Un Simple Sondage : Volume 2 - La Faucheuse 02

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Jeu de la Faucheuse 02 : Préparation

Partie 1

Visiblement, la femme blonde aux yeux bleus s'appelait Rachel.

Elle suivait une licence dans un collège en ville et avait entendu parler de la supervision dans la section recherche d'aide du journal.

Mais la lycéenne nommée Matsumi ne semblait pas intéressée par les situations personnelles de chacun.

— ... Hé, le mur s'est écroulé ici, dit l'homme en uniforme de travail appelé Kazakami.

Il était en train de jeter un œil dans une des cinq salles où les bombes à retardement avaient explosé.

C'était soit dû à la violence de la déflagration soit prévu depuis le début, car le mur entier s'était effondré, ouvrant la voie vers un autre espace.

Hiayama dans son tailleur tape-à-l'œil et Rachel avec sa peau bien trop blanche pour être japonaise se penchèrent pour regarder dans la pièce.

Il a bien joué le coup.

Matsumi se concentrait sur un seul participant parmi les quatre autres.

Il avait dit qu'il s'appelait Higashikawa.

Il semblait être étudiant à l'université. Cela avait peut-être été dû à la situation extrême ou alors il avait toujours été comme ça, mais son visage semblait toujours stoïque.

Il avait dit à chacun d'entre eux qu'ils devaient survivre pour se venger des organisateurs.

C'était un excellent objectif.

Et en tant que consœur participante, Matsumi n'avait aucune raison de le refuser.

Et par-dessus tout...

Les liens d'un groupe se renforcent souvent en trouvant l'intrus et en l'attaquant.

En sa qualité de lycéenne, Matsumi ne connaissait que trop bien ce processus. Ce problème pesait sur tout un chacun dans cet espace restreint connu sous le nom de vie scolaire.

Normalement, cet intrus doit d'abord être banni du groupe. Une fois qu'il n'en fait plus partie, la situation reste plus facilement sous contrôle.

Par exemple, disons qu'une école voisine est vue comme une rivale dans un examen blanc à venir ou dans une compétition sportive. La concurrence entre les titulaires va inévitablement éclater que ce soit en public ou en coulisse. Néanmoins, quand les objectifs s'étendent au-delà de l'école, cette concurrence peut s'effectuer de très bonne manière.

Désamorcer cette situation délicate avait demandé beaucoup de talents.

Même si Matsumi n'était certaine que Higashikawa était conscient de la situation qu'il avait créée.

Quoi qu'il en soit...

Matsumi se mit à penser à autre chose.

Elle ne pouvait pas nier qu'elle voulait prendre l'initiative de la conversation, mais forcer le passage dans une situation déjà établie n'allait que causer plus de problèmes.

Elle revérifia en se levant.

Si elle allait laisser tomber sa posture neutre, elle allait devoir se concentrer à ne pas être prise en grippe par le groupe.

Elle n'était pas entièrement d'accord avec le point de vue de Higashikawa et elle n'était pas prête à suivre les quatre autres jusqu'à la mort. Mais sa capacité à rester dans un groupe tendu lui disait qu'elle devait tout faire pour qu'ils ne s'en rendent pas compte.

Ils s'étaient déjà unis pour former un groupe pour s'opposer aux organisateurs. Si elle disait qu'elle préférait agir de son propre chef, elle pouvait facilement rompre l'harmonie du groupe. Dans le pire des cas, elle pouvait même être vue comme une alliée des organisateurs.

Elle jeta un regard vers Hiyama et Rachel, les autres femmes.

En apparence, elles avaient l'air d'être d'accord, mais n'avaient-elles vraiment pas réalisé les risques ? Ou peut-être que c'était le cas, mais elles s'assuraient juste que personne ne s'en rende compte comme elle ?

Elle ne savait pas vraiment à quoi elles pensaient vraiment.

Ils s'étaient officiellement alliés pour former un seul groupe, alors les autres pouvaient se mettre à la soupçonner si jamais elle essayait de sonder les autres filles.

— Qu'est-ce que tu fiches ? demanda Higashikawa, celui qui était à l'origine de la situation.

Tout en utilisant ses muscles faciaux pour créer un sourire inoffensif, Matsumi répondit :

— Attends, j'arrive.

Ensuite, elle passa la porte en métal qui avait été déformée par l'explosion et pénétra dans la pièce.

Cette dernière avait été vide depuis le début, mais l'explosion avait créé des fissures dans les murs et le plafond. De petits fragments devaient être tombés car le sol donnait l'impression d'être en désordre.

Mais une fois encore...

Un facteur majeur derrière cette impression avait peut-être été le cadavre qui avait été réduit en miettes éparpillées sur les murs et le sol.

Matsumi fit de son mieux pour ne pas regarder ça.

Le principal problème était le mur du fond.

Contrairement au reste de la pièce, le mur entier s'était effondré. Une autre zone s'étendait derrière. C'était un long couloir. Le sol en lino était plongé dans sa grande majorité dans une froide obscurité et était sinistrement éclairé par la lumière d'une sortie de secours.

C'était différent de l'école.

Elle semblait plus stérile et pourtant, elle donnait une forte impression de mort.

Oui.

— On se croirait à l'hôpital, marmonna Matsumi.

Comme personne ne donna d'avis contraire, ils devaient tous ressentir la même chose.

Les cinq s'aventurèrent plus loin.

Ce couloir avait une fenêtre. L'obscurité dehors impliquait qu'il faisait manifestement nuit. Mais il allait s'avérer difficile de sortir par la fenêtre. Ils étaient visiblement à plus de dix étages de haut.

Et...

— C'est quoi ce bordel ? Des barres de métal ? dit l'homme à la petite barbichette en uniforme de travail.

Oui.

Plusieurs épaisses barres de métal étaient soudées à l'intérieur de la fenêtre. Elles ne laissaient pas suffisamment d'espace pour se glisser entre elles et elles paraissaient trop fermement accrochées. Qui plus est, il était possible qu'elles soient piégées avec une bombe ou du courant à haut voltage.

