Stereopticon Rotation La bataille finale aura lieu vendredi

From Baka-Tsuki
Jump to navigation Jump to search

Un jeune garçon prit sa décision.
Tout se décidera vendredi.

Aux premiers abords, ça ne semblait pas être quelque chose de grandiose.
Yozora Jakuin était une jeune fille de première, et fréquentait un lycée de Tokyo. Elle était dans une classe au-dessus de celle du jeune garçon. Elle avait d'excellentes notes et était très bonne en sport. Mais ce n'était pas tout, elle savait se montrer attentionnée avec les autres, et était toujours de bonne humeur, même s’il lui arrivait parfois de prendre un air mélancolique. Autrement dit, c'était quelqu'un d'exemplaire, au point où même en fiction, on voyait rarement ce genre de personne. Bien évidemment, elle était aimée de tous.
Beaucoup d'étudiants cherchaient à conquérir son cœur, et notre jeune garçon ne faisait pas exception.
Il avait l’avantage de faire partie du même comité qu'elle, et d'être choyé comme un petit frère par la jeune fille, mais ça n'allait pas plus loin. Le jeune garçon avait envie qu'elle le voie comme un homme, qu'elle compte sur lui. Et cette envie était mécontente de la situation actuelle.
C’est donc pourquoi il s’était résolu à lui faire part de ses sentiments. À lui déclarer sa flamme.
Je me répète, mais au départ, ce n'était pas quelque chose de particulièrement grandiose. Une page douce et amère dans la jeunesse des garçons et des filles. Je n'irais pas jusqu'à dire que c'était un évènement ordinaire, mais ce n'était pas non plus une journée très spéciale.
Du moins, à cette époque-là.



- Yozora, j'ai quelque chose dont je dois te parler !
Dans un lycée rattaché à l'université Saihoku, à Tokyo. Dans le corridor du premier étage, après les cours.
Le jeune garçon appela l'élue de son cœur.
Sa détermination se refléta dans le volume de sa voix. Il attira l'attention autour de lui.
Il n’était pas au bon endroit, pas mal d'élèves passaient par ce couloir à cette heure-ci. Que ce soit les étudiants qui se rendaient aux bâtiments où se trouvaient leurs clubs, ou ceux qui partaient à la bibliothèque pour étudier. Tous ces élèves présents regardèrent avec surprise le jeune garçon.
Ce dernier ne prêta pas attention aux regards des autres. Ou plutôt, il était peut-être déjà tellement secoué qu'il n’avait plus la tête pour s’en soucier. Il fixa son regard vers la jeune fille, le visage tout rouge et les lèvres tendues.
Les étudiants autour dirigèrent leur regard vers la fille.
- ...Tu sais, Yume.
Elle se gratta les joues, devenues rouges d'embarras.
- Tu sais ce que ça veut dire TPO ?
Elle protesta sous la forme d'une question.
Après avoir réfléchi un peu, le jeune garçon leva doucement la tête.
- Time, Place et Overkill...je crois ?
Répondit-il d'une voix anxieuse.
- C'est ça, sauf le dernier.
La jeune fille poussa un long soupir.
- ...Je me suis trompé quelque part ?
- Oui, surtout pour le lieu et l'heure. C’est tellement gênant pour moi que c'est de l'Overkill.
Elle haussa les épaules.
- Enfin, c'est bien ton genre. Je n’aurais pas dû m'attendre à de la délicatesse venant de toi.
Après avoir accepté la situation, elle continua.
- ...Et donc ? De quoi tu voulais me parler ? Le genre que tu peux me dire maintenant ?
- Euh...c'est-à-dire que...j'ai quelque chose d'important à te dire, alors je me demandais si tu avais un peu de temps, vendredi...aujourd'hui, c'est un peu compliqué...
Le jeune garçon avait perdu de son enthousiasme. Il répondit maladroitement.
- Oooh... ?
La jeune fille prit un petit sourire malicieux.
- Je vois. Toi aussi. Ça me rend un peu triste.
- Hé ?
Il y avait comme de la mélancolie dans sa voix.
Mais ça ne dura qu'un instant. Elle reprit un visage enjoué.
- OK, bien, ça me va quand même. J'accepte le défi.
- Hé ?
- Vendredi, c'est ça ? Ça te va après les cours ? Tu vas peut-être devoir m'attendre un peu, j'ai mes activités de club avant.
- Ah...oui, bien sûr. Pas de...soucis...
- Et pour l'endroit ? Comme d'habitude ?
- Euh, non, je vais voir si je peux pas trouver...un endroit plus calme...
- Hmm ?
La jeune fille le regarda de plus près, comme si elle était en train de réaliser quelque chose.
- Et jusqu'à vendredi, comment je devrais me comporter avec toi ? Tu veux que je sois un peu plus nerveuse ? Ou comme d'habitude ?
- Hé...euh...bah...comme d'habitude.
- Ça marche.
Le jeune garçon sentit une petite pichenette sur son front.
- Alors on verra vendredi. T'en fais pas, je viendrais.
- O...OK...
- Donne tout, Yume. Je te soutiens.
La jeune fille laissa un sourire taquin derrière elle, et s'en alla en direction du bâtiment des clubs avec un pas un peu rapide, et ses amies qui la charriaient.
Le jeune garçon, quant à lui, resta immobile pendant quelques instants, comme s'il avait la tête vide.
- Bien joué, mon gars !
Après une grosse claque dans le dos, il reprit ses esprits.
- Vous allez clairement pas ensemble !
- T'en fais pas, je ramènerais un sceau pour que tu puisses pleurer.
- Tu peux aller te prendre un râteau l'esprit tranquille !
Ses camarades de classe étaient présents, et donnaient au jeune garçon, les uns après les autres, une tape dans son dos.
La façade du jeune garçon disparaissait peu à peu. Sa gorge tremblait.
- Haha...ha.
Et le son qui en était expulsé ressemblait à un rire.

