Maria-sama ga Miteru (Français):Volume1 Chapitre3
Un Mercredi de Rêveries, un Vendredi de Bataille
Partie 1
- Qu'est-ce qui se passe, Yumi-san?
Mercredi matin, Katsura se jeta sur elle avant qu'elle n'ait eu le temps de poser un pied dans la salle de classe.
- Qu-Quoi ?
Katsura la saisit par les épaules et la poussa contre les casiers. Katsura baissa sa voix comme si elle était sur le point de commencer une conversation particulièrement diabolique et demanda.
- Il parait que tu va participer à la pièce du Yamayurikai?
- Je ne ferai que danser dans un coin, répondit Yumi avec sincérité.
- Mais ta partenaire est bien Rosa Foetida en bouton?
- Hum... et bien, oui.
- Vraiment?!
La voix de Katsura monta d'un coup de pianissimo à fortissimo[1C 1]. Le son de sa voix lui fit mal aux oreilles et sa tentative de garder leur discussion discrète échoua. Même les élèves qui n'avaient pas encore vu Yumi la remarquèrent.
- Yumi-san, gokigenyô.
- Gokigenyô, Yumi-san.
Les visages angéliques se rassemblaient en nombre. Même elles étaient effrayantes quand elles étaient si nombreuses.
C'était le même sentiment de peur qu'on pourrait avoir si un grand groupe de petites filles ou de bébés vous entouraient
- On parlait justement de toi.
- Ah-Ah bon?
L'incident de la Demeure des Roses il y a deux jours s'était répandu dans toute l'école avant la pause déjeuner du mardi, il était donc évident que l'incident du gymnase se répandrait encore plus rapidement. Il y avait eu beaucoup de témoins, dont une élève de sa classe.
- Tu peux nous expliquer?
- Tu as vraiment rejeté la demande de Sachiko-sama?
- Mais alors, pourquoi est-ce qu'on vous voit encore ensemble?
- Quelle place as-tu au sein du Yamayurikai?
- Quelle est la sœur que tu préfères?
Elles s'étaient toutes retenues jusqu'à présent, mais il semblait que le barrage qui retenait toutes les questions venait de se briser définitivement.
- Et bien...
Yumi bafouillait face à toutes les questions pressantes de ses camarades de classe.
Même si la majorité de ces élèves étaient des filles de riches familles, elles restaient bien des filles. Elles adoraient les ragots et les rumeurs du genre "xxx aime yyy". Si les rumeurs avaient concerné un club, elles ne seraient pas aussi pressées d'obtenir des réponses.
- Qu'est-ce qui s'est passé, Yumi-san? Explique-nous.
Peu importe à quel point elle voulait tout leur expliquer, c'était impossible. Il y avait trop de questions, elle avait déjà oublié les premières qu'on lui avait posées. Et si elle répondait aux questions une par une, ça n'en finirait jamais. Toutes semblaient avoir préparées leurs questions à l'avance et se fichaient de savoir comment Yumi allait se débrouiller pour y répondre.
(Qu'est-ce que je dois faire dans une telle situation?)
Elle pensa à Sachiko.
(Que ferait Sachiko?)
Sourire, sans panique ni empressement.
- Mes amies, je suis vraiment désolée pour tous ces bruits.
Être élégante était impossible, mais Yumi avait l'impression de s'être tout de même assez bien débrouillée. 75 points sur 100, si elle devait se donner une note.
- Beaucoup de choses se sont passées et je dois aider le Yamayurikai pour leur pièce. C'est pour cette raison que les membres du conseil me parlent souvent.
Elles commencèrent à reculer quand Yumi expliqua calmement la situation.
Après tout, elle n'avait rien fait de dérangeant. Rosa Chinensis et Rosa Foetida étaient gentille avec elle, Rei était sa partenaire, tout cela se produisait car c'était des personnes très gentilles, pas spécialement parce que c'était Yumi.
- Et à propos de Sachiko-sama, demanda quelqu'un dans la foule?
- Sachiko-sama ?
- Est-ce qu'elle t'a vraiment demandé de devenir sa Sœur ? Il paraitrait même que tu l'as rejeté.
