-toi de nous vendre l’information sur la quête cachée de cet étage, la quête d’acquisition de la « Compétence Additionnelle » !! »

…Hein ?

J’ai complètement coupé la respiration que j’étouffais. Ces compétences additionnelles qui n’apparaissaient pas sur l’arbre de compétences à moins de remplir certaines conditions spécifiques, couramment appelées les « Compétences Cachées »… Pendant la période des bêtatests, j’avais seulement découvert « Méditation », une compétence de concentration mentale―la pose y ressemblait―qui augmentait le taux de récupération de PV et diminuait la durée restante des états négatifs. Cependant, étant donné sa faible efficacité et sa pose craignos, peu de joueurs la prenaient. Il y avait aussi la compétence additionnelle « Katana », utilisée par le Seigneur Kobold et les monstres de type samurai du 10ème Étage. Mais je ne connaissais toujours pas les prérequis.

Quoi qu’il en soit, j’étais certain que le sujet de conversation entre Argo et les deux mystérieux « gozaru » n’était pas la compétence « Méditation » ; vu que le PNJ donnant cette compétence était au 6ème Étage. Ce qui voulait dire qu’il existait un déclencheur de quête qui débloquait une compétence additionnelle que je ne connaissais pas encore―ce qui signifiait que les autres bêta-testeurs ne la connaissaient pas non plus―sur ce 2ème Étage et ces « gozaru » essayaient de faire vendre l’information à Argo… Quelque chose comme ça ?

J’en étais arrivé à cette conclusion quand le volume de voix des types augmenta.

« Aujourd’hui, on va définitivement y arriver, c’est sûr-gozaru ! »

« C’est sûr qu’on fera tout ce qui sera nécessaire pour obtenir cette compétence additionnelle-gozaru ! »

« Vous ne voulez vraiment pas comprendre-na…! Peu importe ce que vous direz, je ne vous vendrai pas cette information-goza…oups, je ne la vendrai pas-dayo !! »

*Piri* Le voltage de la tension ambiante sembla augmenter d’un cran. Me disant ça, je me suis dressé sur la saillie rocheuse et j’ai sauté à terre, 5m plus bas. J’ai atterri entre Argo et les deux types. Afin de ne pas recevoir de dommages en sautant de cette hauteur en dépit de mes paramètres d’agilité encore faibles, j’ai plié les genoux et pris une posture défensive pour absorber les dommages de l’impact avant de me redresser rapidement.

« …Qui es-tu-gozaru !? »

« Un espion d’un autre clan !? »

Au moment même où je vis la silhouette des « gozaru », en train de crier de concert, un coin de ma mémoire fut intensément stimulé. Leurs corps étaient entièrement recouverts d’armures en tissu gris foncé. Apparemment, ils portaient des cottes de maille légères sur la partie supérieure de leurs corps. Les armes dans leurs dos étaient des cimeterres de petite taille. Sur leurs têtes se trouvaient des bandanas et des masques de pirates de la même couleur grise. D’apparence générale, c’était la pseudo allure des « ninjas », qui était l’originalité et l’inventivité mêmes.

« Hum, heu…vous êtes probablement…Fu…Fuu…Fourra…non…Fouga…je ne crois pas que c’est ça… »

« C’est Fuuma-gozaru !! »

« Nous sommes Kotarou et Isuke de la guilde « Fuumaningun »-gozaru !! »

« Oh, c’est ça ! »

J’ai claqué les doigts de ma main droite de satisfaction après qu’ils m’aient aidé à compléter mes souvenirs. Ces deux-là étaient membres de la guilde de ninjas la plus ridiculement rapide, crainte pendant la période des bêtatests. Je devrais commencer par faire une parenthèse sur la raison de cette crainte : Chaque membre était exactement comme Argo et développait principalement ses paramètres d’agilité. Ils ouvraient la bataille en première ligne et utilisaient leur mur AGI pour perturber l’ennemi. Quand ça devenait dangereux, ils se servaient de leur rapidité pour fuir, forçant le monstre à attaquer à la place des équipes proches. Peu importe comment j’y regarde, c’était clairement un groupe de shinobis diaboliques.

