Editing Sword Art Online:Concerto Monochrome (section)

=== Partie 1 ===

Au 1er Étage d’Aincrad, il n’y avait pas de thème. Pour ainsi dire, c’était du « tout compris ». Prairies, forêts, l’étendue sauvage, la vallée avait une grande variété de terrains. Hors de la ville principale, il y avait de nombreux petits villages. Ce RPG d’heroic fantasy avait de multiples ambiances excitantes pour accueillir la venue des joueurs… Mais, dans une situation de « jeu de mort », rares étaient les personnes qui profitaient tranquillement du paysage.

Vint alors le 2ème Étage qui rompit avec le pot-pourri d’heroic fantasy pour constituer un thème. L’étage tout entier était constitué de montagnes stratifiées recouvertes d’herbe verte. Les monstres qui apparaissaient étaient à présent de type animalier. C’était peut-être parce que le 1er Étage était difficile, mais la difficulté n’augmentait pas au 2ème Étage. Au lieu de cela, il dégageait une atmosphère détendue, comme celle d’un pâturage. Et une majorité de joueurs l’appelait l’« Étage des Vaches ». Je ne devrais pas avoir besoin d’expliquer pourquoi.

Et, à présent… Il y avait le 3ème Étage encore vierge.

Tout en gravissant l’escalier en spirale qui connectait la zone du boss du 2ème Étage à la ville principale du 3ème Étage, je me suis dit à moi-même en serrant mon poing droit :

« Dans un sens, on peut considérer que c’est ici que SAO commence… »

Même si ce n’était qu’une phrase pour me motiver, une voix me répondit en chuchotant :

« Vraiment ? Pourquoi tu dis ça ? »

Dès qu'elle m'a posé cette question, je me suis gratté la tête et j'ai répondu :

« Eh bien…à partir du 3ème Étage, de vrais monstres humanoïdes vont commencer à apparaitre. Le Kobold et le Taureau du 1er Étage n’entraient que dans la catégorie des moitiés d’humains, des « Demi-Humains », capables d’utiliser de simples techniques d’épée mais ayant une apparence extérieure de monstre, n’est-ce pas ? Cependant, à partir de maintenant il y aura beaucoup d’ennemis dont l’apparence extérieure ne sera pas différente de celle d’un humain. Sans la couleur du curseur, il serait totalement impossible de les distinguer. Bien entendu, ils seront capables de tenir une conversation comme les PNJ et leurs techniques d’épée seront aussi d’un très haut niveau. En d’autres termes… »

J’ai tourné la tête et regardé par-dessus mon épaule pour faire face à la rapiériste Asuna avant de dire :

« …C’est ici que le prologue de Sword Art Online se finit. L’homme qui nous a enfermés là, Akihiko Kayaba, a dit dans une interview pour une édition spéciale d’un magazine : « « Sword Art Online » est l’endroit où les techniques d’épée s’entremêlent, écrivant une mélodie de lumières et de sons, un concerto de vie et de mort »… »

« …Oh… »

Même si elle écoutait la phrase qui m’avait excité deux ans auparavant, Asuna n’eut même pas l’air touchée. Elle continua à gravir l’escalier à son allure régulière et haussa doucement les épaules avant de dire une chose à laquelle je ne m’attendais pas :

« …A l’époque de cette interview, Kayaba avait déjà prévu ce crime… »

« Eh…ah, maah, bien sûr… Ça devrait être le cas. »

Un jour, un mois et une semaine auparavant, devant 10 000 joueurs rassemblés de force sur la place centrale, Kayaba avait dit cela :

« Créer et regarder ce monde est la seule raison pour laquelle j’ai conçu le Nerve Gear et SAO. Et, à présent, tout a été réalisé. »

A supposer que ces mots étaient vrais, même avant d'envisager SAO, avant même de dessiner le contour du Nerve Gear, Akihiko Kayaba avait déjà prévu ce crime monstrueux. Dans les quelques interviews qu’il avait données, ses mots, capables d’impressionner mon jeune―pour être précis, d’il y a un an―cœur, avaient un double sens. Me faisant face alors que je venais d’apprendre ce fait, Asuna dit doucement :

