Maria-sama ga Miteru (Français):Volume1 Chapitre5
Une deuxième semaine brûlante
Partie 1
Le mercredi suivant, Tsutako alla trouver Yumi pour lui dire que Sachiko était étrange.
- Étrange...?
- Et bien, pas vraiment étrange mais... Elle ne se conduit pas comme d'habitude.
- C'est la même chose.
Le festival de l'école était dans trois jours et la majorité des étudiantes étaient totalement débordées. Cette semaine, les cours avaient été déplacés en matinée, afin de laisser l'après-midi libre pour les clubs, les groupes et les comités. La dernière ligne droite.
Tsutako avait interpellé Yumi dans le couloir.
- Alors, pourquoi est-ce que tu dis ça ?
- Elle ressemble à un chikuwa [1].
- Un chikuwa ?
Tsutako disait habituellement que l'allure de Sachiko était celle d'une princesse fière et hautaine, d'une bougie dure à la mèche droite. Mais, ces temps-ci, Sachiko était plutôt comme un chikuwa évidé, une bougie qui a perdu sa mèche. Elle regarda autour d'elle, soupira et dit :
- Elle est même venue me voir au club de photographie.
Tsutako mordit son mouchoir, frustrée, « Ça ne lui ressemble pas du tout ».
- Quand les choses la concernent, elle est plutôt du genre à demander aux gens de venir la voir plutôt que l’inverse.
- Ça ne dépend pas plutôt des gens et de l’importance de la chose ?
Tsutako voyait toujours les choses d’une façon différente. Mais quoi qu’il en soit, cela voulait dire que Sachiko s’était rendue au club de photographie pour régler quelque chose.
- Et devine ce qu’elle a dit… ? « Si tu veux utiliser la photo de Yumi et moi pour le festival de l’école, tu peux » !
- Sachiko-sama…
Ça, c’était vraiment très bizarre. La Sachiko normale n’aurait jamais permis une telle chose si la personne qui la désirait n’était pas venue lui en parler. Même si elle en entendait parler, si on ne venait pas la voir directement pour lui en parler en face à face, elle ignorait le tout complètement.
- Enfin, bref. C’est à toi. Félicitation.
Tsutako baissa les épaules et tandis quelque chose à Yumi.
- Ah, c’est...
C’était les deux photos qu’elle avait prise lundi dernier, sur lesquels on voyait Sachiko arranger la cravate de Yumi. C’est vrai, c’est ainsi que tout avait commencé.
- Elle a changé. Je me demande ce qu’il lui ait arrivé, dit Tsutako en enjambant des journaux qu'une classe avait renversé en travaillant sur un grand panneau dans le couloir.
Yumi n'était pas aussi sûre d'elle quand il fallait sauter par-dessus des objets, alors elle marcha prudemment sur le côté pour les éviter.
Elle avait l'impression de savoir ce qui lui « était arrivé ».
Si Sachiko était comme un chikuwa ou une bougie sans mèche c’était parce qu'elle avait rencontré Kashiwagi samedi dernier.
- Ah, Yumi-san. On m'a aussi dit pour le club de journal.
- Le club de journal ? Qu'ils ont arrêté de me demander sans cesse une interview ?
- Oui. Apparemment, c'est à cause à Sachiko-sama.
Ce « à cause » semblait de mauvais augure. Qu'avait bien pu faire Sachiko ?
- La semaine dernière, tu étais complètement dépassée, car elles te poursuivaient partout, pas vrai ? Sachiko a du se sentir responsable quand elle a découvert ça, elle est allée parler directement à la responsable du club. Comme elles sont toutes les deux des deuxièmes-années, les négociations ont du être plus simples.
- Je ne pense pas qu’ils arrêteront juste parce que Sachiko leur a demandé.
- Exact. On m’a dit que Sachiko s’était fait interviewer à ta place. À la condition qu’ils arrêtent de te suivre partout.
- Hein… ?!
Elle n’était pas du tout au courant.
Sachiko l'avait protégé complètement à son insu. Même si elles se voyaient tous les jours, elle n'avait rien remarqué.
Tsutako ajouta que le club du journal était resté silencieux car ils avaient maintenant l'histoire entière en leur possession.
- La moitié de l'article est déjà prêt. Le reste dépend que tu acceptes ou non le rosaire de Sachiko-sama avant le festival de l'école. Et que tu sois ou non Cendrilon. Ils attendent la suite.
- Tu es bien au courant.
- Le club du journal est dans la pièce voisine à celle de mon club. Quand je développe mes photos et que je suis seule, je les entends parler, que je le veuille ou non.
- Que tu le veuilles ou non.
- Oui, même si je n'en ai pas envie.
Elles finissèrent de descendre l'escalier en silence et, arrivées au rez-de-chaussée, se séparèrent dans leurs directions respectives.
- Tu n'as pas des fois l'impression que quelque chose est sur le point d'arriver ? demanda Tsutako en pivotant sur elle-même.
- Quelque chose ?
- Tu sais bien. On en parle tout le temps. Une personne sévère devient gentille tout à coup, et puis elle disparait. Et quand tu essayes d'en parler de nouveau, tu te rends compte que ce n'était qu'un souvenir. Quelque chose dans le genre.