Tout le monde hocha la tête en entendant la question.
- Sachiko-sama...
Sa voix se coinça dans sa gorge.
Hein ? Quoi ? Que ferait Sachiko ?
Et bien, Sachiko sourirait certainement et dirait "Je vous laisse imaginer ce qui a pu se passer entre nous deux."
Mais Yumi ne pouvait pas dire ça. Laisser imaginer, ça veut dire "imaginez ce que vous voulez". Mais ce n'était pas ce qu'elle voulait, elle ne pouvait pas répondre quelque chose comme ça.
- C'est impossible, pourquoi Sachiko-sama me choisirait-elle comme Sœur?
C'est impossible. Des larmes coulèrent sur ses joues.
- Yumi-san?!
Ses camarades paniquèrent en la voyant pleurer.
- Oh, Yumi-san. Nous sommes vraiment désolées. Nous ne voulions pas te faire pleurer... Ce n'est pas grave, tu n'es pas obligée de répondre si tu ne veux pas.
Yumi secoua la tête. Elle ne pleurait pas pour éviter de répondre.
Yumi aimait Sachiko.
Elle l'aimait encore. Et à cause de ça, son dernier lambeau de fierté avait rejeté Sachiko.
C'était trop triste, être choisie juste parce qu'elle se trouvait là. Pourquoi Sachiko ne comprenait-elle pas?
Quelle chance elle avait eu, de pouvoir simplement la contempler de loin. Si Sachiko n'avait pas su le nom de Yumi ou son visage, elle n'aurait pas pu lui offrir son rosaire. Elle n'aurait pas eu à agir contrairement à ce qu'elle voulait vraiment.
- Nous sommes désolées. Allez, arrête de pleurer, hein?
Ses camarades lui tendirent des mouchoirs et la serrèrent contre elles. Mais en cette seconde, plus que tout au monde, c'est par Sachiko que Yumi aurait aimé recevoir cette étreinte.
Partie 2
- Tiens.
Elle lui tendit une brochure. Celle-ci était reliée d'une façon simple, mais on voyait qu'un soin important y avait été accordé.
- « Cendrillon, version du Yamayurikai ».
Yumi lut le titre marqué sur la page de garde à haute voix. Ça semblait être le script de la pièce.
- C'est ça. J'ai surligné mes lignes en rose, les tiennes sont en bleu.
- Et?
- Tu dois les retenir et pouvoir les réciter, bien sûr, soupira Sachiko, exaspérée.
- Retenir...
En parcourant les pages, Yumi remarqua qu'il n'y avait quasiment que du rose, et les lignes bleues étaient rares.
- D'accord? S'il te plait, ne me fais pas toujours répéter. Si tu ne veux pas te ridiculiser le jour du festival, tu ferais mieux d'apprendre les lignes roses et les lignes bleues.
- O-Oui.
Son cœur se serra. Le rose représentait les lignes de Cendrillon. Le bleu, celles de la sœur B. Apparemment, le conseil manquait de monde, à tel point que certains devaient jouer deux rôles. Elles avaient alors décidé de donner le rôle de la sœur B à Yumi.
Quitte à jouer dans la pièce, le rôle d'une des sœurs lui convenait très bien.
- Et sinon, pourquoi est-ce que vous déjeunez...ici?
Curieuse, elle questionna avec franchise les trois premières années de la classe de la pêche. Alors qu'elle était à la recherche de Yumi après ne l'avoir pas trouvé dans sa salle de classe, elle avait été guidée jusqu'ici par Tsutako.
Yumi et Shimako s'étaient, comme hier, refugiées derrière l'auditorium pour s'échapper au club du journal.
- Et bien, Sachiko-sama...
Tsutako déchira le papier plastique qui enveloppait son sandwich.
- Il y a une raison superficielle et une raison plus profonde.
Tsutako n'était pas vraiment dans l'obligation de s'échapper au club du journal, mais elle semblait éprouver de la culpabilité à avoir laissé Yumi seule la veille. Tsutako lui expliqua la situation en détail et Sachiko laissa échapper un « Ah... » indifférent.