« Un concerto de…vie et de mort. Est-ce que ça ne fait vraiment référence qu’aux joueurs qui croisent le fer et leurs techniques d’épée contre les monstres humanoïdes ? »

« Hein… Qu’est-ce que tu veux dire…? »

J’ai tassé mon cou. Continuant à regarder en arrière tout en montant les « marches entre la zone de labyrinthe et l’étage supérieur ». Comme le design des escaliers était, en gros, toujours le même―période des bêtatests comprise―, j’avais gravi ces marches une dizaine de fois. Seuls les reliefs sur les murs noirs étaient différents ; ceux-ci, après examen rapproché, concernaient le thème et le paysage de l’étage suivant. Mais j’étais trop occupé à me concentrer sur Asuna'''(!<!—Note : L’anglais dit « le corps d’Asuna ». J’imagine qu’en japonais il y a une figure de style basée sur « les reliefs »/« le corps » mais ça donne une image erronée en français. -->)''' pour le moment.

L’expression de la rapiériste devint plus sérieuse et elle se dit à elle-même à voix basse :

« Peut-être que je surinterprète… Ce concerto, ce n’est pas vraiment de la musique créée par une paire d’instruments de musique. Si c’était joué par une paire, « duo » serait plus approprié. »

« Alors… Le véritable sens du « concerto » c’est…? »

« Au cours du temps, le sens a peu à peu changé mais, en gros, c’est la musique d’un orchestre ou de plusieurs instruments accompagnant un soliste, un instrument de musique seul… En d’autres termes, il ne s’agit pas d’un « un contre un » mais d’un « un contre une multitude », ou devrais-je dire, c’est la musique que produit un petit groupe opposé à un grand. »

« Un contre…une multitude… »

J’ai répété la phrase à laquelle je réfléchissais en silence, envisageant de dire : « Dans ce cas, c’est comparable à un  joueur affrontant un groupe de monstres, non ? » …Mais j’ai à peine ouvert la bouche pour le dire que je l’ai refermée.

En d’autres termes, « un joueur contre une multitude »… Une scène de combat à un contre, par exemple, dix monstres ou plus était impossible. C’était le cas parce qu’il n’y avait pas de magie capable de détruire une zone donnée et une technique d’épée de longue portée ne pouvait qu’attaquer dans la portée de l’arme. En conséquence, dans SAO, être encerclé par des monstres équivalait à une mort instantanée.

Bien entendu, le design du jeu avait été fait en fonction de cela car la plupart des monstres étaient seuls ou, au plus, deux ou trois apparaissaient en même temps. S’ils n’étaient pas intentionnellement rassemblés ou tant que le joueur ne mettait pas accidentellement le pied sur un piège, jamais un joueur ne se retrouverait dans une situation où il aurait à combattre une multitude… De plus, même si ça arrivait, il essayerait de s’enfuir de toutes ses forces.

« …Dans ce cas, une bataille en forme de concerto n’arrivera jamais dans ce monde. Si tu veux insister là-dessus, ça se limiterait aux combats contre les bosses… Mais ce serait un combat contre un boss conçu pour un groupe de raid. »

Asuna me regarda hausser les épaules et m’efforcer de sourire avec l’air de vouloir dire quelque chose mais elle n’ouvrit pas la bouche. Peu après, elle se mit à sourire et acquiesça.

« Oui, je surinterprète peut-être… Nous ne devrions pas parler de ça, n’est-ce pas, Kirito-kun ? »

« Hein ? Quoi ? »

« …Rien, c’est déjà fini. »

Après avoir entendu ça, ma tête, qui était tournée, frappa le haut de l’épaisse porte en pierre.

« Ouch… »

Faisant un bruit qu’on ne me penserait pas du genre à faire, j’ai secoué mes deux bras en même temps pour éviter de tomber suite à un faux pas. J’avais gravi une marche qui n’existait pas. Cependant, je n’ai pas retrouvé l’équilibre et, à ce moment-là, plutôt que de tomber en avant et de frapper Asuna, pourquoi ne pas tomber en arrière ?