Mais je ne savais pas que ces types continuaient à suivre la voie des ninjas même après que la version officielle de SAO soit devenue un jeu de mort ; ce dont, en soi, je n’avais pas à me plaindre―jusque-là. Cependant, poursuivre Argo, une joueuse, à deux contre un, et la forcer à donner des informations…c’était une autre histoire.

J’ai fait un geste à Argo―qui se trouvait derrière-moi―pour qu’elle recule et bougé mon doigt vers la garde de ma chère épée pendue dans mon dos, « Lame Détrempée +6 », en disant :

« En tant qu’agent secret du gouvernement, je ne peux ignorer cette mauvaise action des ninjas Fuuma… »

A cet instant…

Sous leurs capuches de faux ninjas, les yeux de Kotarou-shi et Isuke-shi luirent brillamment au même moment.

« Espèce de connard, tu es d’Iga[2] ? » (x2)

« Aah !? »

Apparemment, le discours que j’avais cru adapté à l’ambiance avait appuyé là où ça faisait mal. Leurs mains droites commencèrent à atteindre, en parfaite synchronisation, les katanas de ninjas dans leurs dos―qui étaient en fait les cimeterres de taille réduite.

Pas moyen… Ils dégainent vraiment ? Mais on est à l’« Extérieur » sans « Code de prévention du crime », là où les joueurs peuvent attaquer d’autres joueurs et faire réellement diminuer leurs PV. A cet instant, le curseur coloré des attaquants deviendrait orange, indiquant un statut de « criminel » qui les empêcherait d’entrer en ville. Même si c’étaient des ninjas, ils ne pourraient pas tromper le « Système Cardinal » contrôlant ce monde.

Devrais-je dire que je ne suis pas d’Iga mais de Koga[2] ? Mais est-ce que ça m’aidera à éviter le problème ? Tandis que je me posais sérieusement ces questions idiotes…

La solution arriva d’une direction inattendue.

Un peu plus tôt, je ne m’étais pas arrêté à l’entrée de la petite vallée pour écouter la conversation d’Argo et des ninjas. A la place, je m’étais débrouillé pour escalader la falaise. J’avais fait ça car je ne me trouvais pas au beau milieu d’une ville mais en plein sur le terrain de chasse. Si on restait immobile à un endroit, tôt ou tard, quelque chose finirait forcément par arriver.

Tout en me reculant lentement, j’ai dit à voix basse :

« Derrière-vous. »

« Tu crois qu’on va se faire avoir par cette ruse-gozaru !? » (x2)

« Ce n’est pas une ruse. Vous n’avez qu’à regarder derrière-vous. »

Quelque chose dans ma voix sembla ébranler leur scepticisme de ninja. Kotarou et Isuke, qui avaient tourné le visage, firent un léger bond en même temps ; car un nouvel indésirable se tenait juste sous leur nez…non, une grande vache indésirable. Son nom officiel était : « Bœuf Tremblant ». Sa taille au garrot était d’environ 2m50. C’était un immense monstre bovin, spécialité du 2ème Étage. Même si sa résistance et la puissance de ses attaques étaient tout à fait à la hauteur de son apparence, en fait, ce qui était gênant c’étaient la terriblement longue portée de ses attaques et son endurance, qui rendaient le changement de cible en plein combat très difficile. Vu que je m’étais déjà replié vers la saillie, elle allait forcément prendre ces types pour cible.

« Bumoooo…!! hurla la vache. »

« Go…gozaruuuuuu !! » (x2)

Elle fut suivie par les cris des ninjas. Juste après ça, les deux corps en tenue de ninjas se mirent à courir à une vitesse impressionnante en direction de la ville. La vache les poursuivit avec une agilité que ne laissait pas soupçonner son corps immense. Il ne fallut que quelques secondes pour que la vibration du sol et les cris ne disparaissent à l’horizon. Apparemment, la course-poursuite allait continuer jusqu’à ce que Kotarou et Isuke entrent dans Urbus.