- Qu'est-ce que tu dis ?! Ce n'est pas un présage...
Yumi rit. Le club de journal s’était fait moins omniprésent depuis le milieu de la semaine dernière. Sachiko était devenue étrange à partir de samedi, les deux phénomènes n’étaient donc pas liés.
De plus.
Sachiko ne s’enfuirait pas. Yumi lui faisait confiance.
Sachiko ne s'enfuirait jamais. Elle lui avait promis.
Au premier étage de la Demeure des Roses, Sachiko avait tiré une chaise près de la fenêtre et regardait dehors.
Les rideaux de conton ondulaient doucement dans le souffle léger du vent. La brisa faisait aussi bouger les cheveux de Sachiko.
Elle ne remarqua pas Yumi quand celle-ci rentra dans la salle. Elle resta assise, à regarder dehors, telle une princesse prisonnière d'un donjon.
- Depuis quand es-tu là ?
La princesse se rendit enfin compte de la présence de Yumi.
- Ça fait environ dix minutes.
- Je vois.
- Il n'y a personne d'autre ?
- Ils doivent sûrement être occupé avec leur classe, je pense. Et Shimako ?
- … Au comité pour la protection de l'environnement.
- Ah.
Même les membres de la Demeure des Roses ne consacraient pas tout leur temps libre au conseil des étudiants. Elles faisaient aussi partie de clubs ou de comité dans lesquels elles devaient se rendre de temps en temps.
- Sachiko-sama, vous faites partie d'un club ?
- Non.
Sa réponse était totalement neutre. Cela devait être la conséquence de ces innombrables leçons qu'elle avait du recevoir pendant son enfance. Les deux seules personnes qui n'avait ni club ni comité à rejoindre s'étaient donc réfugiées dans la Demeure des Roses.
Sachiko soupira doucement en regardant par la fenêtre.
Elle doit sûrement penser à Kashiwagi, pensa-t-elle instinctivement.
Une vue aussi misérable n’allait pas à Sachiko. Yumi rassembla son courage et dit :
- Sachiko-sama.
- Oui ?
- Qu’est-ce qui se passe ?
- Se passe… ?
Peut-être voulait-elle faire comme si rien de particulier n'était arrivé. Son visage était étonné, comme si elle ne comprenait pas de quoi elle parlait.
- Vous semblez avoir besoin d’aide.
- Si c’est le cas, tu m’aiderais ?
Son visage était sérieux, Yumi répondit timidement « si c’est en mon pouvoir ».
- Alors, accepte mon rosaire.
- Quoi ?!
- Tu as dit que tu m’aiderais si c’était en ton pouvoir.
Sachiko sortit son rosaire et lui tendit. Il était très beau, très brillant. Mais il ne venait pas seul, elle ne pouvait pas répondre « très bien » et l’accepter.
- Si il y a quelque chose d’autre…
- C’est tout ce que je te demande.
Sans rien ajouter d’autre, elle remit son rosaire dans sa poche. Elle avait juste essayé de tenter sa chance.
- Vous le détestez à ce point ?
Une chose était certaine : sa volonté de donner le rosaire à Yumi n’était pas basée sur l’envie d’en faire sa petite sœur. Si elle réussissait à séduire Yumi avant le festival, elle pouvait échapper au rôle de Cendrillon.
- Bien sûr.
Yumi n’avait pas prononcé le nom de Kashiwagi, mais Sachiko avait compris la signification de sa question et répondit.
- Mais, vous avez déjà dansé avec lui pas mal de fois…
- Ce n’est pas une histoire d’habitude.
Elle parlait comme si elle crachait du venin.
Tout cela ouvrait sur un certain nombre de problèmes. Après tout, le plan de Rosa Gigantea était d’habituer Sachiko aux garçons.
- J’espérais que peut-être les choses s’arrangeraient si je le rencontrais… Mais, ça n’a pas été le cas.
Sachiko soupira une nouvelle fois.
Yumi réfléchissait.
Est-ce que c’était parce que Kashiwagi était un garçon ? Ou est-ce que c’était parce que le garçon était Kashiwagi ?
Cela semblait être la même chose de prime abord, mais elle sentit qu’il y avait une différence.
Sachiko semblait y voir une différence.
≈≈≈≈≈≈
Le temps passa, pressé par les soupirs.
Il y avait encore beaucoup de choses qui restaient à faire et encore d'autres qu'on voulait faire, il n'y avait pas d'autre choix que de s'affairer ça et là avec précipitation pendant les trois derniers jours. Même après avoir reçu leur après-midi libre de l'école, les élèves en voulaient trop et étaient incapables d'utiliser leur temps aussi judicieusement que possible.
Lors de cette dernière ligne droite, Yumi révisa les lignes de Cendrillon chez elle, au lieu de regarder la télévision. Pendant la récréation, elle répétait les pas de danse avec Shimako sur l'herbe.
Elle ne savait pas elle-même pourquoi elle travaillait si dur. Mais, elle était la remplaçante de Cendrillon, elle se sentait obligée de faire de son mieux, en cas d'urgence.
Mais pourquoi était-ce un cas d'urgence ? Les urgences sont rares, elle ne voulait pas y penser.
La date limite se rapprochait de plus en plus.
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