Pourquoi ce vendredi-là.
La raison était simple. Ce jour était celui de l'anniversaire du jeune garçon. Il croyait être chanceux lors des grands moments qui avaient lieu le jour de son anniversaire. C'était une coïncidence, mais son récital d’Electone en primaire, ses matchs de foot, et l’élection au conseil des étudiants au collège. Tous ces types d'occasions avaient souvent lieu le jour de son anniversaire. En mettant de côté les résultats un peu délicats, il était toujours parvenu à donner le meilleur de lui et n’avoir aucun regret lors de ces évènements. Voilà pourquoi, pour le plus grand pari de sa vie, il choisit ce jour.
Cependant, à l’époque, ce n'était un évènement important que pour ce jeune garçon et cette jeune fille.
Un jeune garçon était amoureux, et s’apprêtait à faire part de ses sentiments à l'élue de son cœur. Ce n'était qu'une simple page de leur douce et amère adolescence. Tout le monde le voyait comme ça. Il n'y avait rien de plus. Ce vendredi n'était spécial que pour ces 2-là.
Pour les autres, ce n'était qu'un évènement amusant, comme il y en avait partout ailleurs dans le monde.

Je le dis encore, mais ce n'était pas quelque chose de particulièrement grandiose.
Du moins, à cette époque-là.



Le jeune garçon s'était réveillé bien trop tôt.
Impossible de se rendormir.
Il se leva de son lit, se changea et sortit de chez lui.
Le soleil n'était pas encore levé dans le quartier résidentiel calme dans lequel il marchait. Il entama doucement un jogging le long de la rivière. Peu à peu, la ville se réveillait, tout comme ses habitants.
Soudain, l'agitation regagna le jeune garçon une fois de plus.
- Aaaaaah, sérieux...
Il s'arrêta et se tint la tête. Il ne pouvait pas s'empêcher d'esquisser un sourire.
- Vendredi...je vais enfin lui dire...sérieux, je vais vraiment y arriver... ?
Il avait l'impression de n'avoir cessé de répéter la même chose depuis. Les passagers du train bondé du retour l’avaient regardé bizarrement. Il était conscient de devoir arrêter, mais il ne pouvait pas s'en empêcher.
Pour le moment, il pouvait sourire sans gêner qui que ce soit, il n'y avait personne dans le coin. Enfin, qu'on le regarde ou non, il devrait quand même arrêter avec ce sourire.
- Je peux le faire, je vais y arriver...
Marmonna-t-il encore.
Donne tout, Yume, lui avait-elle dit en partant. Il n'y avait pas de mots plus encourageants pour le jeune garçon. Pour lui, ce Donne tout de la jeune fille était très spécial.
L’adolescent était surexcité.
- Allez, tu peux le faire, ne la déçois pas...

Soudain, un impact.