Pour ma part, ayant, d’une manière ou d’une autre, évité l’éruption d’une grosse bataille contre ces super ninjas, j’ai poussé un soupir tout en vérifiant mon apparence. Encore une heure auparavant, j’étais vêtu d’un manteau en cuir gris foncé très sobre, recouvrant une chemise en coton et un pantalon en cuir noir. Mais, en combinant l’équipement unique dropé par le Seigneur Kobold―le boss du 1er Étage―, le « Manteau de Minuit », dont je m’étais aussitôt équipé, avec la couleur de mes yeux et de mes cheveux, j’avais rendu mon corps tout entier totalement noir. Je pense que je n’avais pas volé le titre de « Sale Beater » ; mais, en même temps, d’une manière ou d’une autre, je ressemblais moi aussi à un ninja. A partir de maintenant, ça va devenir insupportable si la rumeur « Kirito est d’Iga » se répand… Est-ce que je devrais au moins changer la couleur intérieure ?…fut ma pensée.

Encore une fois, un évènement inattendu arriva.

Deux petits bras tendus m’embrassèrent fermement par-derrière. Je pouvais sentir une douce et chaude sensation de toucher contre mon dos, ainsi qu’un léger murmure :

« …T’as plutôt la classe-yo, Ki-bou. »

Cette voix appartenait, bien entendu, à Argo, qui s’était tenue silencieuse jusque-là. Cependant, le ton de sa voix était subtilement différent de l’usuel ton légèrement odieux de la « Ratte »…

« Mais ce genre de choses enfreint la première règle d’Onee-san, la vendeuse d’informations, non ? »

…O…Onee-san ? …Les règles de la vendeuse d’informations ?

Ces mots attisèrent ma curiosité mais ce n’était pas une situation à laquelle un joueur tel que moi―élève de 4ème totalement incapable de toute intercommunication encore un mois avant―pouvait convenablement réagir. J’ai désespérément réfléchi tout en restant figé sur place et, d’une manière ou d’une autre, je suis parvenu à sortir ces mots de ma bouche :

« …De toute façon, tu m’en dois une. Je serais perturbé jusqu’à ce que tu me dises la raison de tes moustaches. »

Sur le visage de la vendeuse d’informations, « Argo la Ratte », se trouvaient trois lignes de moustaches clairement peintes avec du maquillage noir sur chacune de ses joues. Elles étaient à l’origine de son surnom de Ratte mais personne ne savait la raison pour laquelle elle les avait peintes ; et une étiquette de prix terrible de 100 000 Cols était attachée à cette information.

Cependant, plus tôt, pendant la bataille contre le boss, je m’étais fait étiqueter « Beater » pour m’isoler de la plupart des bêta-testeurs, prenant à mon compte toute l’hostilité des nouveaux joueurs contre les testeurs, Argo comprise. Afin d’exprimer sa gratitude, Argo m’avait envoyé un message disant que je pouvais « Avoir gratuitement l’information de mon choix » ; ce à quoi j’avais répondu : « Dis-moi la raison de tes moustaches. »

A mes mots, dits comme une blague pour détourner la situation, Argo appuya davantage son visage contre mon dos en chuchotant :

« …Ok-yo, je vais te le dire-ru. Mais il te faut patienter un peu le temps que je retire mon maquillage-ra… »

Hein ?

« Maquillage »… Est-ce que ça veut dire « retirer ces moustaches » ? Est-ce qu’elle compte me montrer le visage sans maquillage que personne n’a vu avant ? Est-ce que ça a une implication profonde ?

Mon stress avait atteint le niveau critique quand Argo s’exclama avant d’écarter son corps du mien :

« …Finalement, je vais te donner une autre information ! Je vais te parler de la compétence cachée de cet étage !! »

Argo écarta son visage de mon dos et passa devant moi. Heureusement ― c’est comme ça qu’il faut le voir ― les moustaches étaient encore clairement sur ses joues. Juste avant que son visage ne quitte mon dos : « Ki-bou, espèce de lâche », j’avais eu l’impression d’entendre un truc comme ça ; mais ça devait être mon imagination.