A cet instant, j’ai essayé de m’appuyer sur la porte qui s’était ouverte sans que je le sache, j’ai crié « Ouaaah » tout en passant la large porte et en tombant magnifiquement sur les fesses sur le sol en pierre couvert de mousse. Ce fut la mémorable « première empreinte » sur cet étage vierge.


Aincrad, 3ème Étage.

Le thème conçu pour cet étage était « forêt ». Cependant, contrairement aux environs du village Horunka du 1er Étage et à la forêt de la région sud du 2ème Étage, l’échelle était d’un tout autre niveau. En effet, même le plus petit arbre avait un tronc d’un diamètre de 1m et les arbres les moins hauts faisaient 30m. Parler de « larges arbres » pour les décrire était inapproprié car on pouvait voir les vieux arbres s’étendre sans fin vers les cieux. Les rayons dorés qui passaient entre l’imbrication de feuilles et les branches, illuminaient les terres, leur donnant des airs de territoire d’heroic fantasy.

« Wow…! »

A côté de moi―qui endurais la douleur au niveau de mon coccyx―Asuna s’exclama d’un ton joyeux et passa précipitamment la porte. Toujours à terre, je me suis tourné de 80°, suivant sa silhouette de mes yeux. Asuna s’arrêta non loin de moi et tourna encore et encore sur elle-même sous les rayons fins du soleil, ayant l’air d’apprécier énormément le paysage de cette forêt qui semblait s’étendre à l’infini.

« C’est super… Rien qu’à voir ce paysage, j’ai l’impression que tous mes efforts pour monter jusqu'ici n’ont pas été pour rien. »

La rapiériste, habituellement équipée d’une cape à capuche, avait baissé sa capuche de telle sorte que les rayons du soleil se réfléchissaient de manière aveuglante sur sa belle, fine, lisse, longue et luisante chevelure châtain jusque dans mes yeux. Son corps mince et sa beauté froide faisaient penser aux joueurs qu’elle n’était pas une joueuse mais une fée des bois.

« …Ce n’est vraiment pas pour rien. »

Après avoir doucement dit ces mots, je me suis levé. Ôtant mon manteau en cuir, je me suis mollement étiré. Je ne savais pas du tout si c’était ou non une illusion mais l’air était empli d’une douce odeur. L’essence d’un nombre important de plantes… C’était peut-être ça la cause.

J’ai jeté un coup d’œil derrière-moi. Encerclée par les racines d’un arbre gigantesque, se trouvait une structure en pierre. Nous venions juste de quitter son ouverture sombre après notre ascension. Les autres membres du raid allaient probablement sortir d’ici dans une dizaine de minutes.

« …Ensuite… »

Même si nous étions au 3ème Étage… Nous avions encore à décider ce que nous allions faire à partir de là. Bien entendu, sur ce nouvel étage nous allions encore faire les mêmes choses qu’à l’étage précédent ; c’est-à-dire nous rendre à la ville principale pour acheter des objets, obtenir des quêtes et combattre pour augmenter notre niveau. Cependant, avant ça, j’avais une chose à confirmer.

Après avoir décidé ça, j’ai rejoint Asuna et, vu qu’elle profitait encore du paysage, j’ai commencé par me racler légèrement la gorge pour la prévenir de ma présence puis j’ai ouvert la bouche :

« Hé, je suis désolé de troubler ta bonne humeur… »

« …? Quoi ? »

La rapiériste m’adressa un sourire rare, j’ai donc levé ma main droite et étendu mon index pour guider son regard vers le nord. Depuis la structure en pierre derrière-nous s’étendait une route ancienne. Il y avait une jonction en Y au milieu du chemin à environ 20m de nous.

