Reina Kamisu ~ Français : Volume 2 Yukimi Mitsui
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Les voix existant dans ce monde sont toutes des lances, qui m'attaquent. Nous demeurons seuls de notre naissance à notre mort, incapables de comprendre autrui. Nous devons pourtant être en contacte avec d'autres Hommes, et ce de manière permanente. Pour fuir cela, nous n'avons d'autres choix que la mort biologique, ou sociale. J'ai beau vouloir fuir, ce monde est rempli d'Hommes, qui m'observent. C'est ainsi qu'aujourd'hui encore, je me vois forcée ma vie en collectivité. Dans cette boîte bien trop étroite plus communément appelée salle de classe, emprisonnée avec tout type d'Homme continuant de m’attaquer, je suffoque. C'est la pause déjeuné. Même dans une école pour jeunes filles de bonne famille, les lycéennes restent des créatures tout aussi bruyantes, des voix perçantes s'élèvent de tous les côtés. Perçantes, sûrement parce que les voix des lycéennes sont plus aiguës que celles des lycéens. Perçantes, telles des lances. Des rires. Ils ne me sont sûrement pas adressés. Mais je les entends. J'entends des railleries qui me sont adressées. "Son maquillage, il est étrange aujourd’hui, non ?" "Il est jamais réussit, c'est nous qui somme mal à l'aise en le voyant, pas vrai ?" "Quand on y regarde de plus près, ses cuisses auraient pas grossis ?" "Aujourd'hui en cours elle a pas mal répondu à une question ? De toute façon son accent anglais est bizarre" "Elle est vraiment nulle" "C'est sûrement une traînée" "Elle me dégoûte" "Elle me dégoûte" "Elle me dégoûte" Elles ne parlent pas de moi. Elles ne parlent pas comme ça de moi. Je ne suis pas différente des gens normaux au point que l'on dise de moi ce genre de choses. Néanmoins, mon imagination m'oblige à penser que ces critiques me sont dirigées. Arrêtez ! Ne parlez plus quand je suis là ! - Taisez-vous ! Ma voix résonne dans la classe. La classe retrouve sa tranquillité ...grâce à ma voix. Elles eurent tout d'abord l'air perplexes, puis elles se mirent à beugler de manière irréelle, voulant exprimer leur mécontentement. Comme attendue de la part des élèves de l'école Junseiwa, personne ne voulant se mettre explicitement en colère, elles parlent déjà bien plus silencieusement. Mais, il est invraisemblable qu'elles ne soient pas mécontentes. Elles me maudissent sûrement dans leur fort intérieur. Elles pensent à m'attaquer. Ainsi, je me mets dos au mur par moi-même. Je m'isole telle une personne étrangère, ne m'approche de personne, et agit de sorte à ne pas être blessée. Mais avec cette attitude, il n'y a aucune chance que je rencontre un jour quelqu'un qui me comprendrait, et qui serait là pour me soutenir, mon anxiété ne fait qu'augmenter. "Ça m'énerve vraiment" Quelqu'un élève la voix ainsi, les gens aux alentours gloussent. Mon corps se redît. C'est faux. Ils ne me le disent pas à moi. Je vous en prie, soyez plus clair ! De mon point de vue, c'est comme si tu disais "Mitsui m'énerve vraiment". Je convertit les mots ainsi. Ce n'est pas comme si quelqu'un me regardait, pourtant je me bouche les oreilles en faisant attention à ce que personne ne s'en aperçoive. Ahh, pourquoi est-ce que je suis si facilement blessée ? Pourquoi personne ne se comporte gentiment avec moi ? J'aimerais que quelqu'un me le dise. Me dise "Je comprends parfaitement à quel point tu es facilement blessée". Mais une telle personne n'existe pas. Les gens me prennent pour une fille forte et mauvaise langue, mais personne je vois celle que je suis derrière ce masque, et ils me blessent. Qu'ils en aient conscience ou non. C'est pourquoi, je regarde Kamisu Reina. Aujourd'hui Kamisu-san, mélangée au groupe de Hashigami-san et de ses amies, parle avec elles. Elle n’appartient à aucun des groupes que forment les filles, pourtant elle s'entend même avec les gens exclus comme moi, c'est une personne extraordinaire. Non, qualifier cette personne comme "extraordinaire" ne suffit pas. Je le sais. Non, tout le monde le sait. Elle ne blesse personne. De ce fait, elle ne me blesse pas non plus. Parfaite, tel un condensé de pur idéal, Kamisu Reina. Cet "idéal" qui est le nôtre ne se mélangera jamais avec le groupe de quelqu'un. Elle ne mettra jamais personne de coté. Kamisu Reina se tient d'ors et déjà telle qu'elle est, d'égal à égal en face de nous. C'est pourquoi personne n'est blessé. Si je tendais ma main vers Kamisu Reina, elle ne me sauverait pas Pourtant, elle ne se débarrasserait jamais de cette même main. C'est pourquoi rassurée, je contemple Kamisu-san. Comme je l'avais déjà remarqué, Kamisu-san me regarde. S'il avait agi d'une autre personne j'aurai détourné le regard, mais c'était elle qui ne me blesse pas, ainsi je laissais nos regards se croiser le temps d'un court instant. Après quoi Kamisu-san rit avec élégance. Ahh, elle est magnifique. Cela suffit à me donner l'impression d’être comme réaffirmée.
Mais soudainement- A l’intérieur de cette tête qui est la mienne, s'infiltra un corps étranger de la taille d'une pierre. C'est une pierre. Elle s'agite dans ma tête, roule doucement, blessant mon cerveau. Je dois l'expulser. Expulser quoi ? L'humain qui a mis cette pierre dans ma tête. C'est, cette personne est- ...hein ? Pourquoi ? Je veux dire, cette personne constitue la seule existence qui ne doit pas devenir mon ennemie- Non, c'est justement ça, la preuve qui la différencie le plus des autres personnes. Mais ça n'a rien à voir. Je me fiche d'une éventuelle différence. Le problème est que, tout comme la pierre à l'intérieur de ma tête, c'est en train de devenir un "malheur". Pourquoi ?
Je continue de regarder Kamisu-san. Elle-rie-avec-élégance,-comme-à-son-habitude.
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