La Ratte, qui avait totalement retrouvé son usuelle expression effrontée, dit en croisant les bras :

« J’ai dit que je te donnerai n’importe quelle information donc je vais tenir ma promesse-yo. Mais, Ki-bou, tu dois aussi me promettre une chose-shiro. Peu importe le résultat, ne me le reproche pas-na ! »

« …A l’instant, tu as aussi dit ça à ces ninjas. Mais, qu’est-ce que ça veut dire ? Si tu vends une information sur une compétence additionnelle que personne ne connait, on aurait plus tendance à t’en remercier qu’à t’en vouloir, non…? »

A ma question, la Ratte eut un large sourire.

« Avant de donner ma répondre, je vais devoir prendre la tienne en guise de paiement-yo, Ki-bou. »

J’ai laissé s’échapper un soupir tout en acquiesçant.

« Très bien, je promets. Je jure devant dieu…non, devant Cardinal-sama que, peu importe ce qui arrive, je ne t’en voudrai pas. »

J’allais devoir juger par moi-même du danger vital ou non de la quête d'obtention de la compétence additionnelle. Après avoir entendu mon serment, Argo acquiesça vivement.

« Maintenant, suis-moi-na. »

Puis elle se retourna.

Le chemin que nous avons suivi à partir de là me donna l’impression qu’il nous serait impossible d’avancer à moins d'avoir acheté au préalable une carte ou d'avoir un stock illimité de curiosité et d’endurance. Nous avons escaladé les falaises des montagnes tabulaires rapprochées du vaste―le diamètre devait être semblable à celui du 1er Étage―2ème Étage, avons pénétré dans une petite grotte et glissé le long d’un ruisseau souterrain comme si c’était un toboggan. Nous nous sommes battus à trois reprises mais les ennemis n’étaient pas difficiles pour moi qui avais augmenté mon niveau jusqu’à la limite afin de battre le boss du 1er Étage. Le voyage dura en tout une trentaine de minutes.

A en juger par notre position sur la carte globale, nous étions arrivés près du sommet d’une imposante montagne, sur le bord sud du 2ème Étage. Nous étions dans une petite clairière entourée de falaises, avec une source et un arbre solitaire, et puis…une petite hutte avait été construite ici.

« …C’est ici ? »

Argo acquiesça à ma question inutile avant de marcher en direction de la hutte sans hésiter. Apparemment, il n’y avait encore aucun danger à ce stade. Elle ouvrit alors la porte avec force.

Il y avait un PNJ à l’intérieur ainsi que quelques meubles. C’était un grand homme d’âge mûr au corps bien bâti. Son crâne était chauve et lisse et, autour de sa bouche, se trouvait une barbe épaisse. Au-dessus de sa tête se trouvait un symbole [?] doré, indiquant le point de départ d’une quête.

Devant mon regard interrogateur, Argo acquiesça à nouveau.

« Ce type est le PNJ qui donne la compétence additionnelle « Arts Martiaux »-yo. C’est là que s’arrête l’information que je peux te donner. Que tu acceptes ou non cette quête, c’est ta décision-na. »

« …A…Arts martiaux ? »

C’était un nom que je n’avais jamais entendu pendant la période des bêtatests. Argo dit :

« Voici un bonus. »

Avant d’ajouter des informations supplémentaires :

« « Arts Martiaux » est une compétence qui permet d’attaquer à mains nues…c’est mon hypothèse. Elle s’activerait quand on laisse tomber son arme ou quand elle atteint sa limite de durabilité-na. »

« O…Oh…alors ça serait utile, contrairement à « Méditation ». Dans ce cas… Je vois, c’est donc pour ça que tu t’es retrouvée coincée là-bas avec ces ninjas… »

A Argo, qui avait un point d’interrogation inscrit sur le visage, j’ai aussi dit en préambule : « Voici un bonus » avant de lui expliquer :

« Quand on parle de ninjas, normalement, on les imagine armés de katanas de ninjas et de shurikens, mais c’était un peu différent dans l’industrie du jeu. Ôter la tête avec une seule attaque à mains nues. C’était ça le summum du style de jeu des ninjas pendant longtemps. Donc Kotarou et Isuke voudraient cette compétence « Arts Martiaux » pour « compléter leurs ninjas ». …Non, mais…attends une seconde. Ils ne connaissaient pas cet endroit, alors comment étaient-ils au courant du contenu de la compétence « Arts Martiaux » et du fait que tu connaissais cette information ? »