C’était comme si le monde entier avait tremblé.
Lors des tremblements de terre normaux, le sol tremblait, et ensuite seulement, ces vibrations étaient transmises à tout ce qui touchait le sol indirectement. Le jeune garçon eut l'impression que c'était un peu différent de ces derniers. Que ce n'était pas juste le sol, mais aussi tout ce qui s’y trouvait qui avait tremblé. Tous en même temps.
La secousse ne dura pas longtemps, et elle ne fut pas non plus violente. Malgré ça, incapable de tenir debout, il tomba au sol sur le cul. Peut-être qu’il avait l’estomac retourné, car il avait une légère envie de vomir.
Le quartier aux alentours commençait à se réveiller. Qu'est-ce que c'était ? C'était une grosse secousse, où est l'épicentre… Il entendait légèrement les bruits du tumulte que le vent lui rapportait.
Au contraire, la confusion des habitants rappela au jeune garçon sa vie quotidienne.
C'était surement juste un tremblement de terre. Pendant un instant, j'ai cru que c'était autre chose, mais j'ai dû rêver. Voilà pourquoi tout le monde réagit comme ça. Une réaction on ne peut plus normale, la même que lorsqu'il y a des secousses un peu plus grosses que d'habitude, en conclut-il.
Ses pensées se redirigèrent à nouveau vers quelque chose de bien plus important pour lui.
Quand soudain, il remarqua quelque chose d’anormal.
- Hein... ?
Il laissa s'échapper une petite voix surprise.
Incapable de croire ce qu'il voyait, il cligna des yeux.
Depuis l'endroit où il était assis. De l'autre côté de la rivière, loin derrière la ville.
Quelque chose ressemblant à un mur violet et connecté de la terre jusqu'aux cieux surplombait les environs.
Cette chose ressemblait à un nuage de foudre à haute densité, mais restait silencieuse. Elle ne montrait aucun signe de déplacement ou d'expansion.
- C'est des effets spéciaux ?
Ces mots sortirent inconsciemment de sa bouche.
Mais bien sûr que non. Dans sa tête, un de ses amis lui faisait cette remarque. La CG moderne est quelque chose que l'on projette dans un écran. Pour la caler à un paysage du réel, il faut une autre technologie, la réalité virtuelle... etc., lui expliqua cet ami avec un visage triomphant.
- C'est pas ça que je veux dire.
Apparemment, il était confus. Il secoua la tête et regarda une nouvelle fois le ciel à l'Est.
Le jeune garçon voyait quelque chose de si irréaliste qu'il avait presque envie de croire à des effets spéciaux en 3D. Dans le prolongement de la vie quotidienne qu'il menait encore jusqu'à quelques minutes auparavant, cette chose n'aurait jamais dû exister.
Et, soudain, une fois encore.
Après s'être illuminé fort juste une fois, le mur violet disparut.
- ...Hé ?
Ça y est, c'est fini ? se demanda-t-il.
Maintenant que le mur était parti, il pouvait en tirer des conclusions. C'était des hallucinations ou quelque chose du genre, mon système nerveux autonome ou je ne sais quoi m'a joué une farce, car j'étais un peu trop surexcité. Une fois passée, il ne reste plus rien, et c'est normal, puisqu'il s'agit d'une hallucination, se dit-il.
- Bon sang, me faites pas peur comme ça.
Se plaignit-il, tandis qu'il regardait toujours le ciel à l'Est.
Il continuait de fixer l’endroit où était apparu le mur violet, et ce qu'il y avait aussi par-delà.
Il observait intensément l'horizon qui brillait peu à peu.
L'inquiétude que ce phénomène étrange ne soit pas fini hantait toujours son esprit. Au contraire, le sentiment que les choses étranges allaient commencer lui serrait la poitrine.
- Il y a quelque chose…qui ne va pas…?
Et il avait raison. Il y avait bien une anomalie dans son paysage.
Dans Tokyo et sa banlieue autour, de grands gratte-ciels se tenaient les uns à côté des autres, serrés, comme s'ils ne connaissaient pas le concept d'espace. Le jeune garçon était habitué à cette vue du quotidien, où ces immenses bâtiments cachaient l'horizon. Et selon les angles, ils venaient même jusqu'à dévorer une partie du ciel.
Et pourtant.
- Il y a moins...de bâtiments ?
Au premier coup d'œil, on ne remarquait rien, puisque les bâtiments relativement proches, au premier plan, n'avaient pas changé.
Mais en regardant plus attentivement, on pouvait voir quelque chose d’étrange. Au second plan, mais visible malgré tout, on ne voyait plus les silhouettes des grands bâtiments et des tours. Il n'y avait pas de brouillard, et le soleil n'était pas non plus couché. Cependant, c'était comme s'ils s'étaient évaporés dans le ciel à l'aube.
À ce moment, le jeune garçon n’était même pas encore capable de s'imaginer ce que signifiait cette anomalie.
Au loin— un bruit assourdissant retentit. Cette fois-ci, il sentit le sol trembler. La surface de la rivière s'agita devant lui.
Bordel.
Mais qu’est ce qui y est en train de se passer ?
Je ne sais pas. Je ne sais pas, alors je ne peux rien faire. Toujours à terre, il regardait le ciel, la bouche grande ouverte.
Le bruit sourd et les vibrations gagnaient en intensité.

Le 5 juin 2002, au matin. À 6 heures, 17 minutes et 32 secondes.
Une partie de Tokyo disparu.
Les infrastructures qui s'y trouvaient. Les personnes qui s'y trouvaient. La civilisation florissante qui s'y trouvait. Tout avait été renvoyé au néant.

Un jeune garçon prit sa décision. Tout se décidera vendredi.
Dans un coin de Chiyodaku, une aire métropolitaine de Tokyo, un jeune garçon prit sa décision.
Mais ce vendredi n'arriva jamais. L'endroit où devait avoir lieu ce grand moment et la femme concernée disparurent de sa vie, sans jamais revenir.

Ce jour-là, l'adolescence du jeune garçon se termina abruptement.
Et peut-être que.
Peut-être que la période d’adolescence de l'espèce qu'étaient les terriens avait également pris fin ce jour-là.