- Je comprends votre désir d'échapper au club de journal, mais qu'allez-vous faire quand il pleuvra ?
- On sera bien embêtées.
Tsutako, cependant, pouvait se réfugier dans sa salle de photographie quand elle le voulait et ne sembla pas trop s'en préoccuper. Shimako se contentait de tenir compagnie à Yumi, et n'avait pas de réelle raison de manger dehors.
- Il va sûrement pleuvoir demain.
- Hein?!
Yumi leva des yeux inquiets vers le ciel. Celui-ci était si bleu et ensoleillé qu'il semblait impossible de prédire le temps qu'il ferait le lendemain.
- Accepte mon rosaire. Et je me ferai un plaisir d'être interviewée à ta place.
- Vous plaisantez?
- Oh. Et bien, libre à toi de me demander quand tu le voudras.
Sachiko rit et tourna les talons.
- Ah, Sachiko-sama. Est-ce que vous voulez manger avec nous ?
Tsutako essaya de la retenir à leur côté, mais elle refusa « Merci pour l'invitation, mais je peux pas ». La réponse n'était pas surprenante ; elle aurait dû faire le chemin jusqu'à sa salle de cours pour récupérer son bentô puis à nouveau pour revenir ici si elle avait accepté de manger avec le groupe.
- Je voulais lui parler de la photo, mais la voilà qui s'enfuit...
- On n'y peut rien. Sachiko-sama n'aime ni les sakuras, ni les ginkgos.
- Les sakuras et les ginkgos? demanda Yumi.
Si c'était le cas, le simple fait d'aller tous les jours à l'école devait être une torture.
- Oui et c'est la saison. Tout le contraire de moi.
La saison où les cerisiers fleurissaient, la saison où les noix des ginkgos tombaient. Sachiko en avait horreur.
- Allergies?
- Non, elle les déteste, c'est tout.
Cela lui sembla étrangement familier - Ce n'était pas qu'elle allait avoir des boutons, ou une réaction allergiques, elle ne voulait juste pas danser avec lui.
- Elle m'avait dit quelque chose comme « ce n'est pas bon ».
- Les fleurs de cerisier se mangent ?!
- Tu n'es jamais allée à un mariage, Yumi-san ?
Tsutako gloussa. Apparemment, dans certaines cérémonies, on buvait du thé aux fleurs de cerisier. Yumi était déjà allée aux mariages de ses cousins et d'autres proches, mais ces mariages avait été faits à l'occidentale dans une église, et il n'y avait pas eu de telles pratiques.
- On en met aussi parfois dans des petits pains à la pâte de haricot rouge.
Ces petits pains sont complètement en désaccord avec l'image de Shimako, pensait Yumi.
Shimako aimait les sakuras, les ginkgos, la pâte d'haricot rouge, les bulbes de lys.
Sachiko détestait les sakuras, les ginkgos, la compassion, les hommes.
- C'est pourquoi, dit Shimako en souriant, je suis très surprise qu'elle soit venue jusqu'ici pour te voir.
Elle aurait pu aussi bien attendre la fin des cours pour lui donner le script, mais elle s'était dépêchée pour que Yumi l'ait le plus rapidement possible. Au dos du livret, Yumi vit marqué Sachiko Ogasawara d'une jolie écriture.
Sachiko lui avait donné son propre livret.
Et en plus, elle avait surligné toutes les lignes de la sœur B.
- Ca ne lui ressemble pas.
Yumi leva les yeux vers le ciel bleu, l'esprit de la Sainte Vierge. Il n'y avait presque aucun nuage et elle se demanda comment il était possible de prédire la météo par un temps pareil.
Shimako aimait les cerisiers en fleur, les ginkgos, la pâte d'haricot rouge, les bulbes de lys.
Sachiko détestait les cerisiers en fleurs, les ginkgos, la compassion, les hommes.
Tsutako aimait prendre des photos, des photos de lycéennes et n'aimait pas vraiment le club du journal.
Et elle-même.
Elle-même aimait les sakuras et détestait les ginkgos.
Et.
Elle pensa que cette Sachiko - qui faisait ces choses si inattendues - n'en était que plus attirante par cela.
- ↑ Termes de musique.
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