« Voici le bonus du bonus-yo. Juste avant la fin des bêtatests, cette information a été révélée par un PNJ du 7ème Étage, à propos du « maître des arts martiaux du 2ème Étage »-da. Mais, pour ma part, je l’avais découverte bien avant ça-na. Ces ninjas ont dû en entendre parler par le PNJ du 7ème Étage pendant les bêta-sa. Et, depuis que cette version officielle a été lancée, ils n’ont pas arrêté de me demander de vendre l’information sur la compétence additionnelle du 2ème Étage-da. »

« A…alors, pourquoi n’as-tu pas dit : « Je ne sais pas » dès le départ ? Comme ça ils auraient arrêté de t’embêter… »

A ma question attendue, Argo fit un visage bizarre et dit :

« …Ce simple « Je ne sais pas » détruirait ma fierté de vendeuse d’informations. »

« …Donc tu as choisi de dire « Je sais mais je ne la vendrai pas », hein. Eh bien…ce n’est pas comme si je ne comprenais pas tes sentiments… »

Tout en soupirant j’ai à nouveau regardé le PNJ, configuré pour être assis sur un tatami au milieu de la hutte dans une position de méditation zen.

« …Et tu ne veux pas vendre parce que l’acheteur va t’en vouloir. Mais, même si tu dis ça, tu as déjà beaucoup d’ennemis à cause de tes affaires, non…? »

« En général, les gens oublient de m’en vouloir de leur avoir vendu des informations à peine trois jours après-da ! Mais avec ce type c’est différent-da ! Même si ça s’avère foireux, tu auras quand même à le garder à vie-yo… »

Voyant le petit corps tremblant d’Argo, je fus perdu pendant plusieurs secondes avant d’acquiescer.

« De toute façon, je savais déjà que je devrais en faire moi-même l’expérience. Donc, c’est bon, je promets. Peu importe le résultat, je ne te le reprocherai pas, Argo. »

Puis, je suis entré dans la hutte et me suis tenu devant le vieil homme assis en position de méditation zen. Le vieil homme, vêtu d’une robuste tenue Tao, me regarda avant de dire :

« Tu veux devenir un disciple ? »

« …Oui. »

« Même si la voie de l’entrainement est longue et raide ? »

« Je n’en attends pas moins. »

Après une courte conversation, le [?] au-dessus de la tête du vieil homme devint un [!]. Le registre dans mon champ de vision indiqua que la quête avait été acceptée.

Le vieil homme, devenu mon maître, sortit de la hutte et se dirigea vers un immense rocher au fond du jardin entouré de falaises. Il faisait environ 2m de haut pour un diamètre d’à peu près 1m50. Le maître donna un léger coup de poing dessus puis dit tout en caressant sa barbe de sa main gauche :

« Tu n’as qu’une chose à faire pour ton entrainement : trancher ce rocher en deux en n’utilisant que tes paumes. Une fois que tu auras réussi, je te livrerai tout mon savoir. »

« …A…attendez un peu… »

J’ai tapoté légèrement sur l’immense rocher, me sentant un peu nerveux face à ce développement inattendu. Vu que j’étais habitué au jeu, mon sens du toucher pouvait m’indiquer le degré de durabilité de la cible. La sensation de dureté transmise à ma main était juste à un doigt de celle d’un « Objet Immortel ».

Ouais, c’est impossible.

J’ai tiré cette conclusion et me suis tourné vers le maître pour annuler la quête. Cependant, avant que je ne puisse le faire…

« Jusqu’à ce que ce rocher soit tranché, quitter cette montagne t’est interdit. Et la démonstration devra se faire en ma présence. »

Le maître lança cette réplique et attrapa des objets étranges au niveau de la poitrine de sa tenue Tao. Dans sa main gauche se trouvait un petit pot et, dans sa main droite…un épais et élégant…pinceau d’écriture.

Mauvais pressentiment. Un mot écrit avec une police 3D flotta au-dessus de ma tête tandis que le mauvais pressentiment me traversait tout le corps.