« En suivant la route vers la droite, on rejoindra rapidement la ville principale. En suivant la route vers la gauche on trouvera une forêt qui, après un certain temps, nous conduira au premier labyrinthe de cet étage. »

« …Hum. »

« En règle générale, nous devrions nous diriger vers la ville principale pour activer la porte de téléportation. Mais laissons faire les groupes de Lynd et Kibaou qui sont à nos trousses. »

« …Hum. »

« La raison c’est que je ne veux pas les croiser et qu’il y a une quête que je dois achever dans la forêt à gauche. Cependant, ce sont deux raisons personnelles… »

Arrivé là, le sourire de la rapiériste s’effaça peu à peu. Inversement, ses pupilles émirent un rai de lumière dangereux. A partir de là, si je disais la mauvaise chose, l’humeur d’Asuna allait se gâter ; mais, même si je pouvais le percevoir, je ne pouvais malgré tout pas trouver de plan pour l’éviter.

« …Donc ? »

Sous l’insistance de cette voix sinistre, j’ai poursuivi, la tête baissée de peur et d’appréhension :

« …C’est… Nous avons probablement besoin de nous réapprovisionner et de faire la maintenance de nos armes. Si tu veux te rendre à la ville principale, je pense qu’on peut dissoudre notre équipe… Bien entendu, si tu veux venir avec moi le temps que je finisse ce que j’ai à faire dans la forêt, ça ne…me dérange pas… »

« Pas-en-vie. Je ne comptais pas ne pas dissoudre notre équipe de toute façon. Toi et moi on est tous les deux des joueurs solos, non ? »

« Ou…oui. »

« Cependant, la chose que tu as mentionnée, ça doit être un truc comme : « celui qui finit en premier obtient un avantage », non ? Dans ce cas, je viens avec toi car je déteste le manque d’efficacité. Bien entendu, si tu veux dissoudre l’équipe et me laisser en plan pour monopoliser seul tous les bénéfices, je ne peux qu’être d’accord avec toi. »

« Je…je n’oserais pas, je n’ai jamais envisagé la monopoliser, même pas un peu. En fait, plus on est, plus ce sera efficace. »

« Dans ce cas dépêchons-nous d’y aller. Ça ne posera pas problème si on se réapprovisionne et qu’on fait la maintenance de notre équipement plus tard. »

« Oui, ok. »

La rapiériste se tourna et ses pieds se mirent à battre bruyamment tandis qu’elle commençait à marcher. Je l’ai suivie et l’ai rattrapée en restant derrière, ressentant dans mon cœur l’impression mystérieuse d’être « passé de justesse ». Je ne comprenais même pas les conditions de « passage ».

''Vraiment, si j’avais su que ça allait arriver, j’aurais eu plus d’interactions avec les filles de ma classe…'' Tout en me disant ça, j’ai grogné pour me contredire. Si j’avais eu une telle capacité au collège, je ne me serais pas faufilé dans SAO cinq secondes après le lancement officiel du jeu. En d’autres termes, ce genre de situation, « marcher aux côtés d’une rapiériste capricieuse », ne serait pas arrivé, ai-je raisonné.

…Ayant dit cela, cette idée m’a soudain traversé l’esprit :

''En repensant au mois que je viens de passer emprisonné dans ce jeu… Dans le but de survivre…c’est-à-dire, afin de continuellement foncer et me renforcer, ai-je jamais regretté d’être dans ce VRMMO appelé SAO ?''

La plupart des gens le regretteraient. Ne pas le regretter était une capacité anormale. Cependant, peu importait combien je fouillais mes sentiments passés, même si je trouvais facilement de la peur et du mal du pays, je n’arrivais pas à trouver du regret.

J’étais peut-être une personne anormale, ou peut-être que j’étais dans une situation si effroyable qu’elle ne me laissait pas de temps pour les remords. Si c’était le dernier cas, la cause de cet état était sans le moindre doute la vaillante rapiériste qui marchait 3m devant moi. C’était parce que cette épéiste faisait tout le temps du raffut que j’étais incapable de ressentir du regret et que toutes les autres émotions négatives étaient repoussées au fond de mon esprit…

''…Non, non, non, même dans ma tête, je ne la remercierai pas.''

Ayant déterminé ça résolument, j’ai augmenté mon allure pour rattraper ma coéquipière puis j’ai marché à ses côtés.