Les barres de métal sur la fenêtre étaient en partie là pour empêcher les gens de s'enfuir, mais elles donnaient également un sentiment d'humiliation, comme des animaux en cage dans un zoo.

Hiyama pointa du doigt le couloir.

— Hé, je vois plus de barres devant.

— ... Quoi ?

— C'est un asile psychiatrique ?

On voit de temps en temps des hôpitaux équipés de barres de métal dans des films ou des séries télé. Mais une lycéenne comme Matsumi ignorait totalement si les véritables asiles étaient effectivement pourvus de ce genre de barres inhumaines.

Cependant, cela lui fit penser à quelque chose.

Elle se rappelait d'une certaine expression qui avait récemment fait la une des tabloïds et dans les publicités accrochées dans les métros.

— ... Ce serait le fameux Hôpital de l'enfer ?

— Ugeh ?! Pas ça... rouspéta Kazakami avec un regard manifestement contrarié.

Néanmoins, il devait également penser à quelque chose d'autre :

C'était une idée que les organisateurs de ces attractions mortelles allaient trouver absolument alléchante.

Higashikawa essuya la sueur sur son sourcil et dit :

— C'était quoi ça déjà ? Un bâtiment qui accueillait des enfants qui refusaient d'aller à l'école en prétendant les aider à retourner dans la société ? Mais ils se retrouvaient en réalité dans un hôpital avec des barreaux et y étaient torturés en guise de réhabilitation, c'est ça ? Ils ignoraient les situations personnelles des gamins et ont supposé qu'ils avaient abandonné les cours par immaturité.

— Une institution d'experts médicaux les soutenaient, alors les parents des gamins ont rien soupçonnés. J'ai entendu dire qu'au moment où les autorités se sont rendu compte de ce qui se passait, le groupe avait tellement perdu la tête qu'il avait insisté pour dire que les enfants dormaient alors qu'ils étaient momifiés dans leurs lits. Je me demande bien jusqu'où cette histoire est vraie.

Matsumi ne possédait que les informations issues des tabloïds, mais une version de l'histoire prétendait que les enfants qui faisaient des erreurs étaient punis de façon spécifique : ils étaient tirés jusqu'au bloc opératoire, se faisaient ouvrir le crâne et subissaient une lobotomie.

Elle ignorait ce qui était vrai, mais ça avait fait suffisamment de bruit pour laisser une marque indélébile dans l'histoire de la criminalité au Japon.

Et comme c'était apparemment une secte liée à la médecine, des rumeurs disaient également que la nourriture diététique et le boom des régimes y avaient contribué.

Néanmoins...

— On a aucun moyen de savoir si c'est vraiment l'Hôpital de l'enfer, dit Higashikawa. On a vu beaucoup de choses différentes dans ces vidéos d'attraction. Ça pourrait tout aussi bien être un bâtiment conçus par les organisateurs pour ressembler à ce fameux hôpital pour parvenir à leurs fins.

— C'est vrai.

Kazakami jeta un œil à travers la fenêtre barrée.

— Je vois pas les lumières de la ville dehors. Et c'est la mer au loin ?

Ils ne pouvaient voir que dans une direction, alors ils ne pouvaient pas être sûrs qu'ils se trouvaient sur la côte ou sur une île. Cela faisait une grosse différence sur ce qu'ils allaient devoir faire une fois s'être échappés le bâtiment.

En tous les cas, ils devaient continuer d'avancer, alors ils se remirent en marche.

Hélas, ils tombèrent sur plus de barreaux pas moins de 20 mètres plus loin. Une petite porte qui ne laisserait passer qu'une personne était là, mais bien entendu, elle était fermée.

Higashikawa regarda la petite porte.

— Faut croire que ça va pas être si facile.

— Mais y'a qu'un seul chemin ici. Y'aurait une clé cachée quelque part dans le couloir comme dans les salles ou est-ce qu'il y a cinq couloirs différents dans chacune de ces dernières ?

— Hé, regardez, dit Kazakami tout en pointant les barreaux.

Ou plus précisément, derrière les barreaux. La zone était trop sombre pour le distinguer de suite, mais un petit panneau était posé au milieu du couloir. Il ressemblait à ceux utilisés pour avertir que le sol était glissant.

Mais un petit morceau de papier avait été scotché dessus.

Des lettres particulièrement arrondies avaient été écrites au marqueur indélébile.

Elles disaient : « Gare au traître. »

— ...

— ...

— ...

— ...

— ...

Un silence désagréable s'installa entre eux.

C'était une simple phrase. Elle ne prouvait rien et ils n'avaient aucune garantie qu'elle était vraie.

Mais...

Ça craint.

Cela importait peu si c'était vrai ou non. Le simple fait de le voir là allait les semer le doute en eux quant à la possibilité d'un traître dans leur rang. Pour parler franchement, c'était une information qui ne devait surtout pas être soulevée. Une fois qu'elle s'était insinuée en eux, elle allait continuer à trotter dans un coin de leur tête même s'ils avaient beau le nier en surface. Cela allait semer la graine de la suspicion.

— Ils tentent juste de nous tourner les uns contre les autres. Leur objectif crève les yeux, lâcha Higashikawa tout en détournant le regard du panneau.

Rachel et Kazakami en firent de même.

— ...

Hiyama continua à le regarder pendant quelques temps, mais finit par pousser un soupir et fit de même que Higashikawa et les autres.

Matsumi ne copia personne en particulier, mais suivit le mouvement général de la situation et détourna également le regard.

Partie 2

En réalité, Matsumi n'avait aucun souvenir.

Elle avait ressenti la même chose à la fin de la supervision et quand elle s'était retrouvée dans une salle sombre. Tout ce dont elle se souvenait était une douleur sourde dans sa tête et les souvenirs tout autour devenir petit à petit vagues.

Néanmoins...

Contrairement aux autres, la perte de mémoire était assez conséquente.

À partir du moment où elle s'était réveillée, c'était presque 15 années qui avait disparu de sa mémoire.

La première fois, elle s'était réveillée dans un train vide.


Il n'y avait personne assis sur les longues banquettes de chaque côté du train. Matsumi semblait s'être endormie tout en étant assise sur le bord d'une des banquettes près de la porte. Au moment où elle fronça des sourcils face à cet étrange mal de tête et tenta de jeter un œil autour d'elle, elle entendit un léger bruit.

Il provenait de son cartable qui était tombé de ses jambes sur le sol.

Matsumi se hâta de ramasser le sac, mais personne ne l'avait vue. Les publicités accrochées au plafond tanguant avec les mouvements du train montraient les visages des personnes en charge du bâtiment surnommé l'Hôpital de l'enfer.

Elle ne pouvait pas se souvenir sur quelle ligne de métro elle se trouvait ou à quelle station elle voulait descendre.

Et cette simple question la mena vers de plus en plus de choses dont elle ne pouvait pas se souvenir. Une fois avoir compris que c'était le cas de sa propre adresse et même de son nom, Matsumi sentit comme un frisson parcourir son dos. Le mal de tête lancinant ne rendait sa présence que plus forte.

Comme pour tenter de calmer son cœur instable, Matsumi ouvrit désespérément son cartable et se mit à fouiller à l'intérieur.

Des cahiers et livres qu'elle trouva, elle apprit qu'elle était en première.

Elle se mit à s'inquiéter quand après avoir fouillé chaque poche, elle ne put trouver le moindre portefeuille ou carte de métro. Elle pouvait sentir le monstre dénommé panique ouvrir sa grande gueule, mais alors, elle sentit quelque chose sur sa cuisse. Elle enfonça sa main dans la poche de sa jupe pour vérifier son contenu.

Elle trouva un portefeuille rose flashy en lamé et un portable qui reflétait tout autant la lumière.

Mais quand elle ouvrit le téléphone, il demanda un mot de passe. Bien entendu, elle ignorait la réponse, alors elle était dans une impasse.

Elle se mit à fouiller le portefeuille.

Il semblait fonctionner comme un porte-cartes vu qu'il contenait une carte de métro de type magnétique. La surface montrait les stations qu'elle prenait : de Shirasagi à Kusanomine. La première devait être où se trouvait sa maison, alors elle supposait que sa maison était à Shirasagi.

Elle trouva également diverses cartes de fidélité avec des adresses à Shirasagi. Le nom sur les cartes était Shirauo Matsumi.

C'est comme ça que je m'appelle ?

Matsumi inclina la tête sur le côté mais cela ne lui semblait pas être elle.

Elle trouva également une photographie pliée à l'intérieur du portefeuille. Elle la déplia et aperçut son même visage souriant entre un homme et une femme d'âge mûr.

C'était une photo de famille. Et le fait que c'était du papier photo à l'ère des appareils digitaux semblait être le genre de choses sur lequel un vieil homme insisterait. De là, elle supposa qu'elle s'entendait bien avec sa famille et faisait ce que ses parents voulaient.

Le portefeuille contenait également plusieurs billets de 1000 yens et pas mal de monnaie. Une clé se trouvait également dans la poche pour les pièces. Elle devait ouvrir la porte de sa maison. Ce n'était pas un de ces clés à la forme unique qui étaient utilisées pour les vélos ou les scooters. Elle ne trouva aucun ticket de caisse. Elle devait être du genre à les jeter.

Rien dans le portefeuille n'indiquait son adresse exacte ou son numéro de téléphone.

Toutes ces données personnelles devaient sûrement se trouver dans son téléphone portable. Elle n'avait aucune raison d'écrire là ce qui était stocké à l'intérieur de l'appareil.

— Shirasagi. Prochain arrêt, Shirasagi. Toutes les personnes empruntant la ligne Bungaku ou la ligne côtière spéciale sont invitées à changer de train. Je répète : Prochain arrêt...

Matsumi se leva frénétiquement de la banquette en entendant la voix lente de l'annonce.

Le métro s'arrêta dans une station souterraine.

Elle descendit sur le quai, mais il était étrangement aussi désert que le train.

Elle savait que sa maison se trouvait quelque part à Shirasagi, mais elle ignorait tous les détails. Alors qu'elle se demandait quoi faire, elle se rappela soudain de la carte de métro dans son portefeuille.

Elle le sortit à nouveau pour vérifier et c'était effectivement un passe magnétique. Il était conçu pour la laisser passer les portiques en passant simplement devant le capteur.

Et il était censé contenir ses informations personnelles.

Elle suivit la flèche du panneau pour traverser le quai jusqu'aux portiques de la station. Elle se servit de son passe pour quitter celle-ci et s'approcha d'une machine pour les rechargements. Elle inséra sa carte et utilisa le menu pour accéder à la partie modification des informations enregistrées.

Son nom, adresse et contact apparurent immédiatement.

Visiblement, elle vivait dans un appartement et non dans une maison.

Mais avant qu'elle ne puisse pousser un ouf de soulagement, le visage de Matsumi se figea.

Quelque chose d'inattendu était écrit au milieu de ses informations personnelles.

Sa profession.

Du fait de ses vêtements, elle avait supposé que c'était simplement « étudiante », mais ce n'était pas le cas. Quelque chose d'autre était écrit là :

Employée en CDD

Département commercial d'Attraction Land

Partie 3

Du fait des barreaux métalliques qui bloquaient le couloir, ils ne pouvaient pas continuer. Était-ce vraiment une coïncidence si Matsumi et les autres s'étaient retrouvés là ? Est-ce que les cinq pièces étaient censées avoir un mur s'écroulant pour ouvrir la voie à cinq autres couloirs ?

Dans le pire des cas, ils allaient devoir retourner dans chacune d'entre elles et tenter de détruire les murs, sols et plafonds des quatre pièces restantes. Les cinq revinrent sur leurs pas et examinèrent attentivement le couloir. La seule lumière provenait de celle de la sortie de secours qui se trouvait de l'autre côté des barreaux métalliques.

C'était pour cette raison qu'il leur avait fallu autant de temps pour s'en rendre compte.

Il n'était pas certain que les organisateurs avaient même eu l'intention de la cacher.

— Là... dit Rachel d'une faible voix tout en tâtant le mur de façon exagérément lente par peur d'une aiguille empoisonnée ou tout autre piège. C'est une porte ?

Les autres se rassemblèrent autour d'elle.

Ils tâtèrent à leur tour le mur et c'était effectivement bizarre. Il était froid comme une tôle de métal. C'était vraisemblablement une porte comme Rachel l'avait dit.

Hélas, il n'y avait aucune poignée.

C'était rien de plus qu'un panneau en métal plat.

— C'est quoi cette porte ? Comment on l'ouvre ?

Kazakami fut le premier à exprimer la question qui les turlupinait tous.

Matsumi poussa avec ses deux mains, mais en vain.

— Et si...? marmonna Higashikawa avant de s'accroupir.

Il semblait chercher quelque chose dans l'obscurité.

Il était principalement concentré sur le sol.

— C'est bien ce que je pensais. Il y a un bouton là. Il suffit de marcher dessus pour ouvrir la porte.

— C'est un bloc opératoire ? Je pense qu'ils l'ouvrent avec un bouton sur le sol pour que les docteurs ne salissent pas leurs mains, commenta simplement Hiyama, mais alors elle sembla réaliser les poids des paroles qu'elle venait de prononcer.

Une grande tension traversa l'obscurité.

L'Hôpital de l'enfer avait partiellement hérité son nom de ce qui s'était passé dans ses blocs opératoires.

Des enfants en parfaite santé avaient été tirés de force ici, s'étaient fait ouvrir le crâne et avaient subi une opération de lobotomie du cerveau. C'était un endroit expérimental couvert de sang.

Les alentours ne donnaient pas une impression joyeuse.

Que ce soit le véritable Hôpital de l'enfer ou non, les organisateurs de ces attractions allaient ressentir l'attachement et l'intérêt le plus fort à cet endroit. À moins qu'ils étaient suffisamment cruels pour aller à l'encontre de cette conclusion évidente, ils devaient avoir préparé quelque chose ici.

— Qu'est-ce qu'on fait ?

— J'ai pas plus envie que toi d'y aller, mais on n'a pas trop le choix.

— ...

Rachel avait trop peur pour parler.

Matsumi ouvrit lentement la bouche pour parler de façon à ne pas provoquer trop de remous.

— Il y a de bonnes chances pour que ce soit un piège ou l'attraction suivante. Il faut qu'on reste sur nos gardes.

Matsumi entendit le bruit de frottement métallique.

Higashikawa devait avoir pressé le bouton près de la porte.

La double-porte s'ouvrit vers l'intérieur. Le moment d'après, les fortes lumières fluorescentes d'un bloc opératoire s'allumèrent. Ils furent momentanément aveuglés.

Matsumi mit instinctivement une main devant ses yeux et parvint à percevoir plus ou moins quelque chose en plissant les yeux.

L'intérieur était étonnamment spacieux.

Le manque d'équipement spécialisé renforçait peut-être cette impression. La salle faisait à peu près la taille d'une salle de classe. La palette de couleurs était entièrement bleu clair et les murs étaient carrelés. Le plafond était haut de deux étages environ. Les murs de l'étage supérieur étaient recouverts de vitres. Les étudiants et autres pouvaient observer les opérations de là-haut.

La table d'opération et une lampe conçue pour les opérations chirurgicales étaient installés au centre de la pièce. La lampe était un appareil constitué de plusieurs lampes individuelles.

Les deux équipements donnaient l'impression d'avoir été isolés car mis-à-part ça, le bloc opératoire était complètement vide.

— Quoi...? dit Higashikawa en pénétrant dans la salle.

Matsumi et Rachel lui emboitèrent le pas et marchaient côte à côte derrière lui.

Et soudain, une série de tonalités musicales bruyantes résonna.

— ... Oh, c'était trop fort peut-être ? Au temps pour moi, dit une voix toute aussi forte.

Ils s'étaient tous arrêtés en entendant le grand bruit.

La porte du bloc opératoire se claqua juste derrière Matsumi. Hiyama et Kazakami se trouvaient toujours dans le couloir. Rachel se rua précipitamment vers la porte, mais elle avait beau pousser et tirer, la porte refusait de s'ouvrir.

Il y avait un bouton pédale sur le sol à côté de la porte, mais il ne se passa rien quand Rachel appuya dessus.

— E-Elle veut pas s'ouvrir !!

Ils purent entendre quelqu'un marteler la porte de l'autre côté.

La voix de Kazakami cria :

— Hé, qu'est-ce qui se passe ?! Vous bloquez la porte ou quoi ?! Ce bouton vient juste d'ouvrir la porte, non ?

— ...

Matsumi inspecta silencieusement le bloc opératoire et aperçut un haut-parleur près du plafond.

Une voix féminine dit :

— Je croyais que vous alliez tous abandonner, mais visiblement, faut croire que vous en voulez encore. Ce qui veut dire que c'est l'heure de la deuxième attraction. Si vous réussissez, vous obtiendrez la clé de ces barreaux métalliques. Si vous échouez, la porte du bloc opératoire ne s'ouvrira plus jamais.

Un bruit aigu résonna.

Il provenait de l'étage supérieur.

La vitre protégeant l'espace d'observation avait volé en éclat. Il n'y avait pas tant d'éclats de verre que ça, mais Matsumi et Higashikawa firent un bond en arrière aussi grand que possible, que les éclats tombent sur eux ou non. Rachel mit plus de temps à réagir, alors Matsumi bondit sur elle et elles tombèrent sur le sol.

Une femme se tenait dans l'espace au-dessus.

Elle avait apparemment brisé la vitre avec une chaise. Elle jeta quatre objets de la taille d'un combiné de téléphone fixe à travers le trou qui était trop grand pour être qualifié de fente.

Une partie atterrit sur la table d'opération et le reste tomba à côté sur le sol.

Le corps de Higashikawa se figea en les apercevant.

Matsumi ne voulait pas les regarder.

Mais avant qu'elle ne put détourner les yeux, la femme qui avait brisé la vitre dit :

— Deux des pistolets ont une vraie balle et les deux autres sont chargés avec des balles à blanc. Deux d'entre vous vont participer. Chaque participant doit choisir deux pistolets de leur choix, se viser l'un l'autre, et appuyer sur une de leurs gâchettes à mon signal. Un jeu d'enfant.

— Espèce de dégénérée !!!!!! cria Higashikawa sans réfléchir.

Au premier abord, cela semblait être une bonne réaction, mais Matsumi sentait que les organisateurs ne pouvaient que se délecter de ce genre d'explosion de rage. La femme les avait peut-être volontairement provoqués, mais c'était également un peu tiré par les cheveux.

— Au fait, les pistolets possèdent des viseurs laser, alors on saura si vous faites exprès de viser à côté. Assurez-vous de viser le front de l'autre avant d'appuyer sur la gâchette.

Pendant un instant, le regard de Rachel passa des pistolet à la femme à l'étage supérieur.

Elle envisageait peut-être la possibilité de prendre le pistolet et tirer sur la femme.

Mais Matsumi doutait que cela puisse marcher. C'était les organisateurs qui avaient préparé ces pistolets. Ils avaient dû s'assurer qu'on ne puisse pas s'en servir contre eux.

Matsumi leva les yeux vers l'étage supérieur.

Cette femme prétendait être une employée à plein temps d'Attraction Land.

Mais Matsumi n'avait jamais eu de discussion digne de ce nom avec ces employés en question. Il était impossible de dire ce qu'était l'objectif de la femme en se jetant dans cette situation, tout comme elle ignorait si la femme la voyait comme une alliée.

Leurs regards se croisèrent distinctement.

Et elle sourit.

Puis, elle annonça :

— Les deux qui prendront part à cette attraction sont les suivants : Shirauoooo Matsuuuuumiiiiiiii !! Et Raacheeeeeellll Skyyyyyyyydaaaaaance !!

— Hiii !!

Rachel poussa un cri semblable à un hoquet pendant que son corps se tétanisa.

Matsumi grinça silencieusement des dents. Si les explosions avaient ouvert une autre voie, est-ce qu'un destin moins cruel les aurait attendus ? Néanmoins, réfléchir à des possibilités potentiellement inexistantes n'avait aucun intérêt.

— Un crêpage de chignon qu'on peut voir que le soir !! L'innocence feinte de ces filles va vraisemblablement s'effondrer, alors j'espère que tu t'es préparé à la désillusion, gamin !! Chacune de vous doit choisir deux des pistolets !!

— Non !! cria désespérément Higashikawa pour arrêter les deux filles en question.

Il avait peut-être oublié le simple fait qu'élever la voix avait tendance à taper sur les nerfs des gens dans une situation extrême peu importe l'intention derrière. Ou peut-être qu'il n'avait pas oublié et qu'il le faisait sciemment.

— Ils feraient n'importe quoi pour leur amusement. Ils ne tiendront jamais promesse. Ils ont sûrement chargé de vraies balles dans chaque flingue de façon à pouvoir se tordre de rire en voyant des idiots les prendre au sérieux !

— Non, non.

Un étrange changement survint soudain dans la voix de la femme à l'étage supérieur.

Elle était plus calme.

Elle était sinistrement sincère.

— On se conforme strictement aux règles et aux résultats des attractions. Peu importe si ça mène à une fin heureuse gnangnan où vous survivez tous.

Avant que Matsumi et les autres puissent y réfléchir ou l'analyser, la voix de la femme redevint celle qu'elle était avant.

— Mais que vous me croyez ou pas, que l'attraction commence ! Si vous mettez trop de temps, vous mourrez tous !

— Merde... jura Higashikawa malgré le fait qu'il avait lui-même échappé à l'attraction.

Maudissait-il son incapacité à empêcher ses alliés de s'entretuer ou son propre soulagement de ne pas avoir à y prendre part ?

— Si vous avez pas terminé dans dix minutes, vous serez exécutés. Tadam !! J'ai un caisson rempli de cocktails Molotov. ... Hm ? Vous le voyez pas d'ici ? Bah, je vais en jeter une tonne sur vous, alors je doute que vous puissiez en réchapper. La porte s'ouvrira pas non plus.

— Merde !!

Higashikawa fut le premier à se mettre en action.

Matsumi lui emboita le pas et s'approcha des quatre pistolets éparpillés près de la table d'opération. Rachel était assise sur le sol avec un visage complètement livide et restait parfaitement immobile.

— Il faut qu'on vérifie, marmonna Matsumi à elle-même plus qu'à quelqu'un d'autre.

Puis, elle le cria parce que cet encouragement avait immédiatement échoué.

— Il faut qu'on trouve le moyen de déterminer lesquels sont chargés avec de vraies balles et ceux avec des balles à blanc ! Si on y parvient, on saura tout de suite si les règles sont justes et le moyen de réussir cette attraction en toute sécurité !!

Tous les pistolets étaient des revolvers.

— Si on arrive à établir lesquels sont à blanc, on peut réussir sans qu'il n'y ait de mort.

Matsumi ramassa un des pistolets et essaya de retirer les cartouches, mais le cylindre ne voulait pas s'ouvrir comme elle l'avait vu dans les films.

Au début, elle pensait que c'était juste qu'elle ignorait comment s'y prendre, mais Higashikawa secoua la tête après avoir essayé avec un autre pistolet.

— Ça craint. Ils ont fait en sorte qu'on puisse pas ouvrir les cylindres.

— On peut pas vérifier les cartouches, alors on peut pas savoir lesquels sont chargés avec de vraies balles et ceux qui sont chargés à blanc !

C'étaient des revolvers, alors le cylindre était conçu pour accueillir six balles en cercle. En considérant le cylindre comme une horloge, les balles à deux heures et à dix heures pouvaient être visibles en regardant dans les trous du cylindre.

Sauf que...

— Merde, elles ont toutes l'air pareilles.

S'ils ne pouvaient pas vérifier, ils ne pouvaient pas choisir entre les quatre pistolets.

S'ils se contentaient de choisir au hasard, les chances pour qu'il n'y ait aucune victime étaient quasi nulles. Si l'une d'entre elles choisissait un pistolet avec une vraie balle, c'était fini. Et il était possible qu'une des deux se retrouve avec deux pistolets ayant une vraie balle.

Étant donné les différentes possibilités, les chances que quelqu'un meure étaient de trois sur quatre.

C'était trois fois plus important qu'à la roulette russe.

— Il reste un peu moins de sept minutes !

— ...

De l'extérieur, ils ne pouvaient pas déterminer lesquels avaient de vraies balles et lesquels étaient chargés à blanc.

Les chances étaient bien trop faibles pour se contenter de choisir au hasard.

Il devait y avoir un moyen.

Il devait y avoir un autre moyen de faire la différence entre les quatre pistolets.

— ... Attends.

— Quoi ?

— Est-ce que t'as quelque chose comme un gomme ? Et une règle !!

— À quoi bon ? C'est tous les mêmes modèles, alors mesurer leur longueur mènera à-...

— Contente-toi de répondre !! Je vais pas mesurer leur longueur !! cria Matsumi tout en regardant en direction de la table d'opération au centre de la pièce.

Plus précisément, elle regardait les quatre pieds de la table. Elle saisit une des quatre barres carrées et tira fort.

Elle était visée à la table, alors elle n'allait pas bouger.

Matsumi se tourna vers Higashikawa et dit :

— Aide-moi à retirer ce pied !!

— Pourquoi ? Qu'est-ce que tu veux en faire ?

— On a une chance si on utilise ça ! Grouille !!

Higashikawa ne se fit pas prier plus longtemps.

Il fit le tour de Matsumi et maintint la table d'opération en place pour qu'elle ne bouge pas. En travaillant de concert, la barre carrée semblait lentement se tordre. Mais c'était en fait la vis qui la retenait qui était sur le point de lâcher.

Un craquement aigu résonna.

Elle était légèrement tordue, mais la jambe avait été retirée. La table d'opération tomba diagonalement, mais Matsumi s'en ficha.

Elle retira la chaussure en cuir qu'elle portait et la posa sur le sol.

Puis, elle posa délicatement le centre du pied de la table d'opération dessus.

C'était une balançoire.

Ou...

— ... Une balance ?

— Les vraies balles et celles à blanc ne pèsent pas autant, pas vrai ? Le pistolet le plus lourd devrait être celui avec une vraie balle à l'intérieur. On pourra faire la différence en les pesant !!

— Il reste combien de temps ?! cria Higashikawa en direction de l'étage supérieur.

L'organisatrice répondit :

— Un peu moins de trois minutes.

— On peut y arriver, marmonna Higashikawa dans sa barbe

Sa voix s'éleva ensuite :

— On peut le faire. On peut réussir cette attraction sans qu'aucun de nous ne meure !!

Partie 4

Pendant ce temps-là, Rachel ne regardait pas Matsumi et Higashikawa travailler et restait assise sur le sol du bloc opératoire.

Elle regardait en direction de ses pieds.

Elle regardait l'espace séparant ses cuisses.

Rachel n'était pas simplement paralysée par la peur. Elle avait remarqué quelque chose. Quelque chose était écrit sur le sol du bloc opératoire au stylo-bille. Elle était assise alors elle pouvait le lire sans que les autres le remarquent.

Du fait de sa position, c'était difficile à lire.

Mais sa vie pouvait se jouer sur le moindre petit détail.

L'écriture arrondie disait :

Comparer les poids est un piège élémentaire, alors faites attention.

L'astuce réside dans le principe de levier.

— ... Ah.

Elle poussa accidentellement un cri et paniqua brièvement, craignant que Matsumi ou Higashikawa l'ait entendue.

Oui.

Le principe de levier.

Les balances ne fonctionnaient que quand la barre se tenait en équilibre au point d'appui au milieu. Et si ce n'était pas entièrement le cas ?

Bouger le point d'appui, qui était dans ce cas une chaussure en cuir, serait compliqué. Avec deux personnes s'attelant dessus, l'autre remarquerait facilement quelque chose.

Mais et les pistolets posés de chaque côté de la barre ?

Modifier leur position ne serait-ce que de quelques centimètres serait suffisant pour fausser la mesure. Et les pistolets chargés à blanc pouvaient être arrangés pour peser plus lourd. Contrairement à des balances classiques, il n'y avait pas de plateau. Ce n'était pas difficile d'altérer légèrement les positions des pistolets.

Autrement dit...

Si la personne faisant la mesure le voulait, elle pouvait modifier les résultats à sa convenance.

Elle pouvait fausser les résultats.

Elle pouvait tricher.

Mais elle n'a aucune raison de le faire.

Rachel nia instinctivement cette affreuse pensée qui lui avait traversé l'esprit. Les cinq travaillaient main dans la main pour survivre et mettre à mal les plans des organisateurs. Elle voulait se reposer sur cette merveilleuse idée.

Mais...

Gare au traître.

Il y avait un panneau derrière les barreaux métalliques du couloir de l'Hôpital de l'enfer. Ce puissant message surgit au plus profond de son esprit. Elle ne pouvait pas complètement réfuter cette possibilité. Elle le voulait, mais en était incapable.

Il y avait une raison.

Il y avait une raison pour laquelle quelqu'un ferait ça.

Matsumi-san pourrait me donner les deux pistolets à blanc et prendre les deux vrais pour elle. Du coup, elle survivrait peu importe le pistolet que je choisis. Mais dans ce cas, le pistolet qui me tirera dessus aura 100% de chance d'être chargé avec une vraie balle.

Les organisateurs allaient être désignés fautifs.

Ils allaient être considérés comme ayant dupé Matsumi et Rachel.

Et la colère de tout le monde en direction des organisateurs allait monter d'un cran, mais Matsumi ne serait pas bannie du groupe. Même si elle se protégeait en montant une situation qui assurait la mort de Rachel, elle pouvait aisément se défaire de la haine.

— Et voilà !! Les deux à droite sont à blanc et ceux à gauche sont chargés avec de vraies balles !!

— Vite, Rachel-san ! Finissons-en avant que cette nana dise que le temps est écoulé et nous balance des cocktails Molotov !!

Elle avait l'impression d'entendre la voix de démons.

Que devait-elle faire ?

Rachel réfléchit pendant un moment et finit par se lever lentement. Elle s'approcha du bloc opératoire pour s'assurer qu'aucun des autres ne voient le petit mot sur le sol.

Comme prévu, Matsumi saisit deux pistolets et les tendit à Rachel.

Elle ne la laisser pas choisir.

— Fais gaffe. Celui à droite est à blanc et celui à gauche chargé avec une vraie balle. ... Rachel-san, te trompe pas s'il te plaît. T'as qu'à te dire que tu tires avec ta main dominante.

— Hm…

Rachel prit lentement la parole et fit une suggestion.

— On aura toutes les deux un pistolet avec une vraie balle et un chargé à blanc, pas vrai ? On a le même équipement, hein ?

— O-Ouais. Pourquoi cette question ?

— Désolée, on peut échanger ? Ceux-là... hum... sont un peu sales.

— Ok, c'est pareil de toute façon, répondit Matsumi en tendant les deux pistolets qui lui étaient destinée à Rachel. Celui de droite est à blanc et l'autre le vrai. C'est pareil que tout à l'heure, alors te trompe pas. Tire avec ta main droite au signal. Pigé ?

— ... O-Oui.

Après que Rachel prit les deux revolvers, Matsumi saisit les deux qu'elle lui avait tendus précédemment.

Higashikawa cria en direction de l'étage supérieur.

— On a fait notre choix ! Comment est-ce qu'on commence l'attraction ?!

— Matsumi-san et Rachel-san, placez-vous contre les murs opposés. Adossez-y vous et tendez vos pistolets en direction de l'autre. En pressant le petit bouton sur le manche, le pointeur laser s'activera. Utilisez-le et visez le front de l'autre. Si vous échouez, vous mourrez tous, alors faites gaffe.

— ...

— ...

Matsumi et Rachel suivirent les instructions et se déplacèrent chacune à un bout de la pièce de la taille d'une salle de classe.

L'esprit de Rachel était particulièrement confus au moment de s'adosser contre le mur.

Matsumi avait échangé les pistolets sans hésiter.

Si l'un des lots était les pistolets à blanc et l'autre les vrais, cela aurait été suicidaire.

Est-ce que l'idée d'un traître n'était rien de plus qu'une tentative de déstabilisation des organisateurs ? Matsumi et Higashikawa avaient correctement distribué les pistolets ? Si elle faisait comme demandé et tirait avec le pistolet dans sa main droite, ils allaient réussir cette attraction sans que personne ne meure ?

Mais...

Un très mauvais sentiment fit surface du plus profond de son esprit.

Elle avait trouvé ce message écrit au stylo-bille sur le sol du bloc opératoire. Il mettait en garde contre l'utilisation par un traître du principe de levier.

Mais pouvait-elle être certaine qu'il avait été écrit par les organisateurs ?

Autrement dit...

Le regard vide, Rachel dévisagea la fille en uniforme scolaire.

Se pouvait-il que Matsumi ait écrit ce message sur le sol pendant que personne ne regardait ?

Avait-elle volontairement mis la puce à l'oreille de Rachel ?

L'avait-elle poussée à demander d'échanger les pistolets ?

Elle avait très bien pu séparer les pistolets entre ceux à blanc et les vrais et se serait ensuite donnée les faux au début.

Ses préparatifs auraient été terminés au moment où Rachel demandait à échanger les pistolets à cause de la peur suscitée par le message sur le sol.

Matsumi avait pu truquer les résultats des mesures avec l'astuce du principe de levier. Mais cela pouvait se retourner contre elle une fois que Rachel morte. Après tout, c'était elle qui avait suggéré l'utilisation de la balance, elle qui avait pris les mesures, et elle qui avait tendu les pistolets à Rachel.

Mais et si Rachel faisait une demande inattendue ?

Si on ajoutait cette coïncidence...

Personne ne soupçonnerait Matsumi de mauvaises intentions. Si Rachel n'avait pas suggéré d'échanger les pistolets, Matsumi aurait été celle qui aurait dû mourir. Elle passerait du rôle de coupable à celui de victime.

Matsumi avait attiré Rachel dans ce piège.

Et Rachel était tombée dans le panneau.

— Att-...!! cria désespérément Rachel, mais l'organisatrice lui coupa la parole.

— Que la deuxième attraction débute. Je vais commencer le compte à rebours. À zéro, chacune d'entre vous pressera la détente de son choix !!

Un sourire calme se lisait sur les lèvres de Matsumi.

Était-elle certaine de sa victoire ?

Savait-elle qu'elle était assurée de ne pas mourir ?

— Trois. Deux. Un !

Le décompte continua.

Les pistolets dans les mains de Rachel avaient tous deux l'air désespérément vides.

Elle n'avait aucune chance de gagner.

Peu importe celui qu'elle choisissait, elle ne pouvait que tirer à blanc. Matsumi détenait les deux vrais pistolets. La balle qui volerait en suivant le pointeur laser allait sûrement traverser le front de Rachel. Même si elle bougeait sa tête sur le côté au dernier moment et parvenait à esquiver la balle, les organisateurs la tueraient. Des cocktails Molotov tomberaient de là-haut et les flammes consumeraient Rachel.

Elle ne pouvait pas être sauvée.

Elle n'avait aucune chance de survie.

Le fait que les cinq survivent était le seul moyen de vaincre ces odieux organisateurs. Quand Rachel avait entendu ça, elle avait été émue, mais ça n'avait pas suffi. La malice transpirant de chacun d'entre eux avait dévoré cet idéal.

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Dans ce cas !!

Rachel serra les dents.

Elle avait des pistolets dans sa main droite et dans sa main gauche.

Elle rassembla toute son attention dans un d'entre eux.

J'ai pas envie de finir ça comme simple marionnette !!

— Zéro !!

Les bruits de deux coups de feu semblèrent lui transpercer le cœur.

Partie 5

Alors que Higashikawa regardait depuis le côté, il avait sérieusement cru que le choc allait pulvériser son cœur.

Le bruit était si fort qu'il avait pensé que quelque chose clochait avec ses tympans.

Finalement, le silence arriva.

L'organisatrice à l'étage supérieur dit :

— Sur ce, la deuxième attraction touche à sa fin. J'espère que les survivants apprécieront les attractions suivantes.

La silhouette à l'étage du dessus jeta un petit objet à travers le trou béant dans la vitre brisée. Il brillait d'un éclat argenté et tinta comme une pièce en atterrissant, alors c'était sûrement une clé. Ce devait être la clé de la porte en barreaux métalliques.

Quand ils levèrent les yeux en direction de la femme, celle-ci avait disparu. Elle était partie.

Et alors la solide porte inerte s'ouvrit d'elle-même.

Hiyama et Kazakami jetèrent prudemment un œil à l'intérieur.

— Q-Qu'est-ce qui s'est passé ? On a entendu un énorme bruit.

— Ha... Ha ha.

Ils entendirent un petit rire détendu.

Il provenait de Matsumi qui était adossée à un mur. Elle tenait un pistolet d'où s'échappait encore un peu de fumée. La tension qui la tenait en place s'était dissipée, alors elle glissa contre le mur jusqu'à une position assise.

Matsumi avait survécu.

La deuxième attraction était terminée et la porte du bloc opératoire s'était ouverte.

Ils avaient obtenu la clé des barreaux métalliques qui bloquaient le passage, alors ils pouvaient continuer.

Et...

Pour ce qui était de Rachel sur le mur opposé...

— Ha... Hein ?

Son visage tout entier était trempé de sueur et son expression montrait une certaine confusion. C'était comme si elle ne comprenait pas comment elle avait pu survivre.

Higashikawa prit une profonde inspiration et dit :

— On a tous réussi à survivre une fois de plus. Continuons comme ça.

Puis il marcha jusqu'à la lycéenne appelée Matsumi.

Ce ne fut qu'une fois à proximité d'elle qu'il remarqua quelque chose.

Sa mine arborait toujours un regard sombre et quelque peu irrité.

— Prends-les, dit-elle tout en tendant ses deux pistolets à Higashikawa.

— Hé.

— L'un d'entre eux a toujours une vraie balle. Tire-la dans un endroit sans danger. ... Oh, je sais. Tire-la en direction des sièges d'observation au-dessus.

Puis elle fit un geste de la tête en direction de Rachel qui s'était effondrée au sol.

— Fais pareil avec les siens. Dépêche-toi.

— ?

Partie 6

Deux coups de feu résonnèrent.

Higashikawa avait tiré avec les deux pistolets chargés avec une vraie balle.

La situation semblait être dénouée.

Matsumi arracha un des pistolets des mains de Higashikawa et pressa la détente tout en visant un mur. Cependant, il semblait que toutes les balles sauf la première étaient à blanc. Le cylindre continua de tourner encore et encore, mais aucune balle ne partit. Elle ne pouvait clairement pas servir d'arme, alors elle la jeta sur le sol du bloc opératoire.

Une fois encore, les cinq avaient survécu.

Ils n'avaient pas la moindre idée de quand ni où commencerait la troisième attraction, mais visiblement, ils s'en sortaient très bien.

Hélas, la situation n'était pas si favorable que ça.

Après la fin de ce jeu de tir, Matsumi était la seule à connaître la vérité.

Au tout dernier moment, Rachel avait tiré avec le pistolet dans sa main gauche.

Matsumi lui avait dit que celui à droite était chargé à blanc et que celui à gauche avait une vraie balle.

Et pourtant, elle avait utilisé ce dernier.

Dire qu'elle avait paniqué et qu'elle s'était trompé n'était pas une excuse valable. Rachel avait sciemment choisi celui de gauche qu'elle savait contenir une vraie balle.

Et Matsumi avait prévu que cela arriverait.

Elle avait tendu à Rachel une paire de pistolets, mais cette dernière lui avait alors demandé d'échanger. Matsumi n'avait pas la moindre idée de la raison qui poussait Rachel à faire ça, mais elle était clairement devenue méfiante. Et ainsi, Matsumi avait discrètement échangé les pistolets de ses mains droite et gauche avant de les tendre à Rachel.

Cela lui avait sauvé la vie.

Si elle avait vraiment tendu les pistolets comme elle l'avait dit, Matsumi aurait été tuée.

— Hoo...

Donner les pistolets à Higashikawa après avait également une signification.

Un pistolet chargé avec une vraie balle était une puissante arme, mais il était trop dangereux d'en laisser un à Rachel. Néanmoins, Matsumi doutait que celle-ci aurait accepté si elle avait demandé à Rachel de lui remettre son pistolet. N'importe qui en voudrait un dans cette situation.

Si Matsumi avait tenté de forcer Rachel, il y avait le risque qu'elle lui tire dessus.

Et donc, elle avait abandonné ses propres armes à Higashikawa d'abord. Elle avait créé une situation d'équité apparente. Et si Rachel avait pété un plomb et était devenue violente, le danger serait tombé sur Higashikawa et non Matsumi.

Fort heureusement, Rachel avait accepté de donner son pistolet à Higashikawa.

Mais...

Matsumi ignorait toujours ce qui avait poussé Rachel à tenter de la tuer.

Les règles de l'attraction ne donnaient aucune raison de vouloir éliminer l'autre participant.

Cependant...

Gare au traître.

Les mots écrits sur ce panneau déchirait la poitrine de Matsumi.

Elle doutait que ces mots faisaient référence à Rachel. L'inverse était plus plausible. Rachel s'était peut-être rendue compte de quelque chose.

Elle avait peut-être compris que Shirauo était du côté d'Attraction Land.

Quoi qu'il en soit...

Elle réfléchit calmement tout en chassant le soulagement d'avoir surmonté ce grand obstacle et la tension du danger qu'elle devait avoir encore à éviter.

On dirait qu'accepter simplement que tout le monde travaille main dans la main pour notre survie mutuelle suffira pas.

En apparence, tout le monde semblait aller bien.

Mais d'invisibles fissures avaient manifestement commencé à se former.