Heu…heu…je veux abandonner !

Avant que je ne puisse dire ça, la main droite du maître se déplaça à une vitesse impressionnante. La pointe du pinceau plongea dans le pot puis un tas d’encre…*Zubazubazuba…!* explosa sur mon visage.

A cet instant je compris le secret derrière les moustaches d’Argo.

Elle avait découvert le vieillard au début des bêtatests et avait accepté la quête. L’ayant acceptée, on lui avait dit de trancher le même rocher et, au même moment, le graffiti avait été inscrit sur son visage. Ces…trois moustaches sur chaque joue.

« Ou…ouhaaaa !? »

J’ai poussé un cri pathétique en me penchant en arrière et j’ai croisé le regard d’Argo qui se tenait légèrement en retrait. Elle exprimait une tristesse et une compassion profondes…mais, au même moment, l’expression sur le visage de la Ratte semblait indiquer qu’elle essayait de retenir une envie pressante d’éclater de rire.

Je me suis empressé d’utiliser mes deux mains pour essuyer mon visage après l’attaque au pinceau. Cependant, l’encre semblait être du genre à sécher super vite vu que je ne réussis pas à mettre quoi que ce soit sur mes mains. Le maître me regarda avant d’acquiescer et lança les mots choquants que j’attendais :

« Cette « marque » ne peut être retirée qu’une fois ce rocher tranché et ton entrainement achevé. Je crois en toi, mon disciple. »

Puis il rentra dans la hutte et disparut derrière la porte.

Je suis resté figé comme ça pendant environ 10 secondes avant de regarder Argo, qui avait encore une expression ambigüe, et de demander :

« Je vois… Argo, tu as accepté cette quête pendant la période des bêtatests…et abandonné l’idée de la finir, n’est-ce pas ? C’est pour ça que tu as dû continuer à jouer avec ces peintures sur ton visage jusqu’au dernier jour des tests. Et, en conséquence, ça a lancé le personnage de la « Ratte », la vendeuse d’informations ; et, pour ton commerce dans la version officielle du jeu, tu as choisi de continuer d’utiliser ce maquillage…c’est ça ? »

« Excellent ! C’est un excellent raisonnement-yo ! »

Tout en tapant des mains, la Ratte continua :

« N’est-ce pas génial-na, Ki-bou ! En conséquence, tu as obtenu à la fois l’information sur « la raison derrière les moustaches » et l’information sur « la compétence additionnelle »-na ! Pour fêter ça, je vais encore te dire une chose-yo. Ce rocher…c’est un démon-dayo ! »

« …C’est ce que je me disais… »

Tout en me retenant de m’effondrer par terre, j’ai parié sur un petit rayon d’espoir en demandant à Argo :

« …Hé. Est-ce que le truc sur mon visage ressemble à tes moustaches ? »

« Hum, c’est plutôt différent-na… »

« Oh…à…à quoi ça ressemble !? »

Peut-être que ce n’est pas trop visible ? Ou, si c’est visible mais assez classe, alors je peux encore retrouver mon quotidien malgré la marque. Argo passa 3 secondes à regarder mon visage―je n’avais pas assez de courage pour regarder mon propre reflet dans la source―avant de dire :

« Oh, c’est ça-na ! Je peux le dire en un mot…c’est « Kiriemon »-na. »

Là, ayant apparemment atteint ses limites, Argo tomba par terre, ses deux pieds gigotaient tandis qu’elle se roulait dans tous les sens.

« Nyahahaha ! Nya…hahahahaha !! continua-t-elle irrésistiblement à rire. Éternellement, éternellement… »


Je me suis isolé dans la montagne pendant trois jours et trois nuits. Au bout du compte, j’ai réussi à trancher le rocher au prix d'une longue lutte. Heureusement que j’avais promis de ne pas en vouloir à Argo.


Fin


Notes de traduction[edit]

  1. Une montagne tabulaire est une montagne à sommet plat peu vallonnée.
  2. 2.0 2.1 Iga et Koga étaient les deux écoles les plus célèbres de ninjas du